Aeolian – Silent Witness

C'est d'Espagne, plus précisément de Palma de Majorque, dans l'archipel des Baléares, que vient le groupe Aeolian. Vivre sur une île, c'est être au plus près de la mer et des éléments, mais aussi être témoin des changements climatiques et des ravages de la pollution. Leur premier album, Silent Witness (sorti le 12 septembre chez Snow Wave Records), parle de la nature et de sa destruction, des hommes et de leur responsabilité. Thématique ambitieuse, et pari réussi pour cet album créatif et surpuissant, qui s'impose comme l'une des plus belles sorties de cette année dans le genre – pourtant plutôt nordique – du death metal mélodique.

On entend dans Silent Witness toute la majesté du cri de la terre, par les paroles déchirantes sur le mal subi par la planète et les envolées lyriques à couper le souffle. Il faut dire que le message est servi à la perfection par le chanteur Daniel Perez qui démontre une puissance vocale impressionnante et s'impose comme atout majeur de l'album grâce à la diversité des types de chants maîtrisés puisqu'il sait alterner growls puissants, hurlements révoltés, avec quelques passages en voix claire, voire parlée.

D'emblée, on est happé dans cette atmosphère épique dans le monumental morceau d'ouverture “Immensity”, où la beauté de la Terre est personnifiée et décrite dans un style riche, varié jusqu'au prog. Beaucoup de créativité également sur “The End of Ice” grâce à une instrumentation splendide et des guitares expressives. Le hurlement des glaciers qui fondent inexorablement est représenté à la perfection par le cri déchirant au chant.

 

L'identité death mélodique, melodeath diront certains, c'est d'abord l'expression d'une colère et d'une rage cohérente avec le message, par la voix mais aussi par la rythmique impressionnante (mention spéciale pour la basse de Toni Mainez et les guitares rythmiques, magistrales, de Raúl Morán et Gabi Escalas). Mais Silent Witness nous emmène aussi vers des passages plus légers, des ruptures vers le power, le pagan ou le folk. Alberto Barrientos, le batteur, sait se faire groovy par moments alors qu'il assène la minute d'avant un énorme double blast bien death. Basse et batterie se distinguent sur des morceaux comme“Witness”.

Certains titres de ce premier album d'Aeolian sont des chefs d'oeuvre en puissance, comme l'excellent “My Stripes in Sadness”,  entre le thrash et le death, où le cri répond au chant, avec un refrain fort, un pont folk et une ligne de basse excellente. Quelle ambiance pour ce titre où le désespoir de l'animal chassé fait écho à la vie qui s'éteint sur la planète ! Idem pour le petit bijou “Return of the Wolf King”, coup de coeur personnel, à la fois puissant et grave, folk et épique, entêtant et solennel.

C'est dans la seconde partie de l'album qu'arrivent des titres peut-être moins puissants ou moins mémorables. On atteint certainement ici les limites du genre melodeath : une sorte d'effet répétitif fait que l'élan s'essouffle quelque peu avec des titres un peu longs ou similaires dans l'intention, qui n'accrochent pas forcément à l'oreille.

Ce qui marque, ce sont les mélodies, le message universel et pas du tout caricatural porté par un vocaliste talentueux, des riffs accrocheurs et une section rythmique excellente. C'est du très bon death mélodique, mais la différence avec des groupes comme Amorphis par exemple, c'est que Aeolian n'utilise pas de claviers, et réussit, par la production soignée et l'instrumentation habile, à instaurer une ambiance et un aspect mélodique très à la hauteur de ce que peuvent fournir les Scandinaves – d'ailleurs, sans surprise, la maison de disque, Snow Wave Records, est finlandaise !

Il faut également mentionner la pochette splendide de l'album  évoquant la nature en révolte : des couleurs et des formes donnant un côté organique intrigant, majestueux et intimidant. Cet artwork a été réalisé par l'artiste Kilian Eng, qui a déjà travaillé pour Disney, HBO, Marvel, ou The New York Times.

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Difficile de croire qu'il s'agit d'un premier album tellement Silent Witness nous fait exploser sa maturité, voire sa majesté, au visage ! Une production solide, de la créativité et un message puissant qui passe à merveille, voilà les atouts indéniables de ce premier opus d'Aeolian. On en ressort époustouflé, prêt à recommencer le voyage, avec un sentiment de proximité avec les éléments. Et puis on a beau dire, une épopée death metal aussi magistrale, ça change un peu des spots classiques et infantilisants de sensibilisation pour la protection de l'environnement ! Aeolian est à coup sûr un jeune groupe qui s'est fait sans vergogne une place de choix dans la cour des grands. 

Liste des morceaux :

1. Immensity
2. The End of Ice
3. Chimera
4. My Stripes In Sadness
5. Return of the Wolf King
6. Going to Extinction
7. Elysium
8. Wardens of the Sea
9. The Awakening
10. Black Storm
11. Witness
12. Oryx

Aeolian - Silent Witness , sorti le 12 septembre 2018 chez Snow Wave Records

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NOTE DE L'AUTEUR : 9 / 10



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