Eurockéennes 2017: Jour 2


Belfort, site du Malsaucy, jour 2. La météo est plutôt clémente, les orages annoncés ont décidé d'aller se faire voir ailleurs, et c'est tant mieux. Au programme de cet après-midi, on trouvera du rock stoner-blues, du Punk, du Rap, du Métal, de la chanson... Bref un mélange de styles qui aura pu effrayer les puristes, mais qui, avec le recul, donnera au contraire à manger à chaque festivalier.

 

All Them Witches
Loggia, 18:15


Par Yannick kRockus

Cette année, la scène de la Loggia a déménagé. D’annexe de la grande scène, elle est partie complètement à l’opposé du site, ne ménageant pas ainsi les jambes des festivaliers. Elle occupe désormais la place stratégique de première scène visible, juste derrière l’entrée. Aussi, quelle belle introduction que d’être accueilli, ce vendredi, par All Them Witches. Les américains viennent de Nashville, et à ce titre ont été bercés au Blues canal historique, au vrai. Le quatuor s’en donne à cœur joie d’ailleurs. Même si leur style va plus chercher du côté Stoner, il reste mâtiné de pentatonique et autre slide, histoire de bien montrer d’où ils viennent.

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All Them Witches - Photo © Christian Ballard

L’heure de passage correspond à l’arrivée en masse des festivaliers, le public se masse doucement. Le stand de houblon ne désemplit pas, idéalement placé. On apprécie la qualité du son,  une vraie angoisse au vu des précédentes éditions. Et on se laisse prendre au jeu des All Them Witches. Tantôt gros son stoner, tantôt jouant avec des sonorités d’outre-tombe, en jouant aussi avec de savantes dissonances, et en allant chercher quelques influences du côté de Rage Against The machine moins énervé, le combo sait également jouer avec le morceau sur un accord.

Tu l’auras compris, cette mise en jambe est fort agréable, très variée, et bien rock’n’roll. All Them Witches, un nom à retenir.

 

Idles

Grande Scène, 19:00


Par Yannick kRockus

Idles, c’est la grosse claque de ce vendredi. Les Eurocks ne sont pas morts, l’esprit de rébellion auto-proclamé reste d’actualité. Bien sûr il faut un peu plus chercher que par le passé, mais il existe encore. Pour preuve, le passage de ces 5 dingos, tout droit sortis d’un porno des années 80. Idles, c’est tout à fond, sans limite. Du Punk british, fidèle aux traditions. Des tenues vestimentaires élégantes au siècle passé, un guitariste qui saute partout, favoris au vent, et chemise flamboyante en étendard. C’est un chanteur à la voix cassée, aux yeux visiblement émus par la bouteille de Jack qu’il tient solidement en main, et qui est soit percée, soit victime de la chaleur et de l’évaporation ambiante, si on en croit le niveau qui baisse dangereusement. C’est aussi une section rythmique qui a sûrement fait des stages dans une scierie au Canada, vu leur connaissance de la science du fracassage en règle. C’est un guitariste/choriste qui fati des bruits de poule lorsque le chanteur descend dans la fosse offrir un peu de Jack.

 

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Idles - Photo © Olivier Tisserand

Chose plutôt rare, le chanteur a fait l‘effort de parler français tout au long du set, à grands coups de "merci" et de "nous sommes le meilleur groupe du monde". Ce qui, à ce moment du concert, semblait totalement vrai. Le set s’achève avec un solo de batterie à l’ancienne, puis par un morceau qui verra le second guitariste vérifier la sympathie du public, porté par celui-ci à travers la fosse. Un set de pure folie, que malheureusement le public a un peu boudé. Mais ceux qui étaient là s’en rapelleront.

Le groupe n'est pas venu que faire du bruit, il distille également ses messages, à grands coups dans la gueule de l'establishment. Le Punk-Rock sauvage du combo est dévastateur, ça sent des pieds, ça gratte derrière les oreilles. Ici, point de fioritures, que du droit devant. Petits-fils des Ramones et des Pistols, les Idles ont réussi leur sortie. Salvatrice.

 

Alkapote et Lorenzo

La Plage, 18:30


Par Charliedub

Depuis qu'on a découvert Alkpote et Lorenzo et leurs punchlines qu'on qualifierait de crues, pour rester poli, et qu'on s'est aperçu qu'ils étaient programmés l'un à la suite de l'autre dans le cadre du plateau "So Fresh, So French" (qu'on rebaptisera pour l'occasion rap white trash), on n'a pas hésité une seule seconde et on a foncé à La Plage. En gros, Alkpote et Lorenzo, ce sont deux rappeurs qui n'en ont rien à foutre du politiquement correct. Peut-être est-ce leur façon de faire de la politique justement, puisque de politique, il n'en est point question avec eux. Alkpote déroule son flow imparable devant son public qui venait tout juste de découvrir son dernier opus Les Marches de l'Empereur sorti le jour même, pendant que son DJ diffuse en boucle les fameux samples "putes" qu'on entend en permanence sur ses productions. Son hit "Amsterdam City Gang", sorte de ganja tune hip-hop, sera repris par cœur et en chœur par tous ses fans et qui annoncera la venue de Lorenzo, un autre empereur, mais celui du sale.

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AlKapote - Photo © Jeremy Cardot

Le Rennais nous aura agréablement surpris par sa détermination et sa façon de se comporter avec son public qu'il appelle "Mamène". Prompt à faire partager sa "weed cosmique", il invite un spectateur à monter sur scène pour lui faire goûter, mais, chose la plus improbable parmi les choses les plus improbables que même les reptiliens n'auraient jamais pu planifier, il aura quand même réussi à faire exécuter un circle pit et un wall of death à une bande de gamins (la moyenne d'âge de son public tourne autour de 16 ans) complètement étrangère à la culture metal. Et là, on dit respect Lorenzo.

Épaulé par une bande de MCs qui s'agitent sans cesse sur scène, le jeune rappeur aura balancé quelques-uns de ses meilleurs titres, non sans en rappeler la genèse pratiquement à chaque fois et de s'acharner sur la victime à qui sont dédiées ses punchlines. En effet, bien que sa plume soit sévèrement affûtée, les textes de Lorenzo sont bien évidemment à prendre au second voire troisième degré. C'est ainsi que les babs en prendront pour leur grade dans "Sale Babos de Merde" ou que sa "Beurette de Luxe" se fait salement (au sens lorenzien du terme) courtiser. Et pour clore son spectacle, avec comme décor, une enseigne de kebab, Lorenzo ira jusqu'à interpréter quatre ou cinq fois de suite son fameux "Freestyle du Sale" mais sans sombrer dans la saturation ou la lassitude. Lorenzo a mis le feu aux Eurocks en général et sur La Plage en particulier et il reste sûrement l'un des rappeurs (avec Killason) qui s'en est le mieux sorti au cours de ces quatre jours. Booba n'avait qu'à bien se tenir le lendemain.

 

H.F. Thiéfaine

Grande scène, 20:45
 

Par Yannick kRockus

5ème passage aux Eurocks pour le taulier. Venu en voisin, Thiéfaine a voulu faire de ce concert un évènement. Après avoir testé la formule symphonique il y a quelques temps, il reconduit l’affaire, et sera donc accompagné par l’Orchestre Victor Hugo de Franche Comté. 28 musiciens qui vont apporter une touche majestueuse au concert.

Tout de noir vêtu, Thiéfaine commence son show par "En remontant le fleuve". Le côté symphonique apporte une force, une puissance au texte, malgré sa sonorisation un peu faiblarde. C’est d’ailleurs un regret, autant le son du groupe électrique est parfait, autant l’ajout de la touche symphonique aurait mérité un soin particulier au niveau de la console.

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Thiéfaine - Photo © René Garcia

Thiéfaine est un OVNI dans la planète rock. Toujours indépendant, sans jamais une interview, sans passage télé, avec quelques radios bien choisies, il a construit une solide renommée, prouvant ainsi que le talent reste aussi efficace que les promos bastonnées à longueur de temps. Mais quel talent ! Et quelle force dans les textes. Thiéfaine reste un contemplatif, mais avec lucidité. « Si je ne devais jouer qu’une chanson pour résumer l’état du monde, ce serait celle-là », lance-t-il, avant de démarrer "Médiocratie". Un autre morceau sur la torture des enfants dans les camps Staliniens, un rappel à la mémoire de Tchernobyl et Fukushima, "en attendant Fessenheim", les prises de positions restent claires.

Thiéfaine proposera un set équilibré, entre morceaux récents et anciens. La fin du set ira plus faire appel à notre mémoire, avec « Femmes de Loth », « Alligator 427 », « Je t’en remets au vent » démarré seul à la guitare, et l’incontournable « fille du coupeur de joints ». Un concert savamment dosé, avec toujours la touche guitare (quelques très bons solos seront distillés), et une force symphonique pour mettre en exergue la poésie du monsieur.

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Thiéfaine- Photo © René Garcia

Côté public, le framc-comtois a encore fait le plein. L'esplanade de la Grande Scène est pleine, et l'enthousiasme est à la hauteur de l'évènement. Les anciens morceaux sont visiblement toujours mieux accueillis. Comme Thiéfaine le disait lui-même, à partir d'un certain moment, ces morceaux ne lui appartiennent plus, et il est impensable de ne pas les jouer. Et pourtant ce n'est pas frustrant, les nouveaux se mélangent bien, pour une mayonnaise toujours délicate et légère.

 

Gojira
22:15, Green Room


Par Charliedub

Gojira, pour nous, c'est LA grosse claque de ces Eurockéennes.  Gojira sur scène ça vous marque à vie, pour une seule et unique raison, c'est que ça groove à mort. Une section rythmique incroyable qui vous fait comprendre que même si vous êtes étranger au metal (et que vous connaissez uniquement Metallica, Iron Maiden ou l'une des grosses sensations des Eurocks version 2015, en l'occurence Parkway Drive), vous n'avez pas besoin d'être expert en la matière pour pouvoir apprécier la musique de Gojira. En fait, lorsque vous arrivez au milieu de la foule et que vous voyez tous les fans reprendre les morceaux par cœur alors que vous n'y connaissez à rien à rien, vous sentez que vous allez vivre un grand moment de solitude.

Pourtant, vous kiffez grave la musique et il faut montrer que vous vous y intéressez un minimum. Alors vous relevez un peu la tête (au sens propre et au sens figuré), et vous finissez par vous sentir moins con, parce que vous commencez à fixer le batteur qui vous fait complètement halluciner et vous ne scotchez que sur lui pendant 10 minutes, parce que vous sentez quand même que vous êtes en train de vivre un moment inédit. Vous ne pouvez pas voir ses pieds mais vous entendez qu'il utilise la double pédale avec maestria sans en rajouter des caisses (oui, le jeu de mots est facile) et que cette exécution est si limpide et tellement fluide : mais en fait c'est facile de jouer de la batterie, nan ?

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Gojira -  Photo © Jeremy Cardot

Le bassiste, tellement déchaîné que vous avez l'impression qu'il torture son instrument alors qu'il ne fait que le caresser, l'accompagne dans ces moments de gloire, et l'on en arrive à la conclusion que la section rythmique de Gojira est peut-être l'une des meilleures au jour d'aujourd'hui tous genres confondus. Et comme nous l'évoquions hier à propos de DJ Snake, les quatre Landais ne "se sont pas foutus de la gueule" (dixit le chanteur) de leur public, puisqu'ils ont ramené fumée, feux d'artifices, etc pour orner leur show.

Mais à l'image de leur musique, les Gojira ne sont pas tombés dans la caricature avec ces agréments, ça nous semble normal. Le collectif du Sud-Ouest a finalement aboli la distinction entre rock et metal, si tant est qu'elle ait existé un jour, ce qui explique sûrement leur succès croissant auprès d'un public plus large (comme nous) et de leur nomination aux Grammy pour leur dernier album. C'est d'ailleurs la seule fois de notre vie où l'on a pu voir un fan en fauteuil roulant slammer au-dessus de la foule. Et ça, ça force le respect. Promis, pour notre prochaine rencontre avec Gojira, on aura révisé les morceaux et on pourra vous en parler plus en détail.

 

Gucci Mane
La Plage, 23h45

 

Par Charliedub

Gucci Mane, c'est notre grosse déception de ce deuxième jour. Pourquoi ? Tout simplement parce que le rappeur originaire de l'Alabama aura été inexistant durant toute l'heure qu'il aura été présent sur la scène de La Plage. Et encore, si justement son set devait initialement se dérouler entre 23h45 et 0h45, Gucci Mane ne sera intervenu qu'approximativement...une demi-heure. Une demi-heure ? Mais que s'est-il passé ? Retardement ? Problème de son ? Inondation de La Plage ? Que nenni, rien de tout cela. Gucci Mane a simplement décidé de faire sa star, de faire son Cain-Ri et de laisser à son DJ le soin d'assurer à lui seul la quasi-totalité du show.

Résumons : le public se presse massivement devant la scène aux alentours de 23h30, puis le DJ arrive et commence à chauffer les spectateurs avec des "Hands up !" et en passant quelques morceaux du chanteur : jusque-là, rien d'anormal. Mais alors que l'heure tourne et que Gucci Mane ne daigne toujours pas se montrer, on commence à se dire s'il ne serait pas légèrement en train de se foutre de notre gueule. Ça y est, Gucci Mane arrive en van à 0h05 (quand même) et ne va interpréter qu'une poignée de titres dont le célèbre "Lemonade" qui ne nous aura d'ailleurs guère réjoui. D'autant plus qu'à l'instar des PNL, autres artistes hip-hop tant attendu de cette édition des Eurockéennes, Gucci Mane n'aura fait qu'acte de présence sans se dépasser : la nonchalance dont il a fait preuve et le fait de rapper avec la bande sonore en fond renforcent cet état de fait. Il repartira vers 0h35 tout comme il était venu avec la désinvolture la plus totale.

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Gucci Mane - Photo © Rafael Lobejon

 

The Geek x Vrv
Loggia, 0h45


Par Charliedub

C'est Pfel et Greem de C2C qui, lors de notre interview en novembre dernier, nous avaient parlé de ce "collectif boom-bap à la sauce moderne". On était donc curieux d'en savoir un peu plus sur ce crew sachant qu'on ne connaissait pas du tout ses productions. Et notre curiosité a été pleinement satisfaite. The Geek VrV sur scène, ce sont donc deux machinistes, un brass band (trompette et sax baryton) et un clavier qui peut parfois prendre lui aussi le saxophone. Basée sur des beats boom-bap et old school (on entendra un sample de "The Next Episode" de Dr Dre comme la veille avec Mick Jenkins), mais également sur des prods plus future beat et breakbeat (voire même dubstep), c'est-à-dire, plus electro et plus anglaises, la musique de The Geek VrV pourrait se résumer comme du C2C version live (c'est ainsi qu'on a même eu l'impression de revivre, en moins conséquent, le concert de C2C sur la Greenroom en 2012), comprenez des instruments mêlés aux machines, les scratches en moins ; on retrouve même un peu de Peuple de l'Herbe dans le son de The Geek VrV, principalement via la trompette.

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The Geek x Vrv - Photo © Christian Ballard

Mais on retiendra surtout avec le collectif que ça envoie de grosses basses, que ça puise autant dans le disco ou le funk pour le groove, que ça sample de vieux titres soul, ou comment faire du neuf avec de l'ancien, bref que c'est éminemment dancefloor. Le public ne s'y est trompé, puiqu'il était plus motivé que jamais face à cet electro capable de faire bouger les plus réfractaires. Les cinq artistes nous auront par conséquent bien plus convaincus en cette fin de soirée pour faire danser les foules, que la pop soporifique de La Femme ou que l'electro tout aussi ronflant de Moderat. On pouvait aller se coucher tranquille.

 

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