Enter Shikari – The Mindsweep

Ils plaisent, ils cartonnent, ils énervent, ils attirent les critiques... En tous cas, rarement un groupe n'aura à ce point laissé personne indifférent. Il faut dire que les anglais de Enter Shikari collectionnent tout ce qu'il faut pour agacer : ils sont jeunes, et pourtant sortent déjà leur 4e album. Ils remportent un succès grandissant. Ils mélangent un nombre hallucinant de genres dans chacun de leurs morceaux, de sorte qu'il est particulièrement ardu de les classer quelque part. S'ils ont un indéniable côté bourrin, ils proposent également des mélodies à la chantilly, parfois à la limite de l'émo de bas étage. Et pourtant, et pourtant, le succès qu'ils remportent auprès des jeunes pourrait faire d'eux les hérauts de la génération d'aujourd'hui, qui à l'instar de RATM ou plus encore Faith No More hier, décide de tout mixer, de faire tomber les frontières en se contrefoutant du qu'en dira-t on. Et si Enter Shikari se laisse parfois emporter dans son délire et a déjà été pris en flagrant délit d'en faire trop (encore que ça dépend de ce que chacun est prêt à accepter), ils n'en restent pas moins un groupe terriblement talentueux.

Parce qu'enchaîner des phases dub-step, métal, rap, hardcore, jungle ou pop planante (et encore, on pourrait continuer) comme si de rien n'était, ce n'est pas donné à tout le monde. Ensuite parce qu'avec le temps et l'expérience, le groupe a appris à mettre de l'eau dans son vin et à canaliser son énergie juste ce qu'il faut. Le résultat, ce sont des titres qui tout en continuant de ruer dans les brancards, s'avèrent bien plus tubesques que par le passé. Parce qu'à leur niveau, toute la difficulté est là : conserver leur côté expérimental et inclassable tout en parvenant à canaliser au mieux leur énergie débordante. Pari particulièrement casse-gueule, qu'ils avaient pourtant été en passe de réussir sur leur troisième réalisation, A Flash Flood of Colour (2012). Pari pleinement réussi avec The Mindsweep aujourd'hui, qui s'il ne séduira sans doute pas les allergiques aux précédentes productions du groupe, ne s'affirme pas moins comme une réussite éclatante et la meilleure réponse qui soit à leurs détracteurs.


rou reynolds, chris batten, the last garrison, aenesthesist

Parce qu'il faut écouter pour se rendre compte de la richesse hallucinante de chacune de ces compositions et se rendre compte à quel point le groupe ne se fixe aucune limite, mais profite pleinement de son panel d'influences pour pousser à fond l'intensité de sa musique. C'est sûr que les influences ne parleront pas forcément à tout le monde : ces jeunes gens ont autant écouté Linkin Park et Radiohead que du métal bourrin, de l'électro easy listening et du dubstep (non mais écoutez un peu ce bordel sur "The appeal and the Mindsweep II"). La démarche, elle, reste dans le fond très proche de Faith No More : aucune limite, se diriger vers l'inconnu c'est toujours mieux, et utilisons toutes les ficelles à notre disposition pour nous exprimer au maximum de nos possibilités.

 


L'expérience aidant, c'est une avalanche de décibels qui agresse rapidement l'auditeur sur "The Appeal and the Mindsweep I", avant que la mélodie du chant clair ne reprenne le dessus avec des gros choeurs que ne renieraient pas les groupes de hardcore genre Funeral for a Friend. Sur "The one true colour", ce sont carrément des nappes de violon qui viennent interrompre la violence hardcore (on est parfois à la limite du Djent) sur un refrain ultra mélodique, voire sirupeux, sans pourtant que l'on ressente de cassure, notamment grâce au gros travail réalisé sur les arrangements, qui adoucissent les transitions. "Anaesthetist" envoie un gros rythme groovy sur lequel le chanteur Rou Reynolds (qui partage le micro avec les autres musiciens, notamment le bassiste Chris Batten) commence à rapper (d'une façon qui n'est pas sans rappeler le Linkin Park des débuts, en particulier sur "Never let go of the Microscope", hommage ?) avant que la batterie ne passe en mode pur métal et que les arrangements électro ne viennent atomiser un final monstrueux. 

A ce stade, vous aurez sans doute compris que chaque titre fourmille tellement d'idées qu'il est inutile de chercher à décrire : écoutez, faites-vous votre propre opinion. Le groupe est devenu d'une efficacité redoutable et s'avère aussi bien capable de pondre des morceaux violents que des montées en puissance, que des morceaux planants, que des tubes en puissance (le single "The Last Garrison"), que des expérimentations inclassables. Les aficionados ne manqueront pas de penser "ç'a toujours été le cas". Oui, mais cette fois-ci, Enter Shikari a trouvé l'équilibre quasi parfait entre efficacité et bordel, etre concision et folie, et l'expérimentation, si elle est toujours aussi présente, n'empiète plus sur la musicalité. The Mindsweep s'affirme comme le meilleur de leur jeune carrière et a tout ce qu'il faut pour détruire le crâne des malheureux qui vondront bien écouter. S'ils avaient tendance à vous agacer, pas de bol : ils sont là pour durer. Voire pour incarner le futur.

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NOTE DE L'AUTEUR : 9 / 10



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