Les Transmusicales de Rennes 2015 : au Parc des Expositions

Cette année encore, les Transmusicales ont secoué le monopole anglo-saxon et ouvert des boulevards aux nouvelles musiques d’ailleurs. Et l’ailleurs, paradoxe, est parfois sous notre nez : quasi la moitié de la programmation était constituée de groupes français émergents, et plus d’un sixième de Bretons ou des voisins de la Loire. Etonnant cocktail d’ouverture sur le monde, de diversité et de soutien à la création locale. Tiens, presque un programme politique…

Errements à travers les grands halls du Parc des Expositions de Rennes, où cette année, une fois n’est pas coutume, les révélations live furent hexagonales, et résolument à l’Ouest.

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Aperçu de l'intérieur d'un hall du parc


Vendredi 4 décembre, nous attrapons les Malgaches de The Dizzy Brains. Pour leur première date à l’étranger, les jeunots assurent et débitent un set punk-rock old school, sans surprise mais rafraîchissant. « Louie Louie » braillé à toute berzingue d’une voix cassée, ça se refuse rarement. Le cas des vétérans de Grand Cannon est à la fois plus contrasté et plus intéressant. La voix du bluesman chicagoan Zachary Prather étant mal sonorisée et proprement noyée, difficile de retrouver la chaleur et la profondeur des enregistrements studio. Il fallait au moins cela, malheureusement, pour embarquer pleinement pour le voyage effectué par Grand Cannon à travers les musiques américaines – voyage roots et plaisant mais guère aventureux. Heureusement, les deux Suisses Pfuri Baldenweg et Kniri Knaus sont là pour bricoler : tels Dupond et Dupont, flanquant Prather de leurs moustaches d’argent, ils triturent un bric-à-brac d’objets récupérés (en guest star, trombones en plastique et sac poubelles). Et ce côté DIY retrouvé et revendiqué par des vieux briscards emporte l’adhésion. Percussions-sac-plastique sur le titre « Rubbish bag », vieilles chaînes secouées sur la working song « I need my freedom »… Et quand la poubelle de ville verte elle-même débarque de plein pied au côté de l’harmonica, c’est bon, on craque. 

Si nous avons raté Dralms – qui débarquera bientôt sur nos ondes et nos réseaux, garanti – nous avons en revanche découvert Totorro totalement par hasard.

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Totorro


Auteurs d’un premier album, Home Alone, paru en 2014, ces Rennais nous font prendre nos distances avec la scène garage/new-wave qui tend à peser sur la cité rock. Comme toute une génération, Totorro a biberonné Miyazaki, mais aussi sans nul doute la scène post-rock canadienne des années 2000. Difficile de ne pas entendre l’influence Do Make Say Think, le trio de Toronto injustement laissé dans l’ombre du géant Godspeed You Blak Emperor. Surtout quand la trompette est dégainée sur scène… Mais le quatuor rennais n’est pas une pâle imitation, et défend vaillamment et avec bonheur ses titres sur scène. Post-rock instrumental en mode majeur donc, mais mâtiné d’éclats de pop dansante, les morceaux s’étirent, se brisent sans violence, à la fois sages et généreux, emportant progressivement le public qui s’amasse et se densifie dans le hall 3 du parc à minuit. Comme un voyage lumineux et chaloupé. D’ailleurs, les corps chaloupent dur sur scène et dans la fosse.

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Totorro


Le samedi 5, la surprise est aussi plus qu’à moitié rennaise, et porte le nom de City Kay. Excusons-nous de marcher un moment sur les plates-bandes de la Radio Reggae – mais comment faire autrement qu’empiéter aux Transmusicales ?

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City Kay


Jérôme El Khadi, d’origine londonienne, prête déjà sa voix aux Angevins de Zenzile. Ici entouré de cinq musiciens, ils proposèrent ensemble leur reggae intimiste, pour bercer et échauffer tout à la fois le hall 8. Et s’il ne fallait apparemment pas s’attendre à un groove puissant, la relative élégance des compositions fut convaincante. 

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City Kay


Outre les succès hexagonaux, les promesses des lointains ont été tenues cette année. Certes, on accuserait facilement les Thaïs du Khun Narin’s Electric Phin Band, sorte de « groupe à mariage » mariant musique traditionnelle « phin prayuk » et rock psychédélique, de manquer de structure sur le long terme. Mais doit-on exiger mordicus un set habilement composé dans sa progression, alors que la formule est calibrée pour jouer des heures durant au milieu des foules plutôt que sur une scène de festival ?

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Khun Narin’s Electric Phin Band


On aurait forcément aimé se mettre à danser avec ses voisins inconnus, d’autant que les gracieux mouvements d’Asie du Sud-Est sont communicatifs. Mais nous sommes samedi, 2h du matin, et après trois jours de festival la fatigue engourdit quelque peu la foule... Qu’importe, le plongeon dans leurs cavalcades psychédéliques est un plaisir.

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Khun Narin’s Electric Phin Band


Plus tard, le rappeur sud-africain Okmalumkoolkat, bardé de basses lourdes et de synthétiseurs planants, a proposé un set au jeu de scène minimaliste ; mais l’originalité du son electro-hip-hop n’est pas démentie en live, et apporte une bouffée d’air dans l’univers de la bass music.

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Okmalumkoolkat feat. Cid Rim & the Clonious


Côté danse et electro, retenons pour le vendredi l’excellent collectif parisien Mawimbi, qui brassent efficacement les musiques africaines, ainsi que &Me, redoutable producteur de deep house, Berlinois jusqu’au bout des ongles. Samedi, ultime cocorico, Romain Delahaye, alias Molecule, a présenté son album signé chez Ed Banger et bien nommé 60°43’ Nord. Cinq semaines d’isolement dans l’Atlantique Nord sur un chalutier auront permis à ce Parisien d’origine et Breton de cœur de récolter des sons – bruit des vagues et de la houle, bruissements des machines et bips des instruments de bord, cris des mouettes… – pour créer une techno qui dérive vers l’ambient et la dub. Sombre, classe et percutant, dans la lignée du Danois Trentemøller. A l’Ouest, toujours du nouveau.

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