Entretien avec Nick Holmes de Paradise Lost


C’est un Nick Holmes qui nous accueille dans la partie business d’un hôtel climatisé alors qu’il doit faire 40°C dans les rues brulantes de Paris (une autre époque). Décontracté, il enchaine les interviews avec une bonne bière à portée de main. L’homme est agréable, bavard avec son accent cockney (merci à Eloïse pour son aide sur de nombreux passages en mode accéléré). Ce 15ème album nous ramène à la genèse du groupe. Les serpents frémissent, Medusa se réveille…

Lionel / Born 666 : D’abord quel est ton état d’esprit à la sortie de ton 15ème album ?

Nick Holmes : Plutôt bien, en fait ! Je n’ai pas l’impression d’avoir déjà fait 15 albums, parce que lorsque tu travailles sur un album, tu écris, tu enregistres, tu faits les tournées, et tout ça dure entre 3 et parfois 4 ans et ensuite ça recommence, écriture, enregistrement. Tout s’enchaîne très vite. Tant que tu as toujours la santé, et que rien ne change vraiment dans ta vie de tous les jours, tout va bien. Et tu prends toujours plaisir à le faire.

Lionel : C’est pour cela que je n’ai pas posé la question en années mais en albums (rire)...

Nick Holmes : Oui, l’année prochaine ça fera 30 ans…

Lionel : Pourquoi Adrian Erlandsson a-t-il quitté le groupe et peux-tu nous présenter le nouveau batteur ?

Nick Holmes : Adrian a quitté le groupe car il jonglait déjà entre plusieurs groupes (At the Gates, Riket, The Haunted, ex-Decameron). Il était toujours très proche de son premier groupe At the Gates. Faire deux choses en même temps n’était pas simple comme enregistrer pour l’un et tourner en même temps pour l’autre. Il a été loyal. Ce n’était pas évident de continuer ainsi. J’avais rencontré un finlandais nommé Valtteri (Väyrynen) heu comment, je n’arrive jamais à prononcer son nom de famille (rire). Tu retrouveras sur internet. Il a rejoint Greg (Mackintosh) dans Vallenfyre (projet parallèle du guitariste de Paradise Lost). Il a tout de suite trouvé ses marques, c’est un grand batteur et il a déjà joué avec Vallenfyre alors ça a matché rapidement, sans oublier qu’au départ c’est un grand fan de Paradise Lost et il connait très bien notre discographie.

Lionel : Un nouveau mec dans l’équipe…

Nick Holmes : Oui c’est ça et il n’a que 22 ans, il est jeune…

Lionel : La question que l’on doit poser aux groupes dans le metal (en référence à Spinal Tap). Combien de batteurs sont passés au sein de Paradise Lost ?

Nick Holmes : 6 batteurs en 30 ans, ça va ce n’est pas si mal.

Lionel : Avec Medusa, on retrouve Paradise Lost dans le death metal, doom metal comme lorsqu’on vous avait quitté sur The Plague Within. Dès le départ était-ce une volonté de votre part de continuer sur cette lancée ?

Nick Holmes : Le dernier morceau « Beneath Broken Earth » qui se trouve sur The Plague Within a donné le ton de ce nouvel album. On a écrit les chansons très vite. On les a jouées en live, et elles sonnaient vraiment bien. Ça donnait un côté old school, et on s’est dit qu’il fallait qu’on fasse plus de chansons dans cette lignée. Et c’est ce qu’on a fait pour les dernières chansons de ce nouvel album. Le son ressemble beaucoup à celui qu’on avait lorsque le groupe a débuté.
 

Nick Holmes


Lionel : Avant d’y travailler, vous aviez quand même quelque chose en tête ?

Nick Holmes : Tu sais, lorsqu’on parle de doom on sait où l’on va et on sait très bien le faire. On est revenu à nos débuts lorsqu’on était jeune à la création de Paradise Lost. Donc recommencer aujourd’hui avait un côté presque naturel, on ne s’est pas senti forcé de le faire. On pense avoir fait un album honnête.

Lionel : Est-ce quand même difficile de donner une direction à un futur album après avoir tourné pour la promo de l’album précédent ?

Nick Holmes : Je pense qu’en premier lieu, c’est le premier morceau qui est le plus difficile à trouver. Il faut se remettre sur les rails. Mais après avoir composé deux ou trois chansons on se remet vite dans le bain. Tu sais on a écrit cet album en 7 mois, ce qui est tout de même rapide pour nous car généralement on prend une année entière pour le faire. Donc on peut dire qu’on a été assez rapide.  Pour nous le processus n’a pas été difficile car c’est le genre de musique que l’on faisait quand on était des gamins. C’était donc très naturel pour nous de la composer.

Lionel : Si on parle de Medusa et que l’on aborde le mythe. Est-ce que vous y voyez la puissance des femmes en général ou le regard dévastateur de certaines femmes ?

Nick Holmes : En fait, j’ai pensé que Medusa ferait un bon titre d’album, mais pour le justifier j’aurais voulu lire un peu plus de choses sur ce mythe. Mais je trouvais que le mythe de Medusa était un bon parallèle avec ce qui se passe dans le monde actuellement. On préfère ne pas regarder l’horreur en face de peur d’être stupéfié, de ne pas savoir quoi faire pour changer les choses. Donc, je trouvais que le titre marchait bien au niveau de la métaphore. C’est pour ça que Medusa est un bon titre d’album.

Lionel : Donc ce n’est pas un album qui parle des femmes ? (rire)

Nick Holmes : Non (rire). Seulement sur cette ligne directrice.

Lionel : Sais-tu ce que représente Medusa pour Freud ?

Nick Holmes : Freud ? Le philosophe ?

Lionel : Oui, Medusa est une représentation de la castration (Rire général)

Nick Holmes : Oui c’est vrai je suis allé sur la page Wikipedia et il y en a des tonnes et des tonnes sur les différentes interprétations, et le point de vu féministe du mythe…

Lionel : Donc l’album n’est pas un concept album ?

Nick Holmes : Non. J’aime les concepts album mais je n’ai pas trouvé de concept sur lequel j’en savais assez. Car pour pouvoir faire un concept album, vous devez savoir de quoi vous parlez. Cela doit aussi être une idée intéressante. Vous pouvez faire un concept album sur le Titanic et la manière dont il a coulé, par exemple. Beaucoup de groupes font des concept albums, mais certains concepts peuvent être ennuyeux parfois.

Lionel : Pourtant Medusa est présente sur la pochette…

Nick Holmes : Tu sais, si j’avais voulu en faire un concept j’aurais dû lire beaucoup, beaucoup de chose dessus. Et devenir très métaphorique et les gens se seraient demandés ce qu’on foutait. J’aurais vraiment dû savoir ce qui se cachait derrière ce mythe pour pouvoir en faire un concept.
 

Nick Holmes


Lionel : Apparemment au Download vous avez eu un problème sur l’intro d’un titre. Vous vous y êtes repris trois fois pour le faire. Que s’est-il passé ?

Nick Holmes : Non, on ne s’est planté qu’une seule fois.

Lionel : Désolé je n’y étais pas, j’étais au Hellfest… (Rire)

Nick Holmes : Je crois qu’on a fait un faux départ, j’ai dit « stop » et on s’y est repris à nouveau. C’est comme ça la musique.

Lionel : C’était sympa votre expérience du Download ?

Nick Holmes : Oui très bien. Il faisait très chaud sur scène. La foule réagissait bien. Très bonne atmosphère.

Lionel : Est-ce que le fait que tu aies rejoint Bloodbath a joué dans le sens où cela a affecté ta façon de chanter ?

Nick Holmes : Je pense que cela donne plus de groove dans ma voix. La façon de chanter dans Bloodbath est très intense. C’est très difficile et tu n’arrêtes pas de chanter. (Il mime « bababababa »). Cela m’a aussi permis de retourner aux sources du death metal, chose à laquelle je n’avais pas pensé ces quelques dernières années. Puis j’ai commencé à réécouter un peu de death metal et à l’apprécier comme lorsque j’étais un gamin.

Lionel : Pourtant ta couleur musicale est assez large…

Nick Holmes : Oui bien sûr. Mais tu sais la musique la plus importante est toujours celle qu’on écoutait quand on était jeune. C’est ce qu’il y a de plus important dans la vie. On s’en souvient pour le restant de sa vie.

Lionel : Et maintenant, qu’aimes-tu le plus écouter ?

Nick Holmes : Pour ce qui est d’écouter, en ce moment j’aime bien un groupe qui s’appelle Carpenter Brut. C’est un groupe d’électro (français) avec un côté musique d’horreur. J’adore ce côté film d’horreur. Je crois que ce style s’appelle wave gothic. J’aime vraiment ce qu’ils font. C’est de la super musique pour conduire. Après, concernant le fait de jouer de la musique, j’apprécie vraiment de jouer les morceaux de notre nouvel album. C’est un peu comme remettre une vieille veste et de voir qu’elle vous va toujours !

Lionel : Quand tu t’attèles à un nouvel album, à quoi penses-tu en premier, la musique, le concept, les paroles…

Nick Holmes : La musique en premier. Ensuite, on fait en sorte que les paroles collent bien à la musique. Particulièrement quand on utilise le growl. La voix devient comme un instrument additionnel. C’est un peu la cerise sur le gâteau. Les paroles doivent sonner juste sur la chanson. Les paroles et la musique doivent fonctionner ensemble. Les paroles sombres vont souvent bien avec notre musique.

Lionel : Donc pour Medusa, il n’y a pas d’espoir car seule la mort nous attend à la fin.

Nick Holmes : Quoi qu’il arrive il y aura toujours la mort à la fin (rire). C’est définitivement la fin. Personnellement, je ne suis pas nihiliste. Je crois en beaucoup de choses. Je crois en l’amitié. Mais peu importe ce à quoi l’on croit, il y aura toujours une fin à un moment donné.

Lionel : Et les meilleurs moments passés lorsque tu travailles sur un nouveau bébé, un nouvel album ?

Nick Holmes : Quand tu commences à voir un titre qui prendre forme. Car parfois, les choses prennent du temps avant de se mettre en place. Des fois on a dix versions différentes d’une même chanson. Des fois, il faut faire des coupes. Mais une fois qu’on a trouvé la bonne chanson c’est un super sentiment. Certaines chansons vous viennent comme ça en un instant, et d’autres vous prennent des plombes et tu ressens un moment de panique car il y a des deadlines à respecter. Mais une fois qu’on a tout c’est vraiment un soulagement, un super sentiment.

Lionel : Quels ont été les morceaux faciles à écrire ? Et ceux qui ont été plus difficile à composer ?

Nick Holmes : Je pense que les titres qu’on écrit depuis les années 2000 sont plus difficiles dans l’écriture. Et puis ça dépend de ton inspiration. Si tu rentres dedans c’est plus facile. Mais si tu n’y es pas tu n’arriveras à rien. Des fois, quand tu n’es pas dans le bon état d’esprit il faut faire autre chose, ne rien faire pendant quelques jours. Il y a des jours où l’on n’est pas productif. C’est un peu comme écrire un livre, des fois tu arrives à écrire quelques pages et d’autres non. Tu ne peux pas juste t’asseoir et te dire que tu vas faire un travail génial. Tu dois être inspiré pour ça.

Lionel : Il y a beaucoup d’échanges entre toi et Greg ?

Nick Holmes : Greg a changé sa façon d’écrire. Avant, je faisais la ligne de chant et la musique autour. Mais maintenant, il écrit la musique autour de la ligne de chant. Les paroles c’est mon truc, mais pour organiser les lignes mélodiques, c’est lui. C’est une façon de faire qui est différente mais ça marche bien comme ça.

Lionel : En tant que musiciens est-ce ennuyant de jouer de vieux morceaux sur scène ou est-ce que cela reste quand même toujours un plaisir ?

Nick Holmes : Ça dépend. J’aime plus certains titres que d’autres. Mais ça ne dépend pas de quand datent les chansons. Il y a aussi des chansons qui sont meilleures en live. On n’aime tous plus certaines chansons que d’autres, mais quand vous êtes sur scène, il y a l’adrénaline. Donc ça ne dépend pas de ce que l’on aime ou de ce que l’on aime pas. Cela dépend de ce que l’on ressent. Et puis, si on déteste une chanson, on ne la joue pas dans nos concerts et c’est tout. Clairement, il y a des fois où je n’avais pas envie de jouer certaines chansons, alors on ne les a pas jouées en concert.

Lionel : D’un autre côté on n’imagine pas les Rolling Stones monter sur scène sans jouer « Satisfaction » …

Nick Holmes : Oui c’est exactement ça. Mais ça doit toujours être un plaisir de jouer vos morceaux sur scène. Vous ne devriez pas penser à si vous aimez une chanson ou non quand vous êtes sur scène.

Lionel : Je me souviens qu’au Hellfest l’année dernière tu paraissais très énervé de voir autant de photographe (j’en faisais parti) devant la scène quand tu jouais avec Bloodbath… en balançant des « fucks ! » !

Nick Holmes : (rire) Je ne m’en souviens pas. Les photographes ne devaient pas être le problème. Peut-être des problèmes de son. Avec Bloodbath il y a tellement de parties de chant que je n’arrive pas à penser ! Au milieu de la scène je suis plutôt en train de chanter « yeahyeahyeahyeah ».

Lionel : Un dernier mot ?

Nick Holmes : J’espère que vous allez aimer l’album, on va bientôt passer par la France et on espère jouer à Paris. Et jetez une oreille à l’album !

Un grand, très grand merci à Eloïse pour son aide sur son analyse et son intelligence sur la langue anglaise qui parfois nous joue de drôles de tours...

Photos : © 2017 Lionel / Born 666
Toute reproduction interdite sans autorisation écrite du photographe.

 

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