Klara Force, guitariste de The Heard

Il y a quelques jours, nous avons rencontré Klara Force, ex-guitariste de Crucified Barbara et actuelle guitariste de The Heard, un projet fondé par les trois anciens membres de Crucified Barbara: Klara, Nicki et Ida. A ce petit groupe viennent s’ajouter Skinny, de Deathstars et le chanteuse Pepper Potemkin. Elle nous explique lors de cette interview la formation de ce nouveau projet et la naissance de ce tout premier album, The Island.

Vous sortez votre tout premier album avec The Heard, comment te sens-tu?

C’est un peu irréel, parce qu’on a travaillé sur cet album pendant pas mal de temps. On a commencé l’année dernière, on l’a enregistré durant l’été. Il sort enfin, nous sommes donc très heureux. C’est en tout cas très proche du résultat que je visais à la base. Je ne suis même pas nerveuse, car je suis très satisfaite du résultat !

Tu trouves cela plus difficile de sortir un premier album avec nouveau projet comme celui-ci, ou avec un groupe déjà établi, avec des fans et des attentes ?

Je trouve cela plus difficile dans notre cas de figure, car les gens ne connaissent pas notre groupe. Mais par contre, quand il s'agit de composer l'album et écrire la musique, c'est beaucoup plus facile. Je n'avais jamais écrit un album aussi facilement. Ça a vraiment été plaisir et les choses n'ont jamais été aussi fluides. C'était un vrai plaisir !

C'est aussi pour cela que vous le faites

C'est vrai, mais par le passé, tout ne s'est pas toujours passé comme ça. Il y a déjà eu plus de difficultés et d'insécurités. Bien sûr, on a aussi eu nos moments de doute avec cet album mais j'ai senti qu'on avait le contrôle, on avait une vraie vision du projet. C'était facile et fun.

Tu peux nous présenter un peu ce nouveau groupe, The Heard ? Comment tout a commencé ?

Lorsque nous avons arrêté Crucified Barbara, c'était évidemment très triste, mais c'était aussi libérateur.  Les derniers mois c'était assez dur, ce n'était finalement plus si amusant. On ne se sentait plus comme avant et ça touchait à sa fin. Mais c'était aussi le début de quelque chose de nouveau. Je parle pour moi, mais je sais que c'est la même chose pour Ida et Nicki. On peut dire que ça a un peu été un coup de pied au cul. On aime la musique et on n'en a pas terminé avec ça, on aime écrire. Donc nous avons commencé à jammer assez rapidement après la séparation du groupe. Et ça ne rendait pas si mal, c'était assez heavy. Nous avons tenté de nouvelles choses, tout ce qui ne pouvait pas fonctionner dans Crucified Barbara : On a ralenti les tempos par exemple. C'était vraiment libérateur, on pouvait faire ce qu'on voulait. A partir de là, nous avons décidé de commencer un nouveau groupe. Skinny et Pepper nous ont ensuite rejoint, c'était des connaissances, pas vraiment des amis proches. Enfin, maintenant ils le sont évidemment ! (Rires) J'avais croisé Skinny un jour, il me disait qu'il aimerait jouer plus. Il est bassiste dans Deathstars et je savais qu'il était également très bon guitariste. Nous lui avons donc proposé de nous rejoindre, nous lui avons envoyé quelques morceaux, et il a accroché. Pour Pepper, on la connaissait, elle dégage vraiment quelque chose. J’ai vu une vidéo d'elle qui chantait avec un groupe de reprises et sa voix était vraiment extra et j'en avais parlé aux autres. Un jour Ida l'a croisée dans le métro et lui a demandé de rejoindre notre groupe (rires). Elle était tout de suite ok, elle voulait rejoindre un groupe. Je ne comprends même pas qu'elle n'ait pas joué dans plus de groupes auparavant. Heureusement, elle est avec nous maintenant !

Parlons de l'album, c'est un peu un concept album, vous racontez une histoire tout au long de l'opus.

Oui, on partait de zéro, on ne voulait vraiment pas se forcer et on voulait jouer uniquement ce qui nous plaisait. Quand Pepper et Skinny ont rejoint le groupe, on a commencé à composer de plus en plus de morceaux. Ida et Skinny ont commencé à parler d'une île où ils avaient passé du temps, avec des histoires sombres, un peu effrayantes. On a commencé par écrire un morceau dessus, puis on a trouvé ça intéressant et on a écrit plusieurs morceaux. On a réalisé que tout l'album pouvait être à propos de cette même île. On a trouvé que le thème était bon, on a mélangé cela avec notre univers et romançant un peu le tout, nous avons commencé à créer de plus en plus de personnages liés à cette île. Chaque morceau est un peu comme une petite histoire à propos d'une personne ou d'un lieu.

Tu peux nous parler de l'enregistrement de l'album?

On a commencé à enregistrer à la maison. En fait, on a d'abord enregistré des démos assez travaillées et détaillées chez moi. On est vraiment des perfectionnistes, on aime bien tout arranger à la maison en premier. C'était très amusant à faire, et pour moi, apprendre comment enregistrer et tout ça. Ensuite, on a passé trois semaines à enregistrer dans un studio à Stockholm. Mais on avait tellement travaillé nos morceaux avant d'arriver en studio, on savait exactement ce qu'on voulait. On était préparés, que ce soit au niveau du son et des arrangements. On a commencé à enregistrer la batterie et la basse ensemble, puis la guitare, etc. On a également ajouté du mellotron et du clavier. C'était très fun de pouvoir expérimenter.

Côté guitare, vu que ce projet est assez différent de Crucified Barbara, est-ce que tu as essayé de faire évoluer ton son?

Je joue sur la même guitare et le même ampli Mesa Boogie Stiletto. Mais le son est très différent, car on a enlevé de la distorsion. On a beaucoup moins de distorsion, mais j'ai l'impression que ça sonne quand même plus heavy. C'était compliqué pour nous de faire ce changement. C'est forcément plus facile de jouer avec de la distorsion. Du coup là, on devait vraiment mieux travailler notre jeu. Ça a été pareil pour Skinny. On voulait que ça garde un côté organique, old school, mais que ça reste quand même frais. Pas rétro, mais actuel.

Il y a un morceau qui te tient particulièrement à coeur sur cet album?

J'aime énormément l'arrangement sur "Sirens". On avait vraiment travaillé ce morceau avec une optique très rock n roll puis on a voulu faire quelque chose d'autre, le réarranger et ça donne, je trouve, quelque chose de très intéressant. C'est vraiment compliqué pour nous de faire quelque chose de plus doux. On a fait tout le contraire de ça durant des années ! Skinny a fait un arrangement avec une guitare acoustique, j'ai ensuite ajouté le mellotron, j'ai vraiment adoré jouer de cet instrument, je ne l'ai jamais fait auparavant. C’est mon nouveau meilleur ami à présent (rires). Pepper a une voix très puissante, donc chanter doucement c'était aussi difficile pour elle. Quant à Ida, à la basse, elle a l'habitude de jouer avec vraiment beaucoup de force, ses mains deviennent presque des griffes. Elle aussi, elle a dû se poser et calmer son jeu. C'est assez marrant car on pourrait penser que l'inverse est difficile. J’adore donc ce morceau parce qu’il est très différent de ce que j’avais pu faire auparavant.

J’aime également beaucoup le morceau “Revenge”, qui est lourd de sens. C’est à propos d’un bourreau sur une île, condamnant des sorcières à mort, puis un jour, elles se vengent. C’est un morceau qui, pour moi, est très inspiré par le mouvement #MeToo. Il y a eu tellement d’histoires, de témoignages de femmes restées à ne rien dire pendant si longtemps. J’ai trouvé ces mois très durs, c’était horrible, mais c’était également l’heure d’une certaine vengence, de femmes se débarassant de leur honte.

Il y a évidemment un esprit féministe au sein de The Heard

Oui bien sûr. Lorsqu’on est féministe, on ne peut plus arrêter de l’être ensuite. Même si c’est un concept album, avec beaucoup d’éléments mystiques et de fantaisie, il y a aussi de nombreuses métaphores.

Avant même de sortir cet album, le groupe a été très présent sur les réseaux sociaux, vous postiez de nombreuses photos et de vidéos. C’est important aujourd’hui, cette présence sur internet?

C’était important pour nous de dire aux gens qu’on existait, qu’on faisait quelque chose. On partait vraiment de zéro. On a pas mal d’expérience, mais on est aussi un nouveau groupe, donc c’était une chance pour nous de pouvoir présenter ce que nous faisions, de la façon dont nous le voulions, avant de se lancer et que l’industrie se saisisse du groupe. On avait le pouvoir de le faire de la façon dont nous le voulions, toutes ces photos qu’on a postées nous représentent vraiment de la façon dont nous sommes maintenant, fidèles à nous-mêmes.

Une dernière question: Si tu avais à choisir deux albums ayant changé ta vie, lesquels seraient-ils?

C’est une question difficile. Bon, disons que ça peut changer demain (rires)! Le premier serait Impressions, de John Coltrane. Je l’ai écouté pour la première fois quand j’avais vingt ans, je ne connaissais rien au jazz. J’ai grandi en écoutant beaucoup de musique, mais pas vraiment de jazz. Et la première fois que je l’ai entendu, j’ai pensé, “ok, ça doit être contemporain, ça sonne comme quelque chose de très moderne”. Il y avait ce titre en bonus appelé “Dear Old Stockholm”, c’est une vieille chanson folk suédoise, qu’il a repris à sa façon, et j’ai été tellement touchée par ce morceau. Ça m’a ouvert de nouvelles portes, sur un monde musical que je ne connaissais pas. Pour le deuxième album, je choisis Like an Old Fashion Waltz, de Sandy Denny, et j’ai toujours été fascinée par sa fin tragique: elle est tombée dans les escaliers, s’est brisée le cou et elle est morte. Et quand j’étais petite mon père me disait toujours de ne pas courir dans les escaliers, en me disant qu’il pouvait m’arriver la même chose que Sandy Denny. Sauf qu’à l’époque, on ne me disait pas qu’elle était également alcoolique et prenait de l’héroïne, et que c’était évidemment lié!

Merci beaucoup pour cette interview Klara!

Merci, la prochaine fois je viendrais avec des exemples d’albums plus rock, promis (rires)!

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