Manuel Munoz, leader de The Old Dead Tree

C'est dans la chaleur réconfortante d'un café parisien que nous retrouvons Manuel Munoz, quelques semaines avant la sortie de l'ultime EP de The Old Dead Tree, pour évoquer ces adieux, le contenu musical de cette nouvelle mouture, ainsi que reparcourir ensemble la carrière du groupe français.

Salut Manuel et merci d’avoir trouvé du temps pour me répondre. Tu vas bien ?

Ça va très bien et toi ?”¨”¨

Très bien aussi, merci ! Le dernier EP de The Old Dead Tree sort le 6 décembre, accompagné d’un documentaire. Comment le groupe vit cette période d’agitation après des mois loin du devant de la scène ?

C’est beaucoup moi qui m’agite, en fait ! (rires) Comme tu le sais peut-être, la plupart des membres du groupe vivent aujourd’hui loin de Paris, donc le fait de nous réunir est très compliqué. On a aussi pratiquement tous des enfants, certains en ont trois… ça fait beaucoup d’investissement personnel vis-à-vis de tout ça. C’est donc moi qui centralise tout ça et répond à toutes les interviews pour l’instant, même si je reçois de l’aide de Gilles notamment. Sinon on est toujours heureux de se retrouver et de jouer cette musique-là, c’est le principal.

Vous vous retrouvez donc encore pour jouer ensemble de temps en temps ?

Oui oui, bien sûr !

Quel est la réaction des fans que tu attends pour la sortie de cet EP ?

J’attends pas grand chose, j’espère déjà que ça va leur plaire. Après, il n’y a pas d’attente à avoir vis-à-vis des gens. Les gens ont des attentes vis-à-vis de nous, mais on ne peut pas inverser les rôles. Je serai déçu si les gens n’apprécient pas ce qu’on a fait, mais je ne serai pas déçu par les gens.

the old dead tree, Manuel Munoz, Florent wallon, live, concert, the end

Personnellement, voilà comment j’ai vécu l’écoute de l’EP. D’un côté je me suis senti immédiatement comme à la maison : je me suis revu il y a 12 ans en train d’écouter The Water Fields le jour de sa sortie assis sur mon lit, en particulier quand ton chant commence. Et aux dernières notes de ce nouveau disque, j’étais rempli d’un mélange contradictoire de sentiments. D’un côté, beaucoup de satisfaction d’avoir enfin posé l’oreille sur de nouveaux morceaux du groupe et que ces morceaux soient une réussite. Et de l’autre, beaucoup de déception en me disant que ça y est, c’était ma dernière première écoute de TODT.

Déjà en soi, c’est déjà bien de partir en laissant des regrets (rires). C’est bien mieux que de laisser les gens penser qu’on a fait l’album de trop. Ensuite, je pense qu’il y a aussi une frustration de notre part de pas pouvoir continuer, de pas pouvoir continuer à ce rythme-là, de pas pouvoir être en mesure de s’investir suffisamment pour créer une musique qui corresponde à nos attentes. Parce que pour le coup, on a beaucoup d’attentes à ce niveau-là, et ça demande énormément de travail et d’investissement, et on n’est plus en mesure de le faire aujourd’hui comme on pouvait le faire avant. Donc plutôt que d’essayer de surfer sur une nostalgie et sur l’attente des gens en offrant une musique qui ne serait pas à la hauteur, on préfère s’abstenir. Il faut qu’on soit contents de nous quand même. On a entre guillemets eu la malchance, et aujourd’hui je le vois plutôt comme une chance, de jamais avoir pu vivre de notre musique, et du coup on n’a jamais été pris en otage par la nécessité de réussir financièrement, de correspondre aux attentes du public. Donc on ne fait de la musique que parce qu’on a envie de la faire. Et du coup on ne fait que la musique qu’on a envie de faire. En soi, le fait de ne pas gagner d’argent avec la musique c’est catastrophique parce qu’on finit par s’arrêter, on a tous un travail à côté et on a absolument pas le temps de créer des chansons comme on pouvait le faire avant. Et en même temps, on a cette liberté artistique que peuvent ne pas avoir les groupes qui vivent de leur musique.

Ça vous affranchit des contraintes artistiques.

Voilà. Je vois beaucoup de groupes aujourd’hui qui sont obligés de tourner même si ils n’ont pas envie. Par exemple j’aime beaucoup Paradise Lost depuis toujours, et clairement le chanteur j’ai pas l’impression qu’il prenne beaucoup de plaisir sur scène.”¨”¨

Et c’est encore pire depuis que les ventes de CD ne rapportent presque plus rien…

Exactement. Et ils sont tenus de sortir un album tous les deux ans, qui colle à peu près à ce qu’attendent les fans – et encore seulement ceux qui continuent à acheter du disque, pas les jeunes donc. J’envie leur carrière, parce qu’ils ont sortis des albums incroyables, mais je suis pas sûr d’envier leur situation.

Les textes de l’EP semblent presque s’adresser directement aux fans pour leur expliquer les raisons de la fin du groupe et mettre les choses au clair. D’abord en s’excusant de cette fin avec le titre « Sorry », puis en parlant des différentes raisons (« Kids » et « Raise »). Et enfin, en baissant le rideau via « The End… Again », qui résume l’histoire et les drames de votre carrière, un peu comme un dernier hommage. C’était l’intention, et pourquoi cette approche ?

C’est amusant, parce qu’effectivement on peut le voir comme ça, mais ce n’était pas du tout mon approche lors de l’écriture. Comme d’habitude, j’ai écrit sur moi. Je suis en général assez autocentré quand j’écris. Donc soit c’est basé sur des sentiments que j’ai ou que j’ai eus, soit c’est basé sur l’analyse d’une personne de mon entourage, ou au moins d’une partie de sa personnalité. Mais en l’occurrence, « Sorry » s’adresse plus à tous les gens qui voulaient que je continue à faire de la musique. Après le split du groupe, pour les gens c’était inconcevable que j’arrête de jouer de la guitare et de chanter, alors que pour moi c’était l’inverse, c’était inconcevable de continuer après avoir pris une telle claque. Finalement, il y avait tellement de gens qui m’en parlaient que c’était pire, je me mettais la pression en me disant que le jour où je ressortirai un truc il allait falloir assurer. C’était vraiment dur ! Après « Raise », je l’ai jamais écrit pour expliquer quoi que ce soit aux gens que je ne connais pas, mais effectivement ça peut être perdu comme ça. « Kids » en revanche est un texte un peu plus léger, qui parle du fait d’être père, du fait d’avoir des enfants qui sont horriblement casse-pieds, mais on pourrait pas faire sans (rires). C’est peut-être plus « The End… Again » qui a plus ce côté testament, et c’est pour ça que j’ai tenu à ce que ce soit ce titre-là qui fasse l’objet d’une lyric video, parce que pour moi les paroles venaient vraiment balayer l’histoire du groupe comme tu le disais, et mettre un point à la fin. Pour moi c’est vraiment une conclusion.

the old dead tree, Manuel Munoz, Florent wallon, live, concert, the end

L’un des textes reste assez obscur pour moi, il s’agit de “Someone Should Know (The Truth)”. Tu peux m’en dire un peu plus sur ce qui se cache derrière, et sur le secret inavouable qui y est évoqué ?

C’est un secret ! (rires) Non, absolument pas ! En l’occurrence, c’est parti des toutes dernières lignes de chant en fait… quand il y a la guitare sèche qui est toute seule et que je me mets à chanter [il chante] « someone should know the truth ». En fait, je compose toujours la musique d’abord, ou alors juste une ligne de chant isolée, sur laquelle je construis le morceau avant de remplir les cases. Et celle-là, en gratouillant, c’est vraiment le truc qui m’est venu. « Someone should know the truth about you and I ». Et après j’ai brodé tout le reste du texte par rapport à ça, en gardant l’idée de ne jamais révéler l’idée de ce que c’était ce secret. Dire simplement qu’il y a un terrible secret, mais est-ce que c’est une relation amoureuse, est-ce que c’est un meurtre… peu importe ! Mais il y a deux personnes qui ont fait quelque chose qu’elles n’auraient pas dû faire, et ça va se savoir. Mais là pour le coup, c’est un des rares textes qui n’est pas basé sur moi.

Ou alors il y a vraiment un secret dont tu ne veux pas me parler.

C’est possible…

Je vais m’arrêter là, je ne veux pas t’attirer de problèmes (rires) ! Les différents morceaux ont tous été écrits en 1999, et…

Alors, il y a une boulette ! (rires) J’ai demandé à Season of Mist de le corriger le jour de la sortie, mais a priori on s’est mal compris… Il y a « The End… Again » qui a été composé en 1999. C’est en fait le tout dernier titre qu’on a travaillé avec Frédéric avant qu’il ne se tue. C’était un samedi, on avait passé une répétition géniale, elle était tellement bien qu’on l’a rallongée d’une heure, je suis parti acheter une cassette pour pouvoir enregistrer ce qu’on avait trouvé, car c’était la répétition où on a construit ce morceau. Et le lundi, Frédéric s’est tué. Et pendant la répétition, il savait. Il avait déjà préparé sa sortie. Et si tu veux, après ça, on a jamais retouché ce morceau, c’était pas possible. C’est d’autant plus rageant que c’est le seul morceau que Vincent ait composé au départ… Et puis en 2013 on a fait la tournée des 10 ans de Nameless Disease. A la sortie de la tournée, qui s’était très très bien passée humainement, on s’est dit que ce serait bien pour terminer l’histoire, de reprendre les morceaux inachevés. En tous cas ceux dont on estimait la qualité. Il en restait quatre de 2008, qui auraient dû figurer sur un quatrième album, et qui sont donc les quatre premiers titres de l’EP. Pour la petite histoire, et c’est la chose un peu étonnante, on a enregistré ces cinq titres en 2014. Ce que tu as écouté, ça a été enregistré il y a cinq ans.

Rien n’a été ré-enregistré depuis.

Non. En 2013, on s’est mis d’accord là-dessus. Moi j’ai repris tous les morceaux et les maquettes qu’on avait, je les ai retravaillés. J’ai envoyé ça à mes camarades pour qu’ils valident, et qu’ils fassent quelques modifications. On a avancé là-dessus et on a essayé de se voir au maximum. Et ensuite, en 2014 on a tout enregistré. Et alors que tout était terminé, que Season of Mist, après avoir écouté, nous avait dit « Super, on prend ! Ça nous intéresse. »

Oui, l’annonce originelle, c’était dans ces eaux-là, en 2015 je crois.

Oui, c’est ça. Et à ce moment-là, il y a Julien Metternich, qui a suivi le groupe depuis quasiment ses débuts et a filmé tous les clips du groupe… il est venu me voir en me disant « Je voudrais réaliser un documentaire qui parle de la vie d’un groupe semi-professionnel ». Pour expliquer la vie d’un groupe semi-professionnel qui ne gagne pas d’argent, ou beaucoup moins que les groupes pro, mais qui doit sur la scène d’un festival avoir l’air aussi pro que les autres. Et donc toutes les techniques et bouts de ficelles qui vont être utilisés, comment on va combler le manque d’argent par un investissement de temps pour tout faire soi-même, pour essayer d’avoir l’air aussi pro que les autres. Il me dit donc « J’ai des centaines d’heures de The Old Dead Tree, en studio, dans le bus, en répète, et j’aimerais utiliser tout ça pour raconter votre histoire. Ça fera 30-40 minutes ». Et moi je me dis qu’avec une telle durée, aucun label n’acceptera de le sortir en DVD.

Ça peut pas se commercialiser sous ce format, il faudrait l’ajouter à un produit existant.

Exactement. Sinon ça allait terminer sur YouTube avec quelques milliers de vues, et ça aurait pas été très intéressant. Et connaissant Julien, je sais qu’il fait toujours un travail extrêmement léché, et donc on n’a pas participé à la conception. C’est Julien qui a eu carte blanche, moi j’ai aidé à la logistique quand il a fallu contacter tout le monde pour réaliser les interviews. J’étais pas présent aux interviews, donc j’étais pas là pour entendre ce qui se disait ou ce qui ne se disait pas, et je n’ai pas participé au montage non plus. Du coup, ça donne un regard extérieur sur ce qu’était ce groupe. Enfin semi-extérieur, parce que Julien est quand même un ami, mais il n’a pas non plus le regard que moi j’aurais pu avoir, et il a quand même réussi à obtenir de tous les membres des témoignages vraiment sincères.

the old dead tree, Manuel Munoz, regis Peylet, live, concert, the end

Comment s’est passé le premier visionnage, vous l’avez découvert tous ensemble ?

Alors ça commence à dater le premier visionnage, parce que le documentaire a évolué, mais oui on l’a regardé tous ensemble. Tous les membres du groupe qui pouvaient être dispo à ce moment-là étaient là. Je sais qu’ensuite Julien a fait un long pèlerinage où il est allé voir tous les membres de l’équipe technique. Enfin on a été quelques-uns à verser une petite larme en le voyant quand-même. C’est simple, moi, à chaque fois que je le regarde, j’ai l’impression d’être mort (rires).

Pour revenir à la motivation à l’origine de ce documentaire, c’était donc vraiment de montrer les dessous d’un groupe semi-pro et toutes les difficultés que ça implique. C’est vraiment un élément prédominant qui m’a frappé pendant le visionnage, et je me demandais justement pourquoi, même si c’est évidemment un facteur clé dans la fin du groupe…

Oui c’était l’intention de base, et de toute façon, sans ce truc-là, le groupe aurait pu continuer. Parce que si tu passes pas 80% de ton temps à faire autre chose que de la musique, tu peux faire que de la musique. C’est sympa, la musique, c’est pas un problème (rires) !

C’est vrai que c’est assez inhabituel comme angle d’attaque pour un documentaire, d’habitude on ne voit que le bon côté des choses…

Exactement, et c’est pour ça que je suis content que ça ne soit pas le groupe qui l’ait fait. On n’a pas cherché à donner une image commercialement bankable du groupe, ou de réussite. Ça parle des échecs, ça parle des erreurs, ça parle de tout ça. Je pense que c’est bien que les gens voient ça aussi.

Si je reviens sur le sujet du morceau « The End… Again », comment a-t-il été retravaillé et adapté ?

C’est celui-qui était le moins abouti effectivement. J’ai repris la base et j’ai fait une proposition à mes collègues. Y avait qu’un seul solo, donc j’en ai composé un second, j’ai enlevé un riff… qui était un riff qu’on a composé quand on avait 21 ans, donc il était maintenant un peu hors de propos va-t-on dire (rires). J’ai un peu nettoyé le truc. Et puis ensuite je me suis retrouvé avec un vrai problème, c’est que sur le papier j’avais la chance d’avoir deux bassistes : Vincent Danhier qui est le bassiste originel du groupe, et Gilles Moinet, qui est guitariste mais joue aussi de la basse. Mais au moment de travailler tout ça, aucun des deux n’a pu se libérer assez. J’ai donc dû écrire la basse en entier. D’habitude j’écris des ébauches et le bassiste affine avec le batteur, mais là il a fallu faire exactement l’inverse. Donc j’ai demandé à Raphaël de me donner ses parties de batterie, et à partir de là, j’ai brodé la basse et j’ai confié l’enregistrement à Brice Guillon, le bassiste de Melted Space, qui s’en est chargé avec brio. Mais sur le coup, il a donc aussi fallu que je travaille ça.

Si tu regardes en arrière, comment vois-tu l’aventure The Old Dead Tree, maintenant qu’elle est quasiment close ?

En fait c’est… c’est le passage à l’âge adulte !

Ça aura mis presque vingt ans alors (rires) !

Oui ! Mais The Old Dead Tree ça aura été toute ma vie entre mes 19 et 32 ans. J’ai énormément appris pendant, j’ai appris sur moi et sur les autres et quand ça s’est arrêté j’ai dû me reconstruire et aussi comprendre comment je fonctionnais. C’était une expérience de vie incroyable. Et à titre personnel, cette aventure aurait pu se terminer avec beaucoup de colère et d’aigreur. Et finalement, on a tous su passer outre ce qui nous séparait pour se concentrer sur ce qui nous reliait, en quelque sorte. Et aujourd’hui on est toujours amis, par exemple j’ai passé mes vacances en famille avec Nicolas cet été, je vois Gilles très souvent, on a créé des liens, on essaie de les garder. Après la vie, c’est la vie, on n’a pas les mêmes liens avec tous les membres. Globalement ça a été une chance inouïe. Et créer une musique qui parle aux gens, c’est incroyable.

Justement, The Old Dead Tree a toujours eu une place à part sur la scène metal, avec un son et d’une ambiance qui lui sont propres. Comment expliques-tu cela ?

Je pense qu’on est des génies (rires) ! Non, honnêtement, je sais pas du tout. Ce que je sais, c’est que dès le départ du groupe… Vincent c’était un gros fan d’Anathema, et Nicolas de Paradise Lost, et moi j’aimais beaucoup les deux, mais quand l’un des deux ramenait un riff ou une idée qui pour moi semblait trop proche de ces inspirations, je disais non. Soit on l’arrange autrement, soit on la garde pas, c’est pas possible. Et donc dès le début, par rapport aux autres groupes de notre âge, j’ai essayé de dégager tout ce qui pouvait rappelait un peu trop nos influences. Et puis ensuite, une fois qu’on a digéré entre guillemets ces influences venant du metal gothique, comme on l’appelait à l’époque, il a fallu faire rentrer des influences qui venaient d’ailleurs. Jeff Buckley, du Pink Floyd, Nicolas absolu c’est un fan des Beatles, et c’est des choses qui vont venir transpirer dans la musique petit à petit…

Oui, dans les harmonies pour les Beatles par exemple.

Exactement, et la fin des années 90 et le début des années 2000, je trouve que c’est vraiment un moment charnière, où les différentes chapelles du metal vont commencer à se mélanger. Et on commence tout juste à avoir l’arrivée de chanteurs qui font des voix death, du chant hurlé et du chant clair. Et moi je trouvais ça génial, le fait de mélanger tout ça. Et ça nous a beaucoup aidés. J’écoutais aussi du neo metal à l’époque, et plein de trucs. Quand tu faisais du metal extrême « européen », faire entre du Rage Against The Machine ou du KoRn dans tes influences, c’était pas possible, c’était un blasphème. Donc je pense que l’idée ça a été d’essayer d’avoir des influences diverses, mais qu’elles ne soient jamais trop claires. Comme ça on peut passer d’un riff très jumpy à un passage très triste, à un arpège plus pop, à une guitare classique… et l’idée pour moi ça a été de faire un truc hyper varié, tout le temps, parce que j’aime pas m’ennuyer quand j’écoute de la musique.

Il y a aussi quelqu’un dans le documentaire qui dit « on n’est pas de très bons musiciens ». Est-ce que tu penses que ça vous a aidés à vous focaliser sur la mélodie et la musique plus que sur les aspects techniques pendant la composition ?

Ah sûrement. On jouait très souvent sur scène avec des groupes qui enchaînaient les notes à 10 000 à l’heure, et nous on savait qu’on n’y arriverait jamais. Alors on n’est pas de très bons musiciens, à part Vincent qui a fait le conservatoire. On avait Franck qui était un autodidacte avec un très bon niveau… en fait on a eu la chance d’avoir de très bons batteurs, qui étaient techniquement bons sans forcément avoir un bagage théorique fort. Donc on s’est beaucoup appuyés sur eux pour jouer beaucoup de coups en même temps. Mais c’est vrai que Nicolas et moi on était souvent à la recherche de mélodies épurées. Peut-être que tu as raison et que ça vient d’une limite technique, tu peux pas jouer mille notes, tu peux en jouer que cinq ou six…

Et du coup tu vas chercher les bonnes.

C’est ça.

Et si tu pouvais a posteriori changer quelque chose, une décision ou un choix dans l’histoire du groupe… Quelque chose te viendrait en tête ?

Aujourd’hui je te dirais non, parce que te dire oui, ça veut dire repartir en arrière tout le temps. C’est ce que j’ai fait à la fin du groupe, à me demander à quel moment j’ai raté le coche. A quel moment j’aurais dû dire « tel membre il nous retient », et tant pis, le lien d’amitié c’est une chose mais le groupe passe au-delà… Déjà, j’ai beaucoup fait passer le groupe devant nos liens d’amitié, c’était très compliqué, mais c’est vrai qu’on a jamais eu ce côté d’entreprise, entre guillemets, que peuvent avoir beaucoup de groupes américains en particulier. Voilà, tu remplis plus la fiche de poste, donc faut que tu t’en ailles, on va trouver quelqu’un d’autre. Nous, on a toujours cherché à faire avec les gens qu’on avait, avec leurs faiblesses et leurs qualités. Et puis comme pour nos faiblesses techniques, une faiblesse ça peut devenir des fois une qualité. Mais bref, on pourrait refaire le match dix fois, on a fait ce qu’on pouvait, et finalement, c’était pas si mal !

Tu ne crois pas qu’il y a aussi une question d’époque ? Quand vous avez sorti vos premiers albums, on était dans une mouvance qui simplifiait les structures et cherchait des sons plus directs, et ce que vous proposiez était peut-être trop compliqué par rapport à ce que recherchait le public ?

Je sais pas. Pour le coup, je saurais pas dire, parce que tu avais Opeth… tu vois le Blackwater Park, il sort juste avant The Nameless Disease, et Opeth c’est quand même plus compliqué musicalement. Après ils avaient un côté très technique qui était très impressionnant qui jouait, c’était un vrai atout chez eux, que nous on n’avait pas. Je pense plutôt que parfois, la réussite d’un groupe, ça tient à une rencontre, par exemple d’un type influent qui va le faire exploser. Nous on l’a pas eu, mais se dire que c’est pas ta faute en même temps, c’est toujours facile… Il y a beaucoup trop de facteurs, et c’est pas faute de les avoir ressassés. Et c’est marrant, mais quand on a commencé, j’étais persuadé qu’on était vraiment exceptionnels.

Il faut si tu veux réussir !

Oui, mais en même temps je me sentais pas à un super niveau. Et je fais quand même malheureusement beaucoup d’erreurs en guitare, donc… C’est le fait de chanter et jouer en même temps je crois. Tiens ! Si je devais refaire quelque chose, je poserais la guitare. Mais en fait j’avais tellement peur de jouer sans guitare, de me sentir tout nu, de pas savoir quoi faire avec mes bras. Mais maintenant j’ai appris en jouant dans Melted Space et dans Arkan, et au final je me dis que c’est ce que j’aurais dû faire. J’aurais dû prendre quelqu’un et ne faire que ça. Je sais pas si ça aurait changé la donne (rires) !

2020 semble être l’année des reformation, donc qu’est-ce qui selon toi pourrait faire qu’on revoit un jour The Old Dead Tree ensemble sur scène ? Un one shot sous le nom We Cry As One ?

Alors l’option 1, c’est si l’un de nous gagne au loto, alors ça pourra se faire. Mais c’est pas gagné. Sinon sous le nom We Cry As One, c’est possible, parce que quand on joue sous ce nom, on met la barre un peu moins haut, et on s’embête moins pour remonter toute l’équipe technique ou pour préparer un spectacle entier, parce que c’est très long de préparer tout ça. Donc sous le nom We Cry As One ça a plus un côté bœuf entre copains, on se réunit, on fait une ou deux répètes avant et c’est parti. Donc ça, c’est possible, d’autant qu’on continue à se voir pour jouer ensemble une ou deux fois par an pas loin d’ici au Luna Rossa. On se fait quatre ou cinq heures de répète, un gros resto derrière avec l’équipe technique, et on se marre bien ! Mais sous le nom The Old Dead Tree, c’est plus compliqué. Après, moi je fais plus de promesses. Si on m’avait dit il y a douze ans que je serais en train de répondre à tes questions (rires).

Vous organisez donc une release party le 4 décembre, avec un showcase. Tu peux déjà nous en dire plus sur le contenu ?

Alors c’est en train d’être fixé, mais on est très embêtés à cause de la grève SNCF qui démarre le lendemain, et empêcher tous mes comparses de province de se joindre à moi… Donc je vais jouer de la guitare, et je serai accompagné par Nicolas Cornolo, qui est guitariste de Dust Bowl, avec qui j’ai un autre projet musical qui n’a rien à voir avec le metal et qui s’appelle Nuit Carmin, en français. Et on va aussi faire un concert en avril sous le nom The Old Dead Tree, on va jouer à Paris à Petit Bain. Et cette fois je vais poser le guitare et la laisser à Nicolas Cornolo, qui va venir jouer mes parties. Et donc pour le showcase il va venir m’épauler, on jouera 25 minutes. Pour l’instant, je sais pas si on peut trop dévoiler la setlist, mais il y aura un nouveau morceau et beaucoup d’anciens. Parce que tous les titres ne peuvent pas s’adapter à l’acoustique non plus, il faut que ça rende.

Quelles sont tes autres actus dans tes autres projets, par exemple avec Arkan ? Tu parlais aussi d’un nouveau projet en français.

Alors oui, on a un projet pop-rock en français qui devrait sortir l’année prochaine. Un premier EP, enregistré chez François Maxime Boutault, comme celui-ci. Et aussi Arkan, avec qui on va sortir un album qu’on a déjà enregistré chez Fredrik Nordström. Il est enregistré, tout beau, tout propre, on en est super contents.

Il y a un thème à l’album, comme sur Kelem ?

Alors dans Arkan, je suis pas leader, donc je suis pas sûr d’avoir le droit de dévoiler tout ça.

On va pas t’attirer de problèmes en plus de ceux sur ton secret de tout à l’heure alors (rires) !

Mais oui, il y a un thème à l’album !

La dernière fois qu’on avait discuté, tu m’avais dit ne pas avoir écouté grand chose à part tes projets musicaux. Tu as pu jeter une oreille à des choses sympas dernièrement ?

Alors j’aime beaucoup Leprous, je trouve que c’est vraiment un groupe qui amène quelque chose de frais, de nouveau. Et en même temps, c’est drôle parce c’est frais et ça l’est pas complètement, il a une voix incroyable mais ancrée dans les années 80. Ce qui n’est pas normalement sur le papier pour me plaire, mais il en fait quelque chose d’incroyable. Je suis allé les voir en concert et c’est vraiment un groupe à voir ! J’aime beaucoup dans un autre domaine un artiste folk américain qui s’appelle Father John Misty. C’est un peu influencé Beatles, avec des textes supers, et je suis un fan absolu. Sinon on suit les copains ! Il y a Monolithe qui sort son nouvel album, et qui sonne super bien, et puis aussi Penumbra qui se reforme, ils ont enregistré un truc et font un concert bientôt. Comme il y a Raphaël dedans, je vais évidemment y aller pour le soutenir !

Un dernier mot pour la Grosse Radio Metal ?

Bah écoute, on espère vous voir nombreux au concert du 11 avril, sachant que comme a priori ça sera la seule date, ce sera un concert de deux heures. On est pas du tout sûrs de pouvoir faire une tournée et de repartir sur la route comme on l’a fait en 2013, donc pour l’instant c’est le seul truc calé, ne le ratez pas !

La Grosse Radio Metal remerci Manuel Munoz, ainsi qu'Elodie de HIM Media ! 

Photographies : © Florent Wallon & Régis Peylet
Toute reproduction interdite sans autorisation du photographe

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