Interview To Earth – Entretien avec Gentleman’s Dub Club

Alors que leur dernier album, Down To Earth (la grosse chronique ici) est tout fraîchement sorti il y a quelques semaines, nous nous sommes entretenus avec une partie des Gentleman's Dub Club afin d'en savoir un peu plus sur l'élaboration de cette nouvelle galette.

Cette partie, il s'agit de Nick, le guitariste du groupe, qui a accepté de bien vouloir répondre à nos questions.

Mais plus encore, et vous vous en doutez, nous avons également abordé l'impact de la crise sanitaire qui touche tout le monde sur la planète, et aussi, dans une moindre mesure, les conséquences du Brexit pour les artistes anglais.

Bonjour Nick, merci de nous recevoir au nom de La Grosse Radio. Le titre de votre dernier album est en contraste avec le précédent, Lost In Space (la grosse chronique ici). Qu'avez-vous voulu véritablement exprimer ?

En fait, il y a deux angles. Tout d'abord, on a toujours établi un petit délire par rapport aux titres de nos albums. Le premier, c'était FourtyFour (la grosse chronique ici), le numéro de la maison où les mecs habitaient à Leeds, ensuite on a enchaîné avec The Big Smoke (la grosse chronique ici), qui fait référence à Londres, là où tout le monde se trouvait à ce moment-là. Puis, on est parti sur Dubtopia (la grosse chronique ici), une sorte d'échappatoire et finalement avec Lost In Space, on a fait notre petit tour dans l'espace. Par conséquent, après tout cela, il fallait qu'on retourne sur Terre ; il y a donc toute une continuité et une logique dans nos albums. Par contre, on ne sait pas encore ce que l'on va faire sur le prochain (rires).
Pour le deuxième angle, il faut savoir qu'on a commencé à écrire Down To Earth au début du premier confinement l'année dernière, en mars/avril. On voulait donc quelque chose de léger en abordant des thèmes assez simples, tout en ayant quand même beaucoup de choses à dire dessus et il fallait donc qu'on ait les pieds sur Terre.

Alors justement, concernant les confinements et couvre-feux successifs, comment avez-vous ressenti tout cela ?

C'était la déprime totale (rires) ! Normalement, on fait je ne sais combien de concerts par an et là on s'est retrouvé sans presque rien et on n'a pas pu jouer dans les festivals, on espère quand même qu'il y en aura quelques-uns cet été. Après, au début, musicalement c'était bien, puisqu'on a eu du temps pour bien préparer et écrire l'album. Mais au fur et à mesure, ça devenait de plus en plus dur pour tout le monde, et pas seulement pour nous. Et puis d'une certaine manière, ça nous a permis de prendre du recul et de souffler un peu ; c'est bien de temps en temps de pouvoir faire une petite pause. On a bien pu recharger les batteries et du coup on est opérationnel pour repartir quand ça arrivera. Et surtout, tous les membres du groupe sont restés très connectés entre eux, alors qu'on aurait pu s'éloigner, mais nan chacun a continué à s'investir pour l'équipe ; ça nous a rapprochés.

Est-ce que le fait que tout le monde soit resté chez soi a pu influencer votre manière de travailler habituelle ou alors pas du tout ?

Oui, bien évidemment ! En fait, sur les deux derniers albums, les cinq membres du groupe qui composent ou écrivent faisaient chacun leurs démos dans leur coin et se les envoyaient les uns aux autres. Puis, on partait dans une maison de campagne et on travaillait là-bas et tout se faisait naturellement. On restait là-bas pendant une grosse semaine à l'écart du monde, sans femmes, sans téléphone, sans laptops, etc...
Mais là, forcément, à cause du confinement, on ne pouvait pas tous se retrouver dans cette maison et on a fait beaucoup de sessions sur Zoom. On s'est divisé en quelque sorte en plusieurs équipes : le joueur de clavier et moi avons écrit pas mal de riddims qu'on a ensuite transmis au chanteur, qui lui-même a travaillé sur les paroles avec le batteur. Quant à Toby, notre producteur, lui aussi a beaucoup écrit (il écrit super bien) et c'est lui qui a organisé toutes les séances au studio pour enregistrer, sachant qu'on ne pouvait pas s'y retrouver à plus de deux en même temps, même quand la situation était moins tendue cet été. Toby a fourni énormément d'efforts pour rassembler et mettre en forme tout le travail que chacun avait produit de son côté. Il a vraiment assuré !

Abordons maintenant l'aspect artistique de l'album. On sent de grosses influences soul des années soixante/soixante-dix...

En effet ! Mais ce n'était pas un choix d'écriture au début, ça s'est fait comme ça. En fait à la base, ce qu'on voulait c'était de ne pas parler du covid du tout, puisqu'on ne savait pas si ça allait durer ou pas et si c'était juste un moment ponctuel dans l'Histoire qui serait fini au bout de six mois, contrairement à la musique qui, elle, peut être écoutée vingt ans plus tard. On se disait donc qu'il ne fallait pas qu'on en fasse trop à propos de la pandémie et que l'on se concentre sur des thèmes plus positifs. Mais vu qu'on avait un peu plus de temps, on a eu finalement plus de liberté pour l'écriture et la composition et on ne s'est pas trop pris la tête pour vouloir faire à tout prix des tubes ou des morceaux qui envoient en live.
Du coup, chacun a apporté sa touche ou son petit délire tout en se lâchant. Et ça a marché ! Par exemple, le dernier morceau, "Last Chance", en mode DJ dub, ça vient de notre producteur Toby. C'est lui qui a également eu l'idée de rajouter des cordes sur certains morceaux, ce qui donne un côté assez cinématique, années 60 ou Henry Mancini. Notre clavier est plus influencé par le jazz et les harmonies, on dit que c'est le Burt Bacharach du dub (rires). On s'est vraiment fait plaisir et personne n'était là pour nous dire ce qu'on devait faire ou pas. On s'est exprimé authentiquement.

Et le fait d'avoir invité Hollie Cook ça sonnait comme une évidence pour vous afin qu'elle se pose sur ce genre de morceaux chill et soul ?

C'est surtout que c'est une très bonne pote à nous en fait. Elle avait déjà travaillé avec nous sur Pound For Pound, une sorte d'album de collaborations avec d'autres artistes. Mais de toute façon, on se voit régulièrement avec Hollie Cook, on traîne ensemble, donc c'était normal qu'elle soit présente sur Down To Earth. D'ailleurs, le morceau où elle chante, elle l'a écrit avec notre clavier. Là encore, tout s'est fait naturellement et sans prise de tête, surtout qu'elle pourra venir le jouer avec nous sur scène quand elle pourra.

Votre chanteur, Jonathan Scratchley, a également bien développé cet aspect soul dans sa voix pour cet album...

Tout à fait et je trouve ça génial de sa part ! Il a trop assuré et c'est peut-être même la meilleure chose qu'il ait pu faire jusqu'à aujourd'hui. Mais je pense que le confinement a été très bénéfique pour lui finalement, puisque d'habitude quand il n'est pas avec nous il est directeur de quelques festivals et il est souvent sous pression. Et là, il s'est retrouvé sans rien et il a eu donc tout le temps nécessaire pour travailler sa voix, il était complètement relâché. Même quand il a fait ses prises au studio avec Toby, il était super relax, tout s'est très bien passé. Et au niveau des paroles, il a abordé des choses plus personnelles.

Qu'avez-vous voulu exprimer à travers la pochette, elle qui est très psyché et 60's ?

On en revient au même où on a voulu avant tout se faire plaisir sans contrainte et donc a choisi une pochette différente de d'habitude avec plein de couleurs, assez trippante et qui ferait rigoler. On ne s'est pas du tout pris au sérieux et notre management nous a également poussés dans ce sens-là. On essaye souvent justement de prendre ce genre de pochettes un peu décalées avec des dessins, comme les pochettes de Scientist à l'époque. Et c'est original, contrairement à un photoshoot classique.

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Le dernier morceau, "Last Chance", est très différent du reste de l'album. Justement, en tant que dernier morceau, annonce-t-il un virage que vous pourriez prendre pour la suite ?

Non, pas spécialement. Mais on kiffe le dub en fait, on vient de là. Notre grosse influence, c'était d'aller voir Iration Steppas. Toutes les deux semaines environ, ils posaient leur sound system. Mais à la base, on en avait plusieurs de morceaux comme celui-ci et on a finalement choisi "Last Chance".

Sur scène, comment allez-vous le jouer ? Ce sera un mix aux machines ou vous allez utiliser les instruments ?

Déjà, c'est l'intro de notre nouveau live, comme ça on met la patate de suite et après on enchaîne avec les morceaux plus tranquilles (rires). Après, on est capable de maîtriser plein de sons sur scène maintenant, qu'il s'agisse du bassiste, du batteur ou de moi-même, on peut passer de l'electro à de l'électrique assez facilement.

Restons sur le live. Vous avez déjà joué de nombreuses fois en France, comment ça se passe avec le public français ?

Je trouve ça génial, d'autant plus que, même si je ne suis pas Français, j'ai grandi en France. Et donc finalement, d'aller en France pour moi, c'est que du bonheur : je peux manger du bon fromage, de la bonne charcuterie, acheter du bon vin pour le tour bus (rires). Plus sérieusement, le public français, il déchire ! On a fait beaucoup de concerts vers la Normandie ou la Bretagne, ce sont des endroits qui ressemblent pas mal au Sud-Ouest de l'Angleterre, comme les Cornouailles : là-bas, ils aiment le cidre et faire la fête. Après, on a très peu joué dans le Sud de la France, car c'est plus loin d'aller jusque là-bas avec le tour bus (rires). Et là si on rajoute le Brexit et le covid, ça va être de plus en plus chaud, mais on aimerait vraiment que ça reprenne, car on kiffe cet esprit de découverte entre le public et nous.

Qu'est-ce que ça va changer pour vous le Brexit, concrètement parlant ?

Pour le moment, ça ne va pas changer grand-chose, car on a le droit de faire des tournées sur 90 jours. En fait, le problème sera plus d'ordre administratif, où il faudra remplir un carnet d'entrée/sortie, et ça va nous coûter 500 euros de plus pour pouvoir aller jouer en France. Donc c'est vrai que pour un petit concert, on se dira que ça ne vaut pas le coup d'y aller. Donc oui, c'est sûr que ça aura un effet, mais finalement pas tant que cela. Mais j'espère que les gens continueront à mettre la pression des deux côtés, pour que les artistes puissent passer sans carnet d'entrée/sortie.
En fait, pour les groupes qui sont déjà installés comme nous et qui ont déjà fait des concerts en France, ça ne changera pratiquement rien, c'est surtout pour les artistes qui se lancent et qui avaient l'habitude de louer un van pour faire quelques dates en France afin de se faire connaître pour qui ce sera vraiment compliqué. Ça, ce ne sera plus possible vu qu'ils n'auront pas forcément les moyens de pouvoir débourser les 500 euros en question. 

Un dernier mot à ajouter ?

On est content que l'album soit sorti et que les gens puissent l'écouter en France. On va donc continuer à écrire et sortir de la musique. De toute façon, nous, on ne change pas (rires) et on a d'ailleurs commencé à produire le prochain album pour l'année prochaine.

Merci à Nick ainsi qu'à Sarah pour avoir organisé cette rencontre.

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