Therion – Beloved Antichrist


Né il y a quinze ans dans la tête de sir Christopher Johnsson, Beloved Antichrist est une œuvre à mi-chemin entre un beau cadeau pour les fans de Therion et les amateurs de rock/metal de tous horizons. Trois disques racontant une histoire, une aventure ; un challenge tant pour le groupe que pour l'auditeur. Dotée d'une infinie richesse, la seizième production des Suédois est une immense caverne au trésor qu'il va falloir explorer longtemps avant de trouver la sortie.

À œuvre exceptionnelle, chronique exceptionnelle. Un mois et demi d’attente entre la sortie d’un disque et la publication de sa chronique peut paraître scandaleux, voire irrespectueux. Pourtant, c’est bien pour respecter ce Beloved Antichrist que du temps a été nécessaire. Pour info (et chose rare), la rédaction de la Grosse Radio metal n’a malheureusement pas pu mettre la main sur le dernier Therion avant sa sortie officielle, et lorsqu’il s’agit d’un triple disque composé de 46 titres pour une durée de 3h02, la tâche s’avère bien rude.

Aussi s’est posé la question d’une chronique basée sur une seule écoute, mais c’est probablement cela qui aurait été irrespectueux vis à vis de vous, lecteurs. C’est donc après six écoutes complètes et attentives que votre serviteur attaque cette chronique qui, rassurez-vous, ne sera pas aussi massive que ce Beloved Antichrist.

Therion

Christopher Johnsson n’est jamais en manque d’idée et c’est souvent pour le meilleur. Avec le diptyque Lemuria/ Sirius B, par exemple, albums extraordinaires. Ou bien évidement Les Fleurs du mal et ses implacables reprises de chansons françaises servies à la sauce Therion. Et 30 ans après la naissance de ce combo, c'est le fruit d'une réfléxion de plus de quinze années qui voit enfin le jour : Beloved Antichrist, opéra metal gigantesque proposant une histoire, une quête, inspirée de l'oeuvre du poête et philosophe russe Vladimir Soloviev parue en 1899 : Court récit sur l'Antéchrist.

 

Therion


L'amour de la tête pensante de Therion pour la mythologie et les anciennes civilisations n'est plus à présenter. Mais ici, Christopher Johnsson pousse son imagination très loin et propose de suivre le parcours et les aventures de 30 personnages interprétés par plusieurs chanteurs et chanteuses.

Et c'est à ce moment que plusieurs noms familiers font leur apparition :  Lori LewisChiara MalvestitiLinnéa VikströmThomas Vikström... Ces voix et ces timbres sont bien connus des fans de la formation suédoise , dont certaines enchantent les oreilles depuis plus d'une décennie.

Pour en revenir à la forme, pas d’esbroufe. Deux compositions tombent sous la barre des deux minutes, un soulagement pour ceux qui craignaient un remplissage artificiel à coup de courts interludes destinés à faire la « transition » entre certains titres. On note par ailleurs un très bon équilibrage entre morceaux courts et percutants et longues envolées symphoniques.

 


L’un des autres points forts de ce BA est l’intelligence de son écriture, ou plutôt de sa construction, avec une bonne alternance entre efficacité et complexité. Cela rend l’écoute plutôt dynamique et plus facile à « digérer ». Mais il ne faut pas se leurrer, à moins d’être complètement maso ou totalement hypnotisé par l’œuvre, toute tentative de « one shot » sera vaine.

Concernant le fond à présent, on ne va pas y aller par quatre chemins : Beloved Antichrist est un album de Therion qui dure trois heures, ni plus ni moins. Comprenez par là qui si le projet brille par son ambition, sa démesure et sa qualité sonore, il ne transcende pas le style des Suédois et reste fidèle aux albums précédents. Certains pourraient peut-être même reprocher à Therion des idées trop « grand public », avec des morceaux aux sonorités un poil trop légères ("Jewels From Afar",  "Two Shine Forever")

Comme dit précédement, Beloved Antichrist, c’est aussi des titres d’une très grande efficacité, un nid à petits tubes qui feront des merveilles en live : Le groove de "Dagger of God", le refrain grisant de "Never Again", le hard-rock de "Shoot Them Down !" ou encore "Night Reborn", tout droit sorti de la période NWOBHM. De vraies petites friandises se mélangeant divinement avec les différentes voix et chœurs officiant sur la galette.

Dans un registre plus symphonique et opéra, on est parfois rempli d’émotion à l’écoute de petites merveilles : "Time Has Come/Final Battle" ; "Burning The Palace" ; "Where Will You Go". Et c'est peut-être là la force cachée de BA: S'adresser à tout le monde. Aux fans, aux curieux à ceux qui par le passé ont eu du mal avec Therion, chacun cherchera et notera ses petits chouchous pour y revenir lors de futures écoutes.

 


Dernier point à aborder, la production tout bonnement parfaite, ni plus ni moins. On ne pouvait certes avoir de doute avec Therion, mais on est malgré tout sur les fesses face au travail dantesque dont a bénéficié BA. Chaque instrument, chaque chanteur, chanteuse, cordes et percussion a bénéficié d'un travail extrêmement minutieux, d'une attention plus que particulière. Une réelle valeure ajoutée qui offre à l'auditeur un confort d'écoute optimal (et face à tout ce qu'il y a à entendre...).

C’est avec des albums comme Beloved Antichrist que l’expression « Avoir les défauts de ses qualités » prend tout son sens. D’un côté, on ne peut que s’agenouiller devant le gargantuesque travail abattu par Therion, l’attention extrême portée à la qualité de la production et la patience nécessaire pour aboutir à un tel résultat. Mais d’un autre côté, on ne peut s’empêcher de regretter l’investissement ainsi que le temps que demande une écoute complète. Et lorsque l’on est fan de Therion, difficile de ne pas pointer du doigt la direction prise par certains morceaux. Pourtant ce sont bien ces derniers, catchy et épiques, qui retiendront l’attention des néophytes désireux d’explorer l’univers de Christopher Johnsson et ses troupes, ou tout simplement ceux attirés par le concept de l’opéra metal… Au risque de lâcher l’affaire à la fin du premier acte.

C’est normalement maintenant que l’on lâche une autre expression : « À écouter avant d’acheter », mais il est clair que c’est impossible. Alors c’est peut-être sur scène que Beloved Antichrist prend tout son sens. Début de réponse dans le live report de leur dernier passage à Paris.

Pour faire simple : Se farcir Beloved Antichrist, c'est un peu comme aller dans l'un des restaurants de feu Paul Bocuse mais avec la possibilité d'y manger à volonté C'est la garantie de retrouver à chaque étape un travail et un résultat de qualité, s’enivrer jusqu'à la dernière goûte d'un grand cru millésimé pour, au final, sortir le ventre plein mais avec le sentiment de ne pas avoir eu le temps d'apprécier chaque met à sa juste valeur. Une bonne excuse pour y revenir.

Bon courage !

Sorti le 2 février 2018 chez Nuclear Blast

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NOTE DE L'AUTEUR : 9 / 10



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