No Logo – Fraisans – 12/14.08.16

No Logo : la tyrannie des marques, tel est le titre de l'ouvrage de Naomi Klein, paru en 2000, qui décrivait la manière dont la publicité avait envahi notre quotidien. Une quinzaine d'années plus tard, en 2013 exactement, partant du même constat en ce qui concerne les festivals, une équipe décide d'organiser un événement sans subventions ni partenariats privés. Ainsi naissait le No Logo Festival dans la commune de Fraisans dans le Jura, sur le site d'anciennes forges. Pari osé et ambitieux.

Mais plus les années passèrent et plus le No Logo gagnait en réputation et en popularité. La fréquentation n'a cessé de croître au fur et à mesure pour pratiquement doubler en quatre ans : 19 000 personnes en 2013 et 36 000 en 2016 ! Chapeau !

Fidèle à sa devise (ne parlons pas de slogan) "C'est vous qui décidez", le No Logo fait pleinement participer le spectateur à l'élaboration du festival. En effet, une partie de la programmation se veut conforme à la volonté du public ; ainsi, les principales têtes d'affiche de cette année, Damian Marley, Dub Inc et Alborosie, étaient réclamées par les massives jurassiens.

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Des poids lourds du reggae, mais pas que. Du reggae, mais pas que. Tel est aussi le credo des programmateurs qui souhaitent ouvrir le festival à d'autres styles. La découverte, l'éclectisme, le partage et le mélange des genres ne sont pas pris à la légère par les organisateurs.

Et pour finir cette brève présentation, notons que le No Logo s'inscrit dans le cadre du développement durable. Les acteurs de l'économie locale sont grandement sollicités : ici pas de bière ou de soda distribués par des géants de l'agroalimentaire, ni de sandwichs fabriqués par je ne sais quelle marque de fast-food.

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Voilà, maintenant vous savez tout ou presque sur le festival. Passons donc aux choses sérieuses et parlons musique dès à présent.

C'est Leah Rosier, qui officiait en tant que "speakerine" durant tout le week-end, qui a officiellement lancé, sous un soleil éclatant, cette 4ème édition du No Logo en invitant le duo bisontin Mystically à monter sur scène.

Backées, entre autres, par le guitariste du Rise & Shine Band, les deux femmes (Adeline et Marie-Lou), à la voix soul très prononcée, s'inspirent grandement de ce genre. Logique, me direz-vous, quand on sait que le reggae est la soul jamaïcaine. Et nul besoin d'être plus explicite quant à l'interprétation du nom du groupe. Leur reggae est profondément roots et le fait qu'à la rythmique on retrouve une guitare acoustique renforce cette propension élégante et naturelle à apporter un peu plus de chaleur et d'authenticité. Mystically a brillamment rempli sa mission, à savoir ouvrir le festival, et c'est avec beaucoup d'entrain que le public se tenait prêt à accueillir les Néo-Zélandais de Katchafire.

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Hé oui, même au pays des Kiwis, on pratique le reggae !! Et du très bon reggae !! Les All Blacks d'Hamilton (bon oui je sais, c'est cliché, mais regardez la couleur de leurs vêtements, le rapprochement est tout de même évident) jouent un son roots porté par des lignes de basse hypnotiques et des cuivres (trompette, saxophone) exaltants. Là aussi, les inspirations soul, voire même pop, resurgissent, notamment par la voix du chanteur et par celle du...batteur qui prendra la place de son collègue le temps d'un titre. Le roots est donc prédominant au No Logo avant que Flavia Coelho n'entre en scène pour interpréter son bossa muffin.

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La Brésilienne, accompagnée de ses deux musiciens (clavier et batteur), a ravi les spectateurs par sa bonne humeur, ses good vibes et son enthousiasme. Suractive, la chanteuse jongle allègrement entre sa guitare transparente et les percussions et c'est avec joie que le public frétillera au rythme de ses compositions métissées et plurielles. "Sunshine", "Amar e amar" ou encore "Por cima" ont retenti tels des hymnes sublimés par les interprétations captivantes de l'artiste, qui ne se contente pas, sur scène, de reprendre bêtement et méchamment son répertoire : alors que sur ses albums, le son est nettement bossa, en live, on a droit à une réorchestration plus muffin, hip-hop, reggae et même dub, grâce aux effets, reverbs et grosses basses du clavier. Il n'en fallait pas moins pour qu'apparaisse ensuite le premier collectif jamaïcain de ce week-end.

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Et ce sont les héritiers la fameuse famille Morgan qui ont foulé la scène du No Logo, alors que le soleil commençait à se coucher sur le domaine des Forges de Fraisans. Una, Peetah et Gramps Morgan se sont présentés aux massives en compagnie de leurs musiciens, dont un batteur prodigieux (j'ignore si celui-ci s'appelle également Morgan ou s'il n'est qu'un ami de la famille). Et d'emblée, le ton du concert est donné : ce sera "Stricly roots", titre éponyme de leur dernier album. D'autres morceaux de cet opus seront joués comme "Child of Jah", "We are warriors" ou encore "Light it up" mais aussi des tunes plus anciennes comme "Looking for the roots" et le ska ravageur "Everything is still everything". Le show est calé, rodé au millimètre, mais quoi de plus normal, puisque la plupart des membres du groupe font partie de la même famille et se connaissent donc par cœur. Les enfants Morgan mettent le feu au No Logo, sans temps mort, et l'on adore autant le flow dancehall et rugueux de Gramps que celui plus posé et traditionnel de Peetah. Première grosse claque de ce festival.

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Mais la deuxième ne viendra pas de LA tête d'affiche de ce premier jour. C'est un autre héritier, très célèbre lui aussi, qui a enchaîné après Morgan Heritage, j'ai nommé "Junior Gong", l'un des nombreux fils de Bob Marley. J'ai été emballé à demi-mesure pour une bonne et simple raison : à chaque fois que je vois Damian Marley, je fais le même constat : il reprend incontestablement une bonne demi-douzaine de morceaux de son père. J'entends bien qu'il désire perpétuer sa mémoire et je respecte ce choix. Cependant, m'est avis qu'il opte pour la facilité, alors qu'il a à son actif des titres magnifiques et qu'il fait partie de ces rares artistes reggae contemporains à être connus du grand public, non seulement parce qu'il est le fils de son père (La Palice n'aurait pas dit mieux), mais surtout parce qu'il a ouvert le reggae à d'autres genres plus mainstream tels que le hip-hop avec Nas ou le dubstep avec Skrillex, et je trouve cela vraiment admirable. Alors oui me direz-vous, on entendra bien sûr les significatifs "Make it bun dem", "More justice", "Dispear", un titre de son nouvel album à venir "Nail pon cross" et les inévitables "Welcome to Jamrock" et "Road to Zion", d'autant plus que son flow demeure l'un des plus performants sur la scène reggae contemporaine. Mais il n'empêche que "Junior Gong" est justement trop porté sur le "Tuff Gong" : le "Sun is shining" riddim, "War", "Could you be loved", "Get up, stand up", entre autres, seront chantés par Damian Marley et très appréciés du public. Et là réside peut-être la clé de ces nombreuses reprises : sont-ce les spectateurs qui les demandent ou bien Damian Marley qui, pour plaire à ses fans, décide cela unilatéralement ? Posons même le problème autrement : vient-on voir Damian Marley ou juste le fils de Bob Marley ? CQFD. Dans tous les cas, ce choix aura été très efficace auprès des spectateurs, qui étaient principalement venus pour lui ce soir-là.

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En effet, une fois Damian Marley descendu de scène, le site s'est considérablement désempli et ce ne sont plus 12 000 personnes, mais moins de la moitié qui sont restées pour le reggae digital de Manudigital ; car décidément, le beatmaker est partout en France et en Europe depuis qu'il a entamé sa tournée du Digital Pixel. Quoi de mieux pour finir une soirée de festival à une heure et demie du matin avec des sub bass trépidantes ? En effet, Manudigital se plaît à remixer certaines de ses compositions en jungle, à savoir la Digital Kinston Session avec King Kong ou "Musical town" sur lequel toaste Bazil, le MC de Manudigital. Bazil qui posera également sa voix sur quelques-uns des riddims mythiques jamaïcains principalement issus de la "digital era" : le "Sleng Teng" ou le "Punanny". Du son bien gras, mais aussi des instrus plus rub-a-dub, lorsque, par exemple, Manudigital s'est saisi de sa basse pour jouer physiquement "Wah mi come from" pendant que Papa Michigan était présent virtuellement sur l'écran vidéo, et du...ska avec General Levy, genre vestige des années Babylon Circus du riddim maker.

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Cette première journée fut donc une réussite : l'on a donc voyagé de Besançon à la Nouvelle-Zélande en passant par le Brésil et la Jamaïque, l'on a autant écouté du roots que du digital ou de la bossa, l'on a autant skanké que jumpé. Le reggae est aujourd'hui universel et protéiforme, et c'est bien ce qu'ont voulu démontrer les programmateurs. BIG UP !!

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Le deuxième jour allait s'annoncer comme aussi riche en découvertes et aventures "cross-over", comme on dit de nos jours. Leah Rosier, backée par le Rise & Shine, a honoré de sa présence la suite des événements. Avec les instrus roots, lourdes et posées de son backing band, la Hollandaise, qui parle français avec un accent charmant, était venue défendre son album, Only Irie Vibes, sorti en début d'année. Des vibes, justement, Leah Rosier en a apporté des quantité en interprétant le titre éponyme de son dernier opus ou encore "Stay strong" et, bien évidemment, en tant que ressortissante néerlandaise, quelques ganja tunes, telles que "Herbalist" ou "High grade woman". Bien que le public fut encore peu nombreux en ce début d'après-midi et submergé par la chaleur, la prestation de Leah Rosier fut une réussite.

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Changement de style mais non d'ambiance pour le second groupe de la journée. En effet, avec Sir Jean & NMB Afrobeat Experience, on passe, vous vous en serez doutés, du reggae à l'afrobeat. Les deux genres ont des connexions indubitables (ainsi que nous le confirmera le collectif dans une interview que vous pourrez lire très prochainement) et c'était ainsi une évidence pour les organisateurs de programmer ce groupe. Et ils ne se sont pas trompés !! Avec Sir Jean et sa bande, l'expression arts de la scène prend tout son sens, car ce n'est pas un simple spectacle musical qu'ils nous proposent, mais bien plus. Résultant d'un travail de résidence, le show est également axé sur des chorégraphies nombreuses. Pour exemple, sur le titre "Permanent war" qui donne aussi son nom à l'album, on peut voir une bonne partie du collectif, dont toute la section cuivres (composée de quatre musiciens), exécuter une véritable marche au pas très bien ordonnée avec salut militaire à l'appui. Le crew a le rythme dans la peau et les morceaux afrobeat, qui sont d'une assez longue durée en général et qui pourraient en déstabiliser plus d'un, révèlent toute leur puissance et leur signification grâce à cette gestuelle impeccablement maîtrisée. Et le genre inventé par Fela Kuti étant, par essence, extrêmement politisé, ce sont des interprétations aux conscious lyrics que Sir Jean délivrera tout au long du concert, plaidant pour plus de cohésion ("One for all") ou dénigrant la "Collective madness" ambiante. Le public en ressortira conquis et radieux. Qui a dit qu'un festival reggae ne devait se borner qu'au reggae ?

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Du reggae, les massives allaient de nouveau pouvoir s'en abreuver avec les légendaires Inner Circle qui succédèrent à Sir Jean & NMB Afrobeat Experience. Malheureusement, étant en interview avec ces derniers pendant que les anciens collègues de feu Jacob Miller étaient sur scène, je ne peux vous parler uniquement du rappel, pendant lequel les artistes ont joué leurs tubes : "Sweat (A La La La La Song)" et l'indémodable "Bad boys" qu'Inner Circle prendra un malin plaisir à faire durer en introduction avant que le public ne reprenne en chœur un : "bad boys, bad boys, watcha gonna do, watcha gonna do, when they come for you".

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Et un autre symbole fort du reggae allait faire son apparition peu après, en l'occurence Israel Vibration. Alors que le crew n'est plus qu'aujourd'hui un duo, il se trouve que, sur la scène du No Logo, Wiss manquait à l'appel resté au bercail en raison d'un problème de visa. C'est donc d'une seule voix, celle de Skully, qu'Israel Vibration a enchanté le site des Forges de Fraisans. Backé, comme à l'accoutumée, par les Roots Radics, dont le grand Errol "Flabba" Holt, qui ont débuté le concert par l'habituel et inusable "Rockfort rock" riddim, Skully n'a rien proposé de véritablement original, puisqu'il a repris la majeure partie des titres qui ont fait la réputation d'Israel Vibration. Mais au fond peu importe ! L'alchimie entre le chanteur et les Roots Radics fait toujours autant de ravages, surtout qu'elle est dirigée d'une main de maître par les lignes de basse magiques de "Flabba". Immédiatement après le "Rockfort rock", le combo a enchaîné sur le remuant et rockers "Jammin'" avant de balancer des classiques en fanfare : "Red eyes", "Exploitation", "On the rock", "Never gonna hurt me again" ou l'attendrissant "Same song". Pour la petite touche romantique, un morceau plus récent que ceux précédemment cités, "You are beautiful", sera dédicacé par Skully à "all the french ladies", pendant que les briquets de la foule, à la demande de l'artiste, feront scintiller une kyrielle de petites lumières vives sous la voûte étoilée de Fraisans.

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Et c'est vers 23h environ que le groupe réclamé par les massives et les programmateurs du festival depuis quelques années est venu apporter ses good vibes, j'ai nommé Dub Inc. Le collectif stéphanois était venu présenter quelques titres de son prochain album ; ainsi, le bienveillant "Grand périple" a contrebalancé le pessimiste "Triste époque". So What n'étant donc pas encore sorti, ce sont des morceaux qui ont déjà fait leurs preuves que Dub Inc est venu interpréter devant ses nombreux fans. Et c'est en quelque sorte un condensé de toute la carrière du crew qui a résonné au No Logo. Les tracks les plus anciennes, "Murderer" ou "My Freestyle" ont côtoyé les plus modernes comme "Better run", "Dos à dos" ou encore "Tout ce qu'ils veulent".  Le groupe a également réservé une petite surprise sur le tubesque et incontournable "Rudeboy" : c'est en effet Sir Jean qui a surgi sur la scène pour un petit freestyle en compagnie de Komlan et Bouchkour. L'association entre les deux MC's fonctionne d'ailleurs toujours aussi merveilleusement bien. Le crew finira son set avec "Sounds good", véritable synthèse de toute la philosophie musicale et artistique made in Sainté et qui pourrait faire écho aux valeurs du No Logo, bon avec les années en moins : "ça va bientôt faire [20] piges qu'on est là, toujours libres, toujours indépendants et fiers de ça".

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La nuit s'avançant, il fallait, par conséquent, augmenter l'intensité des bpm ; c'est ainsi la trance tribale de Goayandi qui s'est chargée de rassasier les spectateurs pas encore fatigués et non désireux de se terrer dans leurs tentes instantanées (pas de marque, on a dit !!). Là encore, avec Goayandi, le No Logo fait montre de son éclectisme et prouve qu'on peut tout autant s'éclater sur du reggae que sur des sonorités plus tapageuses. Et d'autant plus que ça fait toujours plaisir d'écouter un didgeridoo ou un sitar en direct live !!

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Et à propos de sonorités tapageuses, les dub warriors n'étaient pas en reste durant tout ce week-end, puisque le dub corner a attiré un grand nombre d'adeptes. Animé et sonorisé par Rootikal Vibes Hi-Fi, il a également accueilli le vendredi Upfull Posse, les grosses basses digitales et stepper  d'Iron Dubz et le dub percutant de Weeding Dub le samedi. Quant à dimanche, ce sont les Lyonnais de Dub Addict, représenté par Joe Pilgrim, Pilah et Roots Massacre pour l'occasion, qui étaient chargés de maintenir les massives dans la vibe durant les inter-scènes. Nous y reviendrons plus bas, car un invité de prestige est venu se faufiler parmi ce beau monde pour toaster quelques instants. Patience...

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At last but not least, les plus belles choses ont une fin (j'en ai presque la larme à l'œil...). Trosième et dernier jour de festival et encore sous un soleil caniculaire. Les locaux Mystical Faya ont fait retentir leurs instrus roots en ce début d'après-midi devant une assistance petite par le nombre mais immense par la motivation. Mystical Faya est une entité roots, je disais, mais ne nous précipitons pas. Le morceau d'ouverture se révèle très explicite quant à l'approche stylistique des musiciens : pour faire court, un groupe de reggae reprend du hip-hop, "Gangsta's Paradise" (rebaptisé ici "Rudeboy Paradise") en y incorporant un peu de rock. Cela étant, Mystical Faya reste fidèle au son seventies et, de même que les Ligerians ou les Banyans, accorde un soin tout particulier aux lignes de basse hypnotiques et imposantes.

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Que ce soit en France ou en Jamaïque, le roots subit un certain regain de popularité ; c'est donc un des représentants de ce revival qui a succédé à Mystical Faya. Vous connaissez tous Protoje ou Chronixx, hé bien c'est le phénomène Kabaka Pyramid, au flow dévastateur, qui nous a fait part de ses conscious lyrics sur "Never gona be a slave", "Liberal opposer", "Lead the way" ou encore "Well done". Puis le chanteur s'est réapproprié le "Stalag" riddim, issu d'une mixtape avec le MC de Major Lazer, Walshy Fire, et pas n'importe quelle version, car, outre ses paroles, il a repris le refrain du "Ring the alarm" de Tenor Saw : "Ring the alarm, another sound is dying, whoho". La nouvelle génération du reggae jamaïcain est bel et bien présente, Kabaka Pyramid nous le fait clairement comprendre et il va falloir désormais compter avec elle.

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Et puisque l'on parle de Major Lazer, collectif qui a considérablement redéfini les codes du reggae et du dancehall ces dernières années, venons-en aux descendants des Clash, les Londoniens de The Skints. Ces trois entités ont en commun de mélanger les genres, et d'ailleurs, Diplo, fondateur du projet Major Lazer, cite ouvertement le groupe de Joe Strummer comme une grosse influence (vidéo à 1'35"). En gros, The Skints est un groupe de rock qui joue du reggae, et ça c'est classe !! Et on ne le dira jamais assez, punk et reggae ont toujours fait bon ménage. Les riffs punk/rock en intro des morceaux sont diablement efficaces, avant que n'apparaisse le skank. Le crew a bien évidemment interprété "This town", mais aussi "Ghost town", "Eyes in the back of my head", "Take warning" une reprise du groupe de ska-punk américain Operation Ivy, et ce qui représente pour moi leur meilleur titre, "Culture vulture" : intro rock, mélodica, ligne de basse sublime, reverb, "Culture vulture" est une chanson dans laquelle vous retrouvez de tout : du rock, du reggae, du dub, du hip-hop, du ska, c'est-à-dire toute cette énergie punk DIY à la Clash, et même à la Beastie Boys, présente sur leur premier album et qu'ils ont un peu édulcoré au fil de leurs productions ; même si FM est nettement moins rock, voire même pas du tout, The Skints en conserve l'esprit sur scène.

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Après cet intermède anglais, on retourne à une atmosphère plus roots avec les légendaires Congos. "Original Congos ! Everytime !" clame un Roydell Johnson au cours d'une prestation à couper le souffle et qui restera comme l'une des plus emblématiques de ce No Logo millésime 2016. Septuagénaires pour la plupart, les quatre chanteurs sont pourtant très actifs et véloces, puisque Cédric Myton et ses acolytes font carrément leur gym sur scène ! Contorsions, déhanchements, étirements, pompes, tout est bon pour garder une forme digne d'un Usain Bolt... Bon, trêve d'observation fitness, abordons le côté musical du show. Les interprétations sont majoritairement un subtil mélange du Heart of the Congos et du Swinging Bridge, l'album de la véritable reformation en 2006. Ainsi, du premier, on retiendra "Open up the gate", "Ark of the convenant", "La La Bam Bam", "Sodom & Gomorrow" et forcément "Fisherman" qui aura droit à deux pull up et à une magnifique dub version. Quant au second, on s'est réjoui de "Revolution", "National Heroes" sur le "Rockfort rock" riddim  et puis surtout "La Le Bella" qui prend toute sa dimension mystique en live. Le combo n'a rien perdu de sa superbe et de son talent vocal et le public le lui a bien rendu ; on a pu observer une certaine alchimie entre les artistes et leurs fans. The Congos restent assurément la plus belle harmonie vocale de toute la Jamaïque.

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Puis ce fut au tour de Balkan Beat Box de venir présenter ses compositions électro world. Ça faisait longtemps que j'entendais parler de ce collectif, sans l'avoir jamais écouté et j'étais donc curieux de pouvoir le découvrir. J'ai globalement été satisfait et les spectateurs également. Pas de reggae, à part un "roots rock reggae" confidentiel, mais le chanteur a tout de même su gagner la confiance des massives qui étaient présents en nombre. Ne connaissant pas les morceaux du groupe, je peux simplement affirmer que, constitué de plusieurs musiciens, le collectif fonctionne comme une fanfare et délivre une véritable puissance de feu sur scène. De l'énergie, des bonnes vibes, bref tout était réuni pour remuer au rythme ardent de Balkan Beat Box.

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Beaucoup plus apaisé était cependant le show de Jah Cure et je pense que cela en a perturbé plus d'un parmi les massives. En effet, nombreux sont ceux qui ont déserté la foule durant le concert, sûrement pour aller se ravitailler à la buvette. Jah Cure est un chanteur assez étiqueté lover et le fait qu'il soit programmé entre deux artistes au tempérament plus pêchu a désorienté une partie du public qui espérait quelque chose de plus percutant. Qu'à cela ne tienne, il y avait tout de même du monde pour écouter les love songs de Jah Cure, telles que "All of me", "Show love" ou encore l'émouvant "Freedom", qui fait écho à son séjour en prison ; il a d'ailleurs dédicacé le morceau à Buju Banton avec un "Free Buju". Et pour ceux qui réclamaient du reggae plus traditionnel, Jah Cure a interprété "Rasta".

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Avant de finir sur Alborosie, je voudrais faire un détour par le dub corner qui était, ainsi que je le déclarais plus haut animé par Dub Addict ce jour-là. Le crew nous a gratifié d'une petite sélection bien sympathique juste avant le concert du plus Jamaïcain des Italiens, avec notamment un remix du "Make it bun dem" de Damian Marley et Skrillex par Aku-Fen, l'un des activistes de Dub Invaders, déclinaison sound system des High Tone. Mais le plus beau allait arriver juste à la fin, lorsque Cedric Myton, qui se trouvait dans le coin, s'est peu à peu rapproché du sound system. Joe Pilgrim, aussi surpris que le public de le voir apparaître, lui a donc tendu le micro. Cedric Myton a alors toasté pendant une minute ou deux, à la plus grande joie des massives.

Que dire en ce qui concerne le show d'Alborosie ? Si l'on voulait vraiment le décortiquer de la manière la plus exhaustive qui soit, un live report n'y suffirait pas, il faudrait y consacrer une étude entière. Essayons, par conséquent, d'être le plus succinct possible. En gros, le concert se découpe en quatre parties distinctes. La première, la plus longue, est en fait un gigantesque medley de plus d'une demi-heure, dans laquelle Albo et son crew interprètent les titres de Freedom & Fyah ("Can't cool", "Poser", "Rocky road", "Everything") ou d'autres plus anciens ("Herbalist", "Police Polizia") et au cours de laquelle le guitariste reprend le "Police in helicopter" de John Holt et où le choriste effectue un petit freestyle. Plus de trente minutes de musique sans interruption, on peut tout de même saluer la grosse performance des musiciens !! La deuxième partie, plus courte, verra se succéder chacun (et je dis bien chacun) des zicos du Shengen Clan pour un solo sur un mode assez boogie, c'est-à-dire dans la plus pure tradition du jazz. Quant au troisième "chapitre", on se souviendra, entre autres, de "Informer" sur le "Heavenless" riddim et de "Nah better than me" également sur un rythme boogie. Et pour la dernière partie, qui s'avère être le rappel, c'est le batteur, avec ses baguettes, qui a dirigé le groupe, tel un chef d'orchestre, avant qu'Albo ne revienne et ne chante "Kingston town". Bref, du grand Puppa Albo qui, non seulement, montre qu'il est un grand artiste au flow tonitruant, mais qui fait également pleinement participer ses musiciens durant tout le show : une manière d'exprimer sa reconnaissance envers une équipe qui l'accompagne plusieurs mois dans l'année. Je pense que peu de chanteurs de sa carrure sont aussi généreux et mettent autant en avant leur backing band. En tout cas, je m'incline très sincèrement devant tout le travail accompli en amont pour préparer cette prestation ; Alborosie ne vient pas simplement sur scène pour défendre son album, il élabore un show intégral qui nécessite énormément de rigueur et d'abnégation. Les titres sont exécutés avec maestria, le son coule de source sans fausse note, tout se fait dans la limpidité. Quoiqu'on ait pu penser de ce concert, que l'on ait aimé ou pas, une chose est sûre, Alborosie ne s'est pas moqué de son public.

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En conclusion, je tiens à féliciter l'ensemble de l'équipe du No Logo pour toutes les good vibes qu'elle a su transmettre durant ce week-end festif, pour son organisation impeccable. Un festival qui, sans subventions ni sponsors, arrive à être sold out, ça a tout de même le mérite d'être souligné. C'est assurément le modèle à suivre à l'avenir, dans ce monde envahi de marques, de pubs et de logos.
Un gros BIG UP aussi à tous les artistes présents.
Merci également à Charlotte, chargée des relations presse, grâce à qui j'ai pu interviewer de nombreux artistes. Interviews que vous retrouverez prochainement dans ce webzine.
STAY TUNED !!

Je laisserai le mot de la fin à Joe Pilgrim qui, après le passage de Cedric Myton au sound system s'est plus ou moins exprimé de la sorte : "Merci à Cedric Myton d'être venu nous rejoindre. C'est cela aussi le No Logo, les générations se rassemblent, tout le monde se réunit sans différence ni distinction".

Crédit photos : Frédo Mat

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