Meat Loaf – Braver than we are

10 ans après leur collaboration sur un Bat Out Of Hell III plus que discutable, et loin derrière le second opus à grand succès du chanteur, Meat Loaf retrouve son acolyte de toujours Jim Steinman, cette fois-ci seul maître à bord des compositions. Le duo est-il encore capable de merveilles ?

Récemment, les nouvelles concernant la santé de Meat Loaf nous laissaient penser que ce Braver Than We Are, déjà annoncé depuis quelques années, ne verrait jamais le jour, et que le tableau de chasse de 2016 de Dame Faucheuse, déjà bien fourni en noms prestigieux, recevrait une nouvelle offrande. Malgré une certaine appréhension concernant la capacité du duo Steinman/Loaf à composer de nouveaux titres phares, c'est donc soulagé que l'on se lance dans une écoute qui nécessitera de nombreux passages pour appréhender la réelle richesse - ou la décadente déchéance - de ce cru 2016.

L'ambiance de "Who Needs The Young" renouera aisément avec ce qui fit le succès de Bat Out Of Hell. Cette ambiance cabaret, totalement empreinte des illusions de Broadway, ne fait pas honneur à l'éternel morceau orienté metal et teinté d'épique qui fait généralement l'ouverture des albums de Meat Loaf, mais nous plonge dans une ambiance qu'il nous tardait de retrouver. Ici, tout est léger, tout est loufoque, tout n'est qu'un jeu entre l'auditeur et les musiciens, et il ne suffit que de fermer les yeux pour les retrouver maquillés aux couleurs des méandres du Rocky Horror.

C'est dès "Going All The Way Is Just The Start" que le premier défaut de l'album se fait lourdement ressentir : Meat Loaf n'a plus aucune voix. Ce n'est pas tant la perte d'aigus, que l'on peut difficilement lui reprocher, que le fait qu'il n'arrive plus du tout à la poser. Chaque attaque de note semble un râle de douleur, tout est toujours accompagné d'hésitation ou de souffles épuisés, nous rendant l'écoute tout aussi douloureuse. Le manque de puissance et de justesse sera encore plus remarqué à l'arrivée derrière le micro d'Ellen Foley. La partenaire de longue date du chanteur, connue surtout pour son timbre vif et acéré sur "Paradise By The Dashboard Light" il y a maintenant 39 ans, n'est également plus toute jeune mais fait preuve d'une puissance remarquable, prenant littéralement la place de lead dans le morceau. Elle fait à ce titre office de cache-misère pour un Meat Loaf qui sauve les meubles comme il le peut.

Beaucoup de chanteurs au timbre en déclin adaptent leur registre. Bob Dylan ne cherche plus à élancer des aigus qu'il n'a plus depuis longtemps, et Jim Steinman se doit de prendre en compte les capacités de son ami dans son exercice de composition. Pourtant, il n'est pas difficile de voir que les morceaux n'ont pas été composé en faveur d'un Meat Loaf actuel, mais dans le fantasme de ce qu'il aurait pu faire à une époque plus propice. En plus de ne pas être d'une qualité dont le souvenir hantera plusieurs générations - on pense à "Souvenirs", trop longue et répétitive -, les arrangements autour de la voix ne sont pas propices à cette dernière, preuve en est que Steinman aurait préféré un chant lead à l'octave supérieure.

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Source photos : Billboard.com

Surtout qu'après "Going All The Way Is Just The Start", le festival de mauvais goût fait son entrée, et avec lui son lot de balades mielleuses et mal composées. Steinman, comme à son habitude -on pouvait déjà allègrement lui faire ce reproche sur Bat Out Of Hell II-, privilégie ses ambiances de comédie musicale pour justifier des titres de remplissage souvent mal composés et inutiles. Reste les paroles, toujours superbement écrite par une plume à la fois ambitieuse et ironique.

Si le retour de l'ambiance loufoque fait son retour à partir de "Godz", pour une fin à peu près crédible, l'ensemble de l'album est assez décevant. On retiendra le second morceau, qui rappelle les grandes heures de Steinman, mais cela reste bien faible pour le chant du cygne annoncé. On aurait préféré rester sur le diptyque Hang Cool Teddy Bear / Hell In A Handbasket, qui au moins proposait de bons morceaux... Meat Loaf le dit lui-même durant "Who Needs The Young" : "My voice just isn't what it was". Et on ne lui dira pas d'arrêter, des timbres déclinants nous faisant rêver depuis des décennies. Mais quitte à en avoir conscience, autant réellement jouer avec, et ne pas se croire encore capable pour se planter en beauté.

 

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NOTE DE L'AUTEUR : 4 / 10



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