Devin Townsend (+ Haken), La Salle Pleyel (15.11.2019)

Sorti en début d’année, Empath, le nouvel opus de Devin Townsend, aura été l’une des sorties marquantes de 2019. D’une part car cet album donne l’occasion au génie canadien de naviguer une nouvelle fois en solo, libéré des carcans artistiques qu’il s’était imposé au sein du Devin Townsend Project, mais également en raison des qualités intrinsèques de l'opus et de sa créativité débordante. L’événement que constituait un concert de Devin Townsend à la Salle Pleyel, qui plus est en compagnie d’Haken, était un moment que nous ne pouvions décemment pas louper.

 

Haken

La salle est déjà bien remplie au moment où les Britanniques d’Haken posent les pieds sur les planches. Avec l’excellent Vector sorti l’an dernier, le sextette a continué son ascension vers les cimes du metal progressif, s’imposant comme un incontournable de cette génération de musiciens. C’est donc logiquement que Richard Henshall et ses compères mettent en avant ce dernier album avec l’excellent « Puzzle Box ». Le son est excellent, ce qui n’est pas négligeable vu la densité des compositions du combo anglais. Tout le monde est en place et Ross Jennings va au-devant du public, prenant son rôle de leader à cœur. Si l’on aurait souhaité entendre les mélodies joyeuses et doucereusement pop de « The Good Doctor », celles d’« A Cell Divides » font bien évidemment plaisir à redécouvrir.

Haken, live, metal, prog

L’ambiance semble retomber un peu avec « Earthrise », probablement en raison de la grande concentration dont font preuve les musiciens pour interpréter ce titre. Mais ce qui frappe les spectateurs, outre l’aisance avec laquelle Charlie Griffith et Richard Henshall, les deux guitaristes, enchaînent riffs et soli sur « Nil By Mouth », c’est la grande mélodicité des thèmes et des compositions qui ne tombent pas dans la surenchère technique. Pourtant instrumental, ce dernier titre ne suscite absolument pas l’ennui en live.
 


Le sextette parvient même à faire bouger les progueux les plus endurcis sur le très dansant et groovy « Cockroach King » et son introduction en canon. Malheureusement seul extrait de The Mountain, ce titre est d’ores et déjà un classique du groupe et un incontournable en concert, prouvant que si les musiciens sont des virtuoses dans leurs instruments respectifs, ils ne savent pas moins chanter avec justesse.

Une bonne dose de fun accompagne « 1985 », notamment lorsque Jennings porte ses lunettes lumineuses kitsch, tout droit issues de la décennie évoquée dans le titre de la chanson. Une belle conclusion de set, qui aura toutefois semblé trop court et une première partie réussie pour le sextette anglais.

Setlist Haken

Puzzle Box
A Cell Divides
Earthrise
Nil By Mouth
Cockroach King
1985

 


Devin Townsend

Lors des interviews récemment données en promotion d’Empath, Devin Townsend s’était particulièrement étendu sur sa volonté de proposer des sets plus spontanés, en partie improvisés à la manière du jazz. Et si le début du set délaisse cet aspect des choses avec une interprétation tout à fait classique de « Borderlands » et « Evermore », une belle dose de fun accompagne la montée sur les planches de Devin et ses sbires.

Tout le monde est en chemise hawaïenne, le clavier de Diego Tejeida (Haken) est transformé en bar à cocktail et tout est fait pour faire oublier l’ambiance pluvieuse de ce mois de novembre, à commencer par une sublime licorne multicolore gonflable ! Des palmiers et une plage de sable blanc sont projetés sur l’écran qui sert de backdrop avant que Devin nous souhaite de bonnes vacances.

Tout au long de la soirée, le maître de cérémonie sera particulièrement bavard, et son large sourire rapidement contagieux. Une bienveillance naturelle semble émaner du personnage (« rappelez-vous, la seule chose importante au monde, c’est votre famille et vos amis! » nous confie-t-il durant la soirée) en plus d’un talent insolent derrière le micro.

La première surprise de ce set intervient lorsque le groupe tout entier se lance dans l’interprétation de quatre titres de Ki à la suite. Si cet opus n’est pas le plus facile d’accès du Devin Townsend Project, il faut reconnaître qu’en live ces morceaux prennent une autre dimension, sublimés par la voix de Ché Aimée Dorval (accompagnée de trois choristes) et notamment par les joutes de guitare improvisées entre Michael Kennely et Devin, tout juste réhaussées des subtiles parties de warr guitar du discret Markus Reuter (Crimson ProjeKCt). De même, le très jeune bassiste, Nathan Navarro montre que le talent n’est pas relatif à l’âge et fait preuve d’un groove insolent sur son instrument. Ces quatre titres permettent ainsi de redécouvrir cette œuvre sous-estimée du Canadien, et offrent enfin la promesse des jams instrumentales en live (que l’on aurait tout de même souhaitées plus aventureuses).

Mais le véritable temps fort de ce set, c’est bien l’enchaînement « Deadhead » / « Why ? » qui mettent en avant la palette vocale de Devin Townsend. « Deadhead » est particulièrement prenant et émotionnel, tandis que « Why ? » (sur lequel Devin enfile une robe noire et parvient malgré cela à garder son sérieux) dévoile une autre facette de la personnalité de l’ex-leader de Strapping Young Lad. Après un « Genesis » qui se révèle l’un des morceaux les plus solides d’Empath en live (et un bon résumé de l’univers de Devin Townsend), le temps du rappel arrive déjà.

Et la dose de fun distillée par le combo ne va pas s’amoindrir avec un « Disco Inferno » particulièrement funky, pendant lequel Diego Tejeida oscille entre soli de keytar et distribution de cocktails aux musiciens, dans une ambiance joyeusement déconnante mais toujours carrée musicalement. Des risques, Devin aime en prendre. Il nous l’a prouvé ce soir, mais enfonce le clou avec une interprétation acoustique de « Spirit Will Collide », accompagné du trio de choristes et de Ché Aimée Dorval, décidément pièce maîtresse de cette nouvelle formation live.

Le set s’achève après un « Kingdom » plus classique. Devin Townsend et ses musiciens auront mis tout le monde d’accord ce soir et si nous attendions initialement plus de surprise et d’improvisation par rapport à ce qu’avait annoncé le génie canadien, la folie et le fun sont toujours aussi présents dans ses prestations live.

Devin Townsend est définitivement un grand artiste, et quelle que soit la formule choisie pour célébrer son œuvre, le grand gagnant est toujours le public présent.

Setlist Devin Townsend

Borderlands
Evermore
War
Sprite
Coast
Gato
Heaven Send
Ain’t Never Gonna Win
Deadhead
Why?
Lucky Animals
Castaway
Genesis

Disco Inferno (The Trammps cover)
Spirit Will Collide (acoustique)
Kingdom

Un grand merci à Roger Wessier et Base Production
Photographies : © Marjorie Coulin 2019
Toute reproduction interdite sans autorisation du photographe

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