Spock's Beard, pour ceux qui n'en auraient jamais entendu depuis plus de trente ans, est un groupe de prog à la base fondé par Neal Morse, le musicien le plus prolifique du genre, avec son frère, Alan à la guitare, l'excellent Nick D'Virgilio à la batterie, le claviériste Ryo Okumoto et Dave Meros à la basse. Sauf qu'en trois décennies, le groupe a eu le temps d'évoluer avec le départ de Neal et Nick, un side projet réunissant les trois quart des membres et un line up plus ou moins fluctuant au chant et à la batterie. Pour ce 14ème album, Spock's Beard accueille un nouveau venu aux fûts : Nick Potters et nous gratifie de son premier opus depuis 2018. C'est donc avec une immense pression que le groupe nous dévoile The Archeoptimist sur le label Inside Out Music.

Sept ans ont passé depuis Noise Floor qui voyait le retour de Nick D'Virgilio à la batterie pour un seul album. Pendant ce temps là, les autres musiciens n'ont pas chomé avec Pattern Seeking Animals qui, même s'il ne se départissait pas du style Spock's Beard, avait le mérite de faire patienter les fans. Et l'attente est enfin finie avec The Archeoptimist. La formule est toujours la même : du bon prog influencé par les années 70 avec notamment deux noms qui reviennent : Genesis et King Crimson. Lors de l'ère Neal Morse, ce dernier avait tellement imprimé sa patte qu'il était impossible pour le groupe de s'en départir. Avec ce nouvel opus, on reste sur des classiques : un mélange de morceaux dépassant les 6 minutes et un titre fleuve de plus de 20 minutes. Tout ça reste normal pour du prog mais pourrait dérouter les fans de rock plus classique et plus concis. Spock's Beard n'a jamais fait dans la simplicité entre les concept albums du début et le talent toujours aussi actuel de chaque membre du groupe.
"Invisible" ouvre le bal et on a l'impression d'être resté en 2018 avec une intro à cappela chère au groupe. Mais ce qui frappe d'emblée, c'est l'omnisprésence de Ryo Okumoto. Que ce soit à l'orgue Hammond, au synthé ou au mellotron, le claviériste va imprégner l'intégralité de l'album de son style à un tel point qu'on cherche parfois Alan Morse à la guitare. Le titre est toujours aussi joyeux et bien construit sans pour autant faire preuve d'innovation. Autre musicien qui brille dans cet album : Dave Meros à la basse. Il bénéficie déjà d'un traitement sonore merveilleux dans les doigts experts de l'ingé son fétiche du groupe Rich Mouser mais il se permet aussi quelques duos avec Ryo et même dans des passages plus fournis, c'est un vrai régal de suivre ses lignes.
Autre symbole de continuité : le morceau "Afourthoughts" dont le titre rappelle les anciens compositions du groupe "Thoughts" dont le style a aussi été repris par Neal Morse dans sa discographie solo. Entendez par là un morceau basé sur une mélodie à cappela en contrepoint qui rappelle assez King Crimson. Histoire de faire encore plus prog old school, le groupe se permet même de commencer le titre avec le thème de "Pictures at an Exhibition", une série de pièces classiques reprises par Emerson Lake and Palmer. Le tout au mellotron, on ne peut pas faire plus "rock progressif". Même constat pour "St Jerome in the Wilderness" : c'est bien fait, Alan Morse fait un petit solo qui rappelle Yes mais rien de neuf, simplement la satisfaction d'écouter des titres bien foutus.
Les fans de longue date ont quand même de quoi se faire plaisir avec notamment le morceau éponyme "The Archeoptimist". D'une durée de 20 min, on fait toujours confiance à Spock's Beard pour nous livrer un titre de qualité dénué d'ennui. Celui là n'échappe pas à la règle. On passe du jazz à l'électro et même au funk de Jamiroquai avec une fluidité hallucinante, sûrement due à un travail énorme de Dave Meros pour lier tout cela. On reste dans le style qui fait le succès du groupe depuis trois décennies mais quand même, tout passe comme une lettre à la poste et pas une seule fois, on regarde la montre. Cela fait très plaisir de voir qu'après treize albums et un side project, les membres du groupe en ont encore sous la pédale. Le petit nouveau Nick Potters fait un travail admirable dans la lignée des autres batteurs Nick D'Virgilio et Jimmy Keegan mais se rapproche plus du premier, ce qui est une bonne chose. "Electric Monk" permet également de montrer toute l'étendue du talent du batteur avec des rythmes syncopés très jazzy et très subtiles.
Il nous reste à évoquer le dernier titre qui a la lourde tâche de passer après "The Archeoptimist". Soyons direct : il y a de gros relents de "Firth of Fifth" de Genesis et on hésite à comparer ce morceau à du plagiat tant au niveau du lead de Ryo Okumoto, que du passage à la douze cordes d'Alan Morse. Alors certes le groupe a toujours revendiqué l'influence du prog des années 70 mais là c'est un hommage plus qu'appuyé.
Mais ne boudons pas notre plaisir, ce 14ème album est quand même une belle réussite. Trente ans après leurs débuts, le groupe est toujours capable de nous surprendre, certes il ne se réinvente pas, mais chaque morceau est un travail d'orfèvre avec de vrais passages de bravoure. Sans pour autant atteindre la grâce des débuts ou de l'excellent X qui avait rassuré les fans suite au départ de Neal Morse, il fait du bien aux oreilles et à l'âme car Spock's Beard fait partie de ses groupes de prog positifs avec une belle énergie.
L'album est disponible à partir du 21 novembre ici.
Tracklist:
01. Invisible [06:33]
02. Electric Monk [06:16]
03. Afourthoughts [07:31]
04. St. Jerome In The Wilderness [08:46]
05. The Archaeoptimist [20:57]
06. Next Step Spock’s Beard [10:58]








