Festival Contraste & Couleurs – Chalon/Saône – 22.04.2017

Disons les choses ouvertement : pour une première, ce fut une réussite incontestable ! La preuve que le reggae attire encore et toujours un public nombreux et fidèle en ces temps de disette et de misère intellectuelle et politique. 3000 personnes s'étaient en effet donné rendez-vous au Parc des Expositions de Chalon-sur-Saône le samedi 22 avril dernier dans le cadre du Festival Contraste et Couleurs où se produisaient Williams Brutus, Big Red et Dub Inc, le tout animé par The Rezident Sound qui assurait les interscènes.

Les massives sont donc venus en nombre pour célébrer le baptême du feu de ce petit nouveau (qui n'est en réalité pas si petit, vous l'aurez compris) organisé par Youz Prod et le groupe de Saône-et-Loire qu'on ne vous présente plus, Broussaï. "Suite à l’arrêt des festivals Les Francos Gourmandes à Tournus, les Giboulées au Creusot ou encore l’Oeno Music Festival à Dijon, il n’y a plus de festival Musiques Actuelles d’envergure en Bourgogne et donc l’idée est de mettre en place un festival pérenne à Chalon sur Saône, ville assez centrale de la région Bourgogne Franche Comté", ainsi s'exprimait le staff quant à la raison qui a motivé la création d'un tel événement. Les festivals disparaissant les uns après les autres, les organisateurs ont par conséquent décidé de remédier à cette carence en terme d'offre culturelle de qualité.

Cependant, ne nous voilons pas la face : si cette première édition a connu un succès non négligeable, c'est uniquement grâce à la présence, en tête d'affiche, du groupe de reggae français le plus populaire et le plus suivi sur les réseaux sociaux, j'ai nommé Dub Inc. La bande de Saint-Etienne est aujourd'hui la seule à pouvoir à la fois remplir des Zénith, faire des millions de vues sur Youtube et récolter des disques d'or ; il était donc prévisible que le public ferait le déplacement en masse. 

Alors qu'une longue, très longue (et encore, c'est un euphémisme) file d'attente s'étalait devant l'entrée et que les massives pénétraient peu à peu dans l'enceinte du Parc des Expositions, The Rezident avait pris place afin de proposer ses sélections empreintes de "Good Vibes", du nom du track interprété par Daddy Cookiz sur le "54-46" riddim (voir ici).

C'est donc face à une salle déjà bien remplie que Williams Brutus s'est présenté sur la scène accompagné de sa...guitare. En effet, bien qu'il puisse se produire avec un band (qui compte notamment des membres du Backitive Band, le crew qui backe Monsieur Lézard), c'est en solitaire et en acoustique que le Bourguignon est venu chanter son répertoire. Comme le dira The Rezident, juste après son set : "Williams Brutus restera comme le premier artiste à avoir joué pour le Festival Contraste & Couleurs", il s'agit par conséquent d'un honneur mais aussi d'une tâche difficile, surtout lorsqu'on est seul sur scène, dont il faut s'acquitter avec brio. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que Williams Brutus aura "fait le boulot" comme on dit. Très probablement aidé par son expérience en acoustique avec le duo Saï dont il faisait partie avant qu'il ne se lance en solo, il aura réussi à conquérir les spectateurs par son savoir-faire et sa voix, voix à la tonalité plus soul que reggae ; il existe en effet une réélle musicalité dans le timbre de Williams Brutus, chose qu'on avait pu déceler à travers son opus Williams Brutus EP (la grosse chronique ici), mais cela prend une dimension encore bien plus puissante en live. Et ce n'est finalement pas plus mal que le chanteur ne fût pas backé par ses musiciens, l'on a pu se concentrer exclusivement sur lui, ce qui n'aurait pas été forcément le cas si son groupe avait été à ses côtés : c'est tout l'avantage de pouvoir et de savoir se montrer à la hauteur sans être épaulé. Le public s'est montré très réceptif et a bien  évidemment réagi à son single clippé "I Tried" avant que la reprise du fameux "Another Day in Paradise" de Phil Collins ne vienne conclure un concert bien maîtrisé.

                             contraste & couleurs, williams brutus

contraste & couleurs, williams brutus

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C'est un autre artiste solo qui a ensuite succédé à Williams Brutus, en la personne de Big Red pour un set "ina vapor styleeee". Le MC a effectué un virage l'année dernière avec son prodigieux Vapor (la grosse chronique ici) qui puisait autant dans le reggae digital que dans le dub electro, l'ambiant ou les instrus lourdes, lentes et planantes en vogue aux Etats-Unis (vaporwave, trap, cloud rap, drill...). En fait, on parle de "virage", mais c'est aller un peu trop vite en besogne et ce ne serait pas comprendre la démarche de Big Red qui ne s'est jamais cantonné au raggamuffin pur et dur ; il nous en a d'ailleurs encore fait la brillante démonstration ce soir-là, mais nous y reviendrons. Même si Big Red navigue d'un genre musical à l'autre au gré de ses humeurs, il reste une constante néanmoins inchangée au fil des années, il s'agit de son flow ragga, de son fast style qui ne cessera jamais de nous épater. Même sur les prods les plus chill ("Vapor Style", "Moi, ma gueule et ma sensi", "Screwmouraï"), jouées ce soir-là par les selectas Youthman et Kyo Mitsuki, ou sur la mélancolique reprise de "La Nuit je mens" d'Alain Bashung, le MC contrebalance, par son débit énergique, l'aspect peut-être trop nonchalant des instrus. Sur scène, pas d'autotune, pas de "chopped & screwed", la voix de Big Red n'est pas pitchée, ce qui apporte ainsi une plus-value par rapport à ce qu'on peut écouter sur Vapor. Le chanteur de Raggasonic nous fera également le plaisir de reprendre quelques-uns de ses classiques en solo, comme "Redvolution" ou "Respect or die" sur le riddim de "J'ai pas le temps". Et au fur et à mesure que le concert avançait, Big Red faisait monter la pression et c'est en toute logique qu'il se mettra à chanter "Kill kill kill" et "Elektronic Sound Addict" sur un beat house/UK Garage. On n'en demandait pas moins ! Surtout qu'il continuera de plus belle avec une instru drum n' bass sur laquelle le public entonnera à l'unisson "Aiguisé comme une lame" ou "Bleu blanc rouge" que Big Red, en tant que moitié de Raggasonic, ne pouvait qu'interpréter.

                            contraste & couleurs, big red

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Que dire sur un concert de Dub Inc qui n'ait été déjà écrit ? Le groupe stéphanois est sans conteste la machine de guerre reggae la plus efficace en France et ce set a encore été l'occasion pour Dub Inc de le prouver. L'allant, l'agitation et la fougue de Komlan et Bouchkour participent toujours autant activement de ce succès, même si, selon nous, le batteur Zigos demeure la pièce centrale autour de laquelle le rouleau compresseur Dub Inc a pu construire sa notoriété croissante. Après une intro instrumentale, les deux chanteurs ont déboulé pour "Revolution", "Dos à dos" et "Better run", avant qu'ils ne fassent part de la "Triste époque" dans laquelle nous vivons bien qu'un "Grand périple" puisse lui apporter un contrepoint positif. Positif, tel est le mot d'ordre sous-jacent d'un concert de Dub Inc. Les Stéphanois possèdent en effet ce don, ce petit truc en plus inexplicable qui fait que vous êtes assurés de passer un excellent moment en leur compagnie. Certes, on sent que le show est rodé et calé au maximum, les prises de risque sont peu nombreuses mais Dub Inc garde constamment la patate sur scène et ça ne peut être que salutaire dans ce climat anxiogène. Le point d'orgue restera le moment où les Broussaï (Karma et Tchong Libo) les ont rejoints lors de "Rude Boy" (les Stéphanois ont effectivement pris pour habitude depuis quelques temps d'inviter d'autres chanteurs pour se poser sur ce qui reste comme LEUR classique, voir à ce propos notre report du No Logo avec Sir Jean) afin d'interpréter "Cosmopolite". Lors du rappel, outre "Tout ce qu'ils veulent", Bouchkour et Komlan rappelleront que c'est la musique qui compte avant toute chose à travers deux morceaux qui résument parfaitement leur état d'esprit et leur philosophie : "No Matter where you come from" et "Sounds Good".

contraste & couleurs, dub inc

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C'est alors que les deux chanteurs de Broussaï ont fait leur réapparition, mais cette fois-ci au côté de The Rezident afin de toaster notamment sur "Kingston Town" en mode sound system. Puis le selecta a enchaîné avec quelques big tunes pour conclure en beauté cette première édition d'un Festival Contraste & Couleurs qui aura su trouver son public.

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On se voit l'année prochaine ?

Un immense BIG UP aux organisateurs ainsi qu'à tous les artistes présents ce soir-là !!

Crédit photos : Live-i-Pix

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