Inhepsie – Obédience

Inhepsie est un groupe de metal assez singulier, qui existe depuis déjà plus de 10 ans et en 2012 sur le label Brennus, nous apporte son troisième opus du nom d'Obédience. Un nom de groupe aux sonorités françaises, un nom d'album dans la langue de Molière, une tracklist en français … tout cela peut laisser présager beaucoup de choses. Qu'en est-il donc de cet album ?

Aujourd'hui, l'originalité est devenu une qualité très recherchée en ce qui concerne le metal, car les détracteurs de (notre/votre) genre préféré aiment pointer le manque de renouvellement qui tire le style vers le bas. Et ce reproche ne sera pas à adresser à Inhepsie, tant leur démarche est osée, et dote la musique du combo d'une réelle personnalité, qui fait plus que plaisir à entendre. Certains pourront être rebutés par cet aspect, mais le groupe nous offre ses paroles dans la langue de Molière. Et si le français souffre de la réputation de ne pas être une langue très mélodique, la frontwoman Cathy Bontant a trouvé le remède idéal. En effet, on retrouvera de nombreuses rimes, et de petites poésies pour former les textes. Cette formule aurait pu être lourde et tirer l'ensemble vers le bas, mais ce ne sera pas le cas, bien au contraire, car tout paraît ainsi bien plus agréable à l'oreille, et on sent une réelle recherche au niveau des textes, comme dans la musique, point primordial sur lequel nous reviendrons. Ainsi, le fait que la formation chante dans sa langue maternelle n'est nullement gênant. Mais il ne s'agit pas du seul point qui confère au combo son aspect si personnel.

Inhepsie s'amuse à marier douceur et puissance dans une musique qui est à la croisée de différents chemins. La lourdeur des guitares nous ferait presque penser au doom metal, de même que le côté éthéré de la musique tire vers l'ambiant, mais le rythme tend parfois à se faire plus heavy ou, au contraire, délesté totalement d'éléments metal, pour ne se concentrer que sur la belle voix de la chanteuse (comme sur « Innocence », portée par le chant de haute volée). Ainsi, cette mixture mélangeant doom, metal gothique, ambiant, atmosphérique, rock est difficile à classer, et les influences, elles, semblent absentes, ce qui permet aux français de se forger un son qui leur est propre, sans jamais se prendre au piège. Aucun aspect n'empiète ou n'annihile un autre, bien au contraire. La maturité du groupe est si grande que chaque style se complète, forme une symbiose avec les autres, et la cohérence du propos nous permet ainsi de voyager au sein de l'univers développé par le groupe.

Une grande partie de la réussie d'Obédience repose sur la création d'ambiances, ce qui peut être un piège et tomber dans la mollesse. Ce ne sera pas le cas sur l'album, tant il existe cette cohésion qui donne une vraie cohabitation. On pense avoir une ballade, et puis surgissent les guitares, pour former un bal où, main dans la main, les instruments (souvent le clavier et la guitare) semblent jouer et se livrer à une rivalité. Cela a pour conséquence de laisser un peu la basse et la batterie en retrait par rapport aux éléments principaux que constituent le clavier, la guitare et la voix de Cathy. Malgré tout cela, les compositions gardent une vraie empreinte et une accroche réelle. La beauté est maître mot chez Inhepsie, que cela passe par le côté instrumental, le chant ou les textes. Un morceau comme « Savoir Pourquoi » en devient réellement addictif.

Pourtant, toutes les pistes ne sont pas au même niveau, et le propos tend à s’essouffler un peu sur la fin. « Il est temps » et « Innocence » ne sont pas aussi pertinentes (même si restant tout à fait de qualité, aucun mauvais titre n'est à déplorer) qu'un « Dernier Soupir » qui donne un réel effet de surprise, un « Clair de Lune » envoûtant et enchanteur ou « Grimoire » au rythme plus soutenu qui tranche un peu avec le reste, gardant cependant la cohérence initiale, et brisant toute incursion de la linéarité, grande absente de ce Obédience. Suffisamment de diversité est apportée par différents petits éléments, discrets mais influents. Déjà, la diversité des paroles et la variété du langage permet de nous habituer à diverses sonorités quant aux textes, piliers de la musique des français, là où bien des formations oublient que cet aspect reste malgré tout important. Le quatuor évite également de nous resservir systématiquement les mêmes structures, avec un véritable travail sur le fond, mais également sur la forme. Les lignes vocales et instrumentales sont tout aussi diversifiées. Même si le tout ne semble pas toujours très judicieux lorsqu'il s'agit de faire cohabiter la tristesse apportée par les dames à cordes et la lumière du clavier (« Les Anges »), la recherche et la qualité musicale n'est pas à dénigrer, ni à nier : on sait où le groupe souhaite aller, et le professionnalisme dont ils font preuve permet d'arriver à de beaux résultats, comme sur « Clair de Lune », irréprochable et prenante.

La musique d'Inhepsie demande cependant un certain temps d'adaptation par son originalité, et nécessite réellement de se pencher dessus. Il peut paraître assez ardu, au départ, d'adhérer à la démarche et à l'approche musicale développée par le combo. Il est vrai que tout cela n'est pas habituel, mais fait vraiment plaisir à entendre une fois notre oreille capable d'assimiler tout cela. Même si on peut regretter une production qui n'est pas parfaite, elle donne paradoxalement encore plus d'émotion à la musique. Les sentiments par rapport à Obédience sont difficile à décrire tant ils sont multiples. Ce qui est certain, c'est qu'il y a ce petit quelque chose qui transporte, qui fait rêver dans l'opus, et cela passe également par le chant fascinant de Cathy Bontant, qui effectue un travail remarquable. Quelques petites faussetés qui seront gommées par la prestance de la demoiselle, qui sait user sa voix de la meilleure façon en toutes circonstances, pour contribuer pleinement à cet aspect prenant.

Trois pistes se démarquent du lot : « Clair de Lune » qui nous berce et nous secoue à la fois, la dualité lourdeur/atmosphère étant présente et utilisée adroitement, « Savoir Pourquoi » et son piano magnifique, ses lignes de chant fascinantes et son charme si particulier, et « Les Anges », à l'introduction certes maladroite et peu utile, mais la piste est rattrapée par tout le reste : performance vocale au top, paroles très bien écrites, mélodie de haute volée. L'aspect mélodique est central chez Inhepsie, et ce point n'est jamais oublié. Tout est fait pour être à la fois personnel mais accrocheur, tout en étant un peu rebutant au départ. L'adresse des compositions est tout à fait admirable.

Voilà un quatuor difficile à aborder et à décrire. Inhepsie joue un style très personnel, et qui ne flanche presque jamais. Pour autant, les moins patients n'accrocheront peut-être pas à cette musique difficile d'accès, mais pourtant très bien composée, interprétée et très variée, tout en gardant une ligne conductrice. En clair, Obédience est une très bonne surprise d'un groupe français qui montre un réel talent, dans moult domaines. A écouter pour les curieux, car tout cela vaut le détour et Inhepsie ne doit pas être laissé dans l'ombre.
 

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NOTE DE L'AUTEUR : 8 / 10



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