Le cas Marilyn Manson : des Spooky Kids à  Born Villain

Le cas Marilyn Manson. La sortie du nouvel album de double M paraît être une bonne occasion de se lancer dans une petite rétrospective, et ce pour plusieurs raisons. Tout d'abord, cela fait maintenant deux décennies que Brian Warner et ses sbires sont en circulation. Ensuite, après plusieurs albums décevants, un renvoi de son label pour ventes insuffisantes et des apparitions scéniques au rabais, la question se pose : Manson a-t il encore sa place aujourd'hui, et peut-il vraiment reconquérir son statut ? Avec Born Villain, le révérend joue ses dernières cartes alors que sa crédibilité est au plus bas. Après 50 millions d'albums vendus, et alors que la popularité de ce nom devenu célèbre a pris de sacrés coups dans la gueule, a-t il encore quelque chose à dire ? Son succès réside en grande partie dans sa capacité à utiliser les médias avec une maestria hallucinante. Comment est-il devenu cette superstar ultra populaire, et en quoi consiste son problème aujourd'hui ? Eléments de réponses, et verdict sur ce nouvel album pour finir (en bas).

Marilyn Manson and the spooky kids se forme au début des années 1990 (le nom sera ensuite raccourci). Brian Warner l'a suffisamment répété, il veut être une star. Profondément marqué par une éducation puritaine très stricte et décidé à tout faire péter, sa rencontre avec Trent Reznor, alors tout auréolé du succès du premier album de Nine Inch Nails Pretty Hate Machine, marquera véritablement le tournant décisif de sa carrière. Le courant industriel est porté par les succès grandissants de groupes comme Ministry et Skinny Puppy. Surpris par le succès de ce qu'il considérait comme un projet très personnel, Reznor propose avec le EP Broken sa production la plus noire et violente à ce jour, tranchant radicalement avec son prédécesseur. L'image est en adéquation avec la musique puisque les vidéos de « Wish » et surtout « Happiness in slavery » restent des monuments de l'industriel sans concessions. Surprise, on aperçoit le jeune Brian, encore complètement inconnu, tenir une gratte en local de répète sur la vidéo de « gave up ». Difficile alors de prédire à celui qui n'est encore qu'un figurant la carrière qui allait être la sienne. Et pourtant...

 

 

 

Trent fonde sa propre maison de disques, Nothing Records. NIN est alors parfaitement rôdé : le musicien, s'il est un maniaque du contrôle, s'est néanmoins entouré d'une bande collaborateurs réguliers. Producteur, compositeur, chanteur et multi-instrumentiste dans son groupe, Reznor est avant tout un surdoué des arrangements qui excelle à créer des espaces sonores truffées de 1001 détails au service du rendu recherché. The Downward Spiral sort en mars 1994 et devient un énorme carton (plus de 4 millions de copies écoulées aux états-unis). Le groupe se lance dans une tournée triomphale immortalisée par la VHS Closure. Les shows proposés marqueront la mémoires des chanceux qui ont pu y assister : les musiciens sont complètement déchaînés, détruisent une quantité invraisemblable de matériel, se rentrent dedans sur scène le long de prestations d'une intensité rare, et volent la vedette au festival de Woodstock 1994 en apparaissant recouverts de boue avant de délivrer une prestation incendiaire.

 

Manson est aux premières loges de tous ces événements puisque après avoir signé sur Nothing Records, il assure la première partie de NIN. Reznor produit donc Portrait of an american family, qui sort en juillet 1994. Ambiances de fêtes foraines déglinguées, attaques au vinaigre contre les travers de la société américaine, l'ensemble est sympa et  contient quelques titres forts. Pourtant, malgré 200 000 copies écoulées, Manson n'est pas satisfait. Il lui faudra pour cela attendre jusque en 1995 et la sortie de ce curieux objet qu'est Smells like Children, prévu pour n'être au mieux qu'un EP et rempli de chutes de studios d'une bande de junkies en train de s'éclater à faire les cons. Le jackpot arrive de la reprise de « Sweet dreams » des Eurythmics, que Manson impose en single contre l'avis de Reznor. Bien lui en a pris. Très efficace, parvenant à pervertir parfaitement l'original, et mise en valeur par un clip somptueux, elle lance un buzz qui passe les frontières.

 

Reznor, rongé par la pression médiatique, terrifié par l'angoisse de la page blanche, va mettre NIN de côté pour se concentrer sur la pré-production d'Antichrist Superstar. Manson, lui, a désormais une certains expérience et a longuement mûri son idée : créer un concept qui devra cristalliser toutes les peurs, toute la nervosité générées par l'approche de la fin du siècle, et envoyer un grand coup dans les valseuses de l'Amérique puritaine et conservatrice. Pour autant, l'enregistrement est un cauchemar, entre les abus de drogues et les excès en tous genres, alors que Reznor est trop épuisé pour reprendre le projet en main. La solution viendra de David Lynch, qui appelle Reznor pour travailler sur la bande originale de Lost Highway. Pour Trent, c'est une nouvelle occasion de repousser le retour de NIN, un monstre dont il a perdu le contrôle et avec lequel il souhaiterait sortir un album à la fois plus abouti mais aussi totalement différent. L'artiste se perd dans ses contradictions pendant que Manson, qui a deux titres à livrer pour la dite BO, se remet dans le sens de la marche. Son succès grandissant (un million d'albums tout de même) lui permet également de réfléchir à une production scénique de grande ampleur, pour lequel il sera souvent comparé à Alice Cooper. Sa réussite sera fracassante.

A force de concerts fortement inspirés par ceux de son mentor et un goût prononcé pour le spectaculaire grand guignol, Marilyn va s'attirer les foudres de l'Amérique bien-pensante et déclencher le phénomène médiatique qu'il espérait. Objectif : devenir un père-fouettard version hardcore, qui s'amuse à faire ressortir les peurs cachées dans des ambiances de fin du monde. Le principe est simple : ne pas laisser indifférent, se faire adorer ou détester, faire naître des rumeurs en grossissant les choses dans la presse, qui colportent le cirque et en redemandent. Les frasques du groupe n'ont rien de très original mais le cœur y est : déchirer des bibles sur scène, simulations de fellations, maquillages et look outranciers, utilisation de symboles nazis, quelques trucs plus crades comme les scarifications sur scène, ou encore parfaitement abrutis comme lors d'un showcase de présentation de l'album, en première partie de NIN, qui dura en tout et pour tout 25 minutes avant que Manson ne balance son pied de micro en plein dans la tronche de son batteur, qui sera évacué vers l'hôpital le plus proche (et qui n'a quitté le groupe que récemment, pauvre vieux...).
 


Antichrist superstar a quelque peu perdu de son côté sulfureux avec le temps, mais n'en reste pas moins une vraie réussite. L'influence de NIN est omniprésente avec une production immédiatement reconnaissable, terriblement glauque, peuplant l'album de sons dissonants et grouillements en tous genres (la comparaison de vidéos de concerts de NIN 1994-95 et MM 1996-97 est assez explicite également). Cette influence pèse d'autant plus à Manson que les sessions furent une fois de plus houleuses. Il n'a pas digéré que Reznor, en plein pétage de plombs et lassé par le comportement ingérable du groupe, n'ait pas assisté au dernier mois d'enregistrement. Lui n'a pas les mêmes problèmes, puisque le bordel médiatique, c'est son carburant. Le timing est parfait pour sortir une « autobiographie » rédigée par un journaliste, qui revient sur son enfance, son ambivalence vis à vis des femmes (fasciné et terrifié), et multiplie les anecdotes sex, drugs and rock'n roll. Surtout, il en profite pour dire du mal de la quasi totalité des musiciens à la mode du moment. Les raisons sont multiples : entretenir son aura bien sûr, mais aussi essayer d'imposer son nom et son image afin d'émanciper le groupe pour de bon de références qui deviennent encombrantes dans sa course à la reconnaissance.

La sortie de Mechanical Animals en 1998 marque un changement radical, au niveau musical et esthétique. Pompant sans vergogne David Bowie (et s'en cachant à peine), Manson se tourne vers une image rétro et une musique inspirée par les paillettes des 1970s. Maintenant que la percée est faite, il faut durer. Le garçon est intelligent, a parfaitement compris que s'entêter dans la même direction 'apporterait rien de bon, et effectue un 180°. Le changement a de quoi choquer, voire pose de sacrées questions quand à la capacité de l'artiste à créer et non à recycler. Et dès lors, et à l'instar de Madonna, qu'il admire beaucoup, Manson n'aura de cesse de changer de style à chaque album, dont chaque aspect sera calculé soigneusement pour coller à l'air du temps. Le pari est risqué, mais l'enjeu est élevé : faire son trou dans le mainstream et fréquenter les grands de ce monde. Avec une image une fois de plus extrêmement léchée (la pochette reste un classique) et plusieurs gros tubes potentiels, Marilyn veut s'affirmer en tant qu'artiste. Problème, il ne réussit que partiellement son coup pour les raisons évoquées. Le magazine Hard Force le résume dans sa chronique : « Artistiquement, c'est de la pure fumisterie. Mais musicalement, c'est excellent ».
 

 

Le génie que Reznor a pour les arrangements et la musique, MM l'a lui pour le sens des affaires. Oasis a élevé au rang d'art le fait d'être omniprésent dans la presse en jouant le rôle de connards arrogants. Le guitariste de Nada Surf aura cette anecdote amusante dans Rock Sound en 1996 : « Le truc fort avec Oasis, c'est de parvenir à être toujours présent dans la presse. Je devais l'interviewer pour un journal (noël Gallagher), on buvait du thé, il était charmant, aimable, disponible. Et dès que j'ai mis mon magnéto en marche, il est devenu arrogant, irrascible, et s'est mis à raconter des conneries. Admirablement ». Mais à ce petit jeu, c'est bien Marilyn le plus fort : Courtney Love est une salope, Trent un trou du cul, Korn une bande de cul-terreux (on en passe), et lui a tout compris. Pourtant, le carton espéré n'arrive pas encore tout à fait, et les fans ont du mal à s'y retrouver, sans compter que la plupart des critiques ne sont pas dupes et se doutent bien que "Omega and the mechanical animals" doit beaucoup à "Ziggy stardust and the Spiders from mars".

En octobre 1999, Reznor finit par sortir de son silence et livre The Fragile, double album extrêmement ambitieux et potentiellement suicide commercial. Parler de chiffres de vente décevants est exagéré, mais il ne réitère pas l'exploit de son prédécesseur. En revanche, la reconnaissance critique est quasi unanime. Plutôt que de se répandre dans la presse, Trent livre quelques paroles savoureuses à l'intention de Courtney Love (encore!) et MM. Et ce dernier a beau dire à qui veut l'entendre que la dite chanson lui en touche une sans faire bouger l'autre, il ira tout de même se réconcilier avec son ex-meilleur ami, apparaîtra avec lui sur scène et réalisera le clip de « Starfuckers inc ». Réconcilié avec son mentor, Manson s'est aussi et surtout définitivement débarrassé de toute référence à NIN sur une note positive (chacun chez soi) et va pouvoir s'atteler à écrire un nouveau chapitre de sa carrière, alors qu'il est l'objet de nombreuses attaques suite à la fusillade ayant eu lieu dans le lycée de Columbine, où deux adolescents tuent 12 de leurs camarades et en blessent 24 autres avant de se donner la mort.
 


Le documentaire de Michael Moore, Bowling for Columbine, est l'occasion de donner la parole à Manson sur la tragédie. A la surprise de ses détracteurs, celui-ci apparaît comme un individu intelligent et réfléchi, ce qui ajouté à des clips moins trash que par le passé contribuent également à « normaliser » son image. Au rayon musique, la question est simple : est-il capable de proposer quelque chose d'intéressant sans Reznor, et si possible sans tout repiquer aux héros de sa jeunesse ? Holy Wood semble répondre par l'affirmative. L'album est un mélange judicieux des deux précédents, conjuguant leurs forces en esquivant leurs faiblesses. Le design est plus travaillé que jamais, et bien qu'on puisse y apercevoir une lueur d'espoir, on se demande déjà quelle pourrait être la prochaine étape ? Savant recyclage de tout ce qu'a pu proposer MM par le passé, il marque également ses limites. Pour l'heure, le chanteur comble les amateurs de ses deux opus précédents et livre des shows dantesques le long d'une tournée qui affiche cette fois complet un peu partout. Et maintenant que tout va bien, que le fric rentre et que le bonhomme est respecté, il est en toute bonne logique temps de se la couler douce et de faire de la merde.
 

A commencer par « Tainted love », reprise d'un classique qui tente de refaire le coup de sweet dreams, et dernière apparition du fidèle lieutenant Twiggy Ramirez, compositeur principal, qui s'en va voir si l'herbe est plus verte chez A perfect Circle avant de jouer live avec... NIN. Outre une version sans grand intérêt, Manson y apparaît comme un poseur de pacotille tout juste assez rebelle pour faire râler les parents les plus récalcitrants, à des lieues de tout ce qu'il a pu représenter. Surfant sur le succès de son prédécesseur et porté par plusieurs singles à succès, The golden age of grotesque est un carton bien qu'il ne contienne que 3 bons titres, la tournée qui suivra voyant le groupe quitter le zénith en France pour passer à Bercy, devant des hordes d'adolescents déchaînés et peu regardants. La production scénique est faiblarde, et l'attitude du frontman, qui est sur scène comme dans ses clips, commence à agacer. Mais il faut bien que jeunesse se passe, et puis à ce stade, on peut encore espérer qu'il ne s'agisse que d'une erreur de parcours, d'autant que l'artiste a d'autres envies : après s'être mis à la peinture et avoir réalisé plusieurs vidéoclips, il envisage de tourner un long-métrage sur Lewis Carroll. Le projet est depuis plus ou moins en stand-by, sans que l'on sache si le chanteur va finalement trouver les moyens et le temps pour en venir à bout. Pourquoi pas ? Peut-être que le garçon s'est juste trompé de média pour s'exprimer.

 

Moins honteux que son prédécesseur, Eat me Drink me n'en reste pas moins un album raté, son lot de chansons sympathiques ne parvenant pas à masquer la totale vacuité du reste. Lors de la sortie de l'album, Manson est au sommet de sa gloire et est apparemment convaincu de ne plus avoir besoin de se fatiguer. Bien qu'il clame avoir voulu se mettre à nu sur cet album et exprimer des sentiments très personnels, un single aussi abominable que « Heart-shaped glasses » ne nous donne pas envie d'en savoir plus. Et toujours ces concerts à l'économie, qui ne dépassent plus les 1h15, qui ne présentent plus de nouveaux artifices rigolos, non, vraiment, le cœur n'y est plus. Honte ultime chez nous,le chanteur se retrouve à la télévision française chez Cauet à faire le guignol. Il a belle allure le « god of fuck  ! Car in fine, Manson est bien plus un people qu'un musicien. Certes, ce n'est pas le seul, ce n'est pas le premier, mais c'en est un. Outre que ça sent la fin de règne à plein nez, les ventes commencent à baisser. Mais comme chacun sait, l'important n'est pas la chute.

Il est assez ironique de constater que plus Manson cherche à proposer une musique personnelle, plus ses albums sont mauvais. Une lueur d'espoir apparaît avec le retour de Twiggy Ramirez : le duo est réuni et ça va péter ! Pétard mouillé. The High end of low est une immense déception et dispute à Golden age... le titre peu envié de pire album de double M. Cette fois, c'est le drame. Le public ne suit plus du tout. MM ne choque désormais plus personne, et sans les médias pour lui faire sa promo, tout son système pour rester en haut de l'affiche s'effondre, sa musique ne se suffisant pas à elle-même. Sans album solide depuis trop longtemps, avec des concerts qui ne trompent plus grand monde, son image sacrément écornée, le chanteur semble perdu à la croisée des chemins, sans vraiment savoir quelle direction emprunter. Pour la première fois depuis 2001, Manson ne se produit pas à Bercy mais dans un zénith même pas complet, alors que des shows sont annulés faute de réservations. La honte ultime, Marilyn Manson se fait jeter de sa maison de disques pour ventes insuffisantes, avec un nom aussi célèbre que le sien et après avoir vendu 50 millions d'albums. Je connais pas les chiffres de vente de The High end..., mais si vous voulez mon avis, y a du record de profondeur en vue.

Moralité : Manson, bien qu'il soit devenu une caricature de lui-même et se soit dangereusement rapproché des rockstars institutionnalisées et ringardes qu'il se faisait un plaisir de dégommer au début de sa carrière, peut toujours compter sur un nom célèbre, faire des tournées, et avoir son petit succès en festival. Et en habile gestionnaire qu'il est est, il se doit de nous faire le coup du « retour aux sources mais pas tant que ça parce que quand même ». C'est bien le rôle de Born Villain, sorti ce mardi chez Cooking Vinyl. Opération reconquête en marche, reste à la mener à bien. Le hic, c'est que Manson apparaît obsolète, pour ne pas dire complètement à côté de la plaque. C'est tout le problème avec un artiste qui n'a jamais vraiment su s'imposer par et pour lui-même. Rentré dans le paysage, double M ne choque plus personne et l'attrait du personnage fait cruellement défaut à sa musique. Une reconversion pourrait s'avérer salutaire... Parce que Born Villain, orné d'une pochette atroce qui tente de rattraper le wagon Twilight/image vaguement vampirique/emo sans même s'en cacher, ne réhausse pas assez le niveau.

 

marilyn manson, born villain

Le premier single « No Reflection » annonce une couleur eighties avec un rythme sautillant, sans parvenir à enthousiasmer vraiment malgré un final plus sombre que ce à quoi on a été habitués ces derniers temps. Il faut dire que tout ça a déjà été vu et entendu ailleurs. Plusieurs tempos lents s'avèrent être un terrain idéal pour redéployer l'attirail du révérend : voix menaçantes, ambiances glauques et déglinguées dotées d'un petit rendu old-school pas désagréable (« Slo-mo-tion », « the Gardener »). Le dépouillement leur va bien et il est finalement plaisant de découvrir Manson dans un environnement apaisé, propice au retour d'un petit feeling rock'n roll appréciable (« The Flowers of evil »). Sans atteindre les meilleurs moments de sa discographie, le groupe a retrouvé un semblant d'inspiration et d'honnêteté, de simplicité. « Lay down your goddamn arms » et la chanson-titre s'avèrent même être du bon Manson. Le très bourrin « Murderers are getting prettier every day », plus proche de Ministry que d'autre chose, fera plaisir aux nostalgiques. Pour autant, pas la peine de s'attendre à un retour à l'indus' pur et dur puisque ce sera la seule incartade sur ce terrain.

Les influences revendiquées par double M sont Joy Division, Killing Joke ou encore Bauhaus, et il faut bien reconnaître que ce nouveau visage soigneusement rétro (ben oui, le rétro c'est à la mode) colle assez bien avec le son typique du groupe. Malheureusement, ces quelques moments sympas sont rattrapés par une collection de titres insipides qui voient le révérend recycler ses gimmicks sans conviction. « Hey cruel world », qui ouvre les débats, ne vaut pas vraiment mieux que « If I was your vampire » sur Eat me drink me, terriblement conventionnelle, dénuée de patate, impossible de ressentir le moindre frisson devant ce qui aurait dû rester une face b. « Overneath the path of misery » est marqué par un accord de guitare saturé qui aboutit sur une montée en puissance peu efficace et un gros refrain, soit la construction typique d'une chanson de MM. Le manque de conviction n'aide pas à accrocher, comme si le révérend et son équipe avaient composé ces titres histoire de caresser ce qu'il leur reste de fans dans le sens du poil, sans que ce genre de trucs les motive autant que le reste. Pas grand chose à dire de plus devant le pénible « Children of Cain » qui à force de jouer la lenteur se transforme en invitation à zapper.

 

Outre que des titres sans intérêt nous fassent régulièrement sortir de l'album, le reste est certes sympathique mais ne crève pas les plafonds non plus. Les mélodies, sans être désagréables, n'ont rien de transcendant, et bien que mises en valeur par le côté relativement dépouillé de la prod', auraient mérité d'être plus travaillées. « You're so vain », qui conclut l'album, peut être vue comme une injonction que la star s'envoie à elle-même : sans être aussi honteux que son prédécesseur, Born Villain ne casse pas la baraque et ne rassure personne quant à la capacité de Manson à effectuer un come-back pleinement convaincant. Le retour à une image un tant soit peu provocante sera-t il suffisant ? La musique n'a jamais été son point fort, et s'il a toujours su s'entourer de collaborateurs talentueux, il a aussi veillé à toujours avoir le dernier mot. Certains parviennent à fonctionner de cette façon, comme Alice Cooper, autre touche à tout fameux qui quand Rock Sound lui demandait ce qu'il pensait de MM en 1996, répondait par un magnifique : « Ce mec s'est pris un nom de nana et se maquille. Voilà qui est vachement original ».

A ce petit jeu, il n'est pas interdit de penser que MM n'est pas aussi doué. Ou que comme son aîné, il va poursuivre sa baisse de régime jusqu'à sortir son Thrash, qui le propulsera de nouveau en haut des charts ? Il faudrait pour cela que le personnage réussisse à se réinventer, voire laisse de côté son image médiatique pour se concentrer sur sa musique afin de parvenir peut-être à pondre autre chose qu'une poignée de bonnes chansons. Jamais tout à fait mort, surnageant péniblement dans le flot des productions actuelles, MM poursuit sa traversée du purgatoire. Ses efforts pour se tourner vers un rétro très en vogue pourraient lui valoir une certaine reconnaissance du public bobo des grandes stations FM. Et si l'argent n'a pas d'odeur, se dire que Manson joue peut-être aujourd'hui principalement pour le public qu'il traitait de tous les noms au début de sa carrière n'en laisse pas moins un sale goût dans la bouche. A chacun de décider s'il aime suffisamment le bonhomme pour lui pardonner les nombreux retournements de veste d'un artiste qui, mais il fallait s'y attendre, a terriblement souffert des outrages du temps.

Born Villain : 6,5 / 10
 

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NOTE DE L'AUTEUR : 6 / 10



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