Svalbard – When I Die, Will I Get Better ?

Malgré un excellent It’s Hard To Have Hope sorti en 2018, Svalbard est un groupe qui n’a pas eu le succès qu’il méritait. Il faut dire que dans la prolifération de la scène hardcore britannique, se faire une place n’est point évident. Et pourtant, les choses pourraient changer avec When I Die, Will I Get Better ?, troisième album du quatuor de Bristol qui semble désormais être arrivé à maturité.

Pour les chanceux qui ont jeté leur dévolu sur ses deux excellents premiers albums, Svalbard s’est fait connaître avec un hardcore hargneux et en verve, dénonçant le virilisme et la violence de notre société, et plus particulièrement des hommes. Pour ne rien vous cacher, rien ne diffèrera à ce niveau sur ce nouveau disque. Les paroles de Serena Cherry sont tout autant importantes que la musique et donneraient bien à faire réfléchir pas mal de gens aujourd’hui.

Le changement le plus probant est donc musical, avec des pistes certes moins agressives, mais beaucoup plus à fleur de peau. Les sentiments s’écoulent sur des riffs, et des mélodies qui n’ont rien à envier à de nombreux groupes de screamo. Dès les premières notes d’"Open Wound", on ne peut s’empêcher de penser à envy, ou Raein, dans la manière d’étirer les riffs, de briser les rythmes et de caresser ces cassures pour faire monter la pression... Avant de faire hurler les instruments et la voix dans des moments résonnants comme délivrances.

Malgré ses évolutions, Svalbard reste quand même attaché à ses origines. Les rythmiques de "Click Bait", les accélérations et le chant masculin de "Silent Restraint" en font des morceaux d’une efficacité redoutable pour le live. "Throw Your Heart Away" en appelle quant à elle à une lourdeur foncièrement post hardcore, un profond désespoir traversant ces quatre minutes violentes émotionnellement.

Mais pourtant, on ne peut nier que cette mue emmène Svalbard vers de nouveaux horizons. Les riffs de Liam Phelan et Serena Cherry, en prenant le temps de se construire dans la composition, gagnent en intensité. Et le tout est soutenu tant par une base rythmique admirable que par une production parfaite. La basse d’Alex Heffernan donne énormément de profondeur aux morceaux et complète le jeu versatile du batteur Mark Lilley, alternant avec brio groove, lourdeur et frénésie quasi punk.
 


Il résulte de cette complicité une véritable symbiose, tant dans le propos que dans la musique. Chaque cri, chaque spoken word est un coup de poignard en plein cœur. On ressent réellement à quel point cette musique est composée comme un exutoire pour le groupe, tant les paroles de Serena Cherry servent parfaitement les émotions posées sur les notes.

"What Was She Wearing" est à ce titre l'un des titres les plus dévastateurs de l’album. En hurlant “Showing flesh does not deserve shaming, showing flesh does not warrant blaming”, la chanteuse rugit ici, comme sur le reste des huits pistes, sa liberté et celle des femmes d’être elles-mêmes. Malgré les coups, malgré la violence subie, on sent la force de se dépasser, de se libérer autant que de faire changer les choses au-travers de ces paroles. 

Comment ne pas considérer qu’un tel album, dont la forme et le propos ne forment qu’une seule entité, est nécessaire en 2020 ? Comment ne pas traiter avec justesse et saisir le geste du groupe, qui a quitté son précédent label Holy Roar Records, devant à la base sortir When I Die, Will I Get Better?, suite à de violentes accusations d’agression sexuelle à l’encontre de son fondateur ? À une époque où chaque acte d’une femme est jugé, critiqué, insulté, comment ne pas comprendre ce qui amène à un tel résultat ? Celui-ci se termine pourtant sur une note quasi positive avec "Pearlescent", dont le final semble dessiner un espoir aux paisibles lignes mélodiques.
 


When I die, Will I Get Better? est un disque lumineux, irradiant, qui vous happe et vous entoure de misère et de douceur. En calmant le tempo et en amenant toujours plus son hardcore originel vers le screamo, Svalbard rend son art encore plus puissant. Chacune des huit pistes de cet album est un coup de poing d’émotion et de violence. Les quatre musiciens plongent en pleine introspection et tirent le meilleur de toute cette crasse et cette puanteur bien trop actuelles qui finissent par pourrir tout ce qu’elles touchent. Bien plus qu’un brulot féministe, bien plus qu’un grand album de screamo ou de  hardcore, Svalbard vient de livrer tant son cœur que son chef d'oeuvre avec ces quelques quarante minutes bouleversantes, absolument nécessaires en cette triste période.

Svalbard When I Die, Will I Get better? sortie le 25 septembre 2020 chez Church Road Records

Tracklist :
Open Wound
Click Bait
Throw Your Heart Away
Listen To Someone
Silent Restraint
What Wqs She Wearing ?
The Currency Of Beauty
Pearlescent

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NOTE DE L'AUTEUR : 10 / 10



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