U2 – Songs Of Experience


U2, ceux que l'on se plait à fustiger pour leur côté grand public et trop radio-power, preuve d'une certaine hypocrisie de notre part tant la qualité est souvent au rendez-vous. Sans tout aimer, sans toujours retrouver ces titres qui d'une certaine manière vont nous accompagner dans de nombreux moments, on a toujours cette impatience face à la sortie d'un nouvel album, on sait que l'on va ressentir la passion et le déchirement. Quoique...

U2, ce groupe autant adoré qu'on aime le détester, pour des raisons qui semblent légitimes mais en soi ne concernent aucun jugement réellement musical. Le côté "mecs simples des membres" là où les shows en stade suintent l'arrogance de gus pleins aux as, la surmédiatisation de Bono voulant tellement être sur tous les fronts qu'on doute sérieusement de sa sincérité, tant de choses qui font qu'avant même d'avoir pu entendre la moindre note d'un nouveau titre, on les a déjà condamnés sur tous les bords, à l'instar des défenseurs qui quant à eux en rajouteront des caisses de mauvaise foi pour mettre le groupe sur un piédestal que lui-même "prétend" ne pas vouloir.

Sauf que justement, au-delà de toutes ces considérations sordides sur leur aspect people que l'on ne peut s'empêcher d'avoir, fléau moderne dont on devrait se foutre royalement, il y a les artistes, ceux qui ne font que faire évoluer leur musique, la travailler pour que l'empreinte qu'ils laisseront dépasse largement cette image futile qui, elle, disparaîtra. Et sur ce point là, U2 est un sacré exemple. S'adaptant à leur époque quels qu'en soient les retours (on se souvient de l'excellent Pop face à sa tentative ratée Zooropa), déconstruisant régulièrement leur style pour offrir leur nouvelle vision. Chaque album s'éloigne, divise de par son nouvel aspect avant de s'imposer pour ce qu'il est, en rappelant les couleurs musicales similaires que l'on aime chez U2.

On l'aura vu particulièrement dans les derniers efforts, une écoute se passe en deux temps, celle du refus, puis celle de l'adaptation et de la reconnaissance. Songs Of Innocence avait eu du mal à nous faire oublier l'excellent No Line On The Horizon malgré ses qualités, et si Songs Of Experience aura du mal à attirer l'écoute, perturbée par son prédécesseur, il se détachera vite. Reste à savoir pourquoi.

Avec cet album, U2 atteint le paroxysme d'une comparaison allant pourtant dans son sens. Depuis l'album X&Y, marquant l'explosion malgré une réputation déjà solide de Coldplay, il a toujours été commun de comparer musicalement ces derniers comme étant les nouveaux U2. Avec leurs chœurs bigarrés et leurs couleurs chatoyantes, les Irlandais viennent de sortir un nouvel album de Coldplay. Comparaison loin d'être négative d'ailleurs, tant le style peut aisément s'y noyer, et les compositions se prêtent agréablement au jeu, faisant de ce Songs Of Experience un album qui s'écoute sans accroc...
 

U2, Coldplay, Bidi, Bono, Randy Marsh, Songs of Innocence

... Mais aussi sans grande passion. En effet, ce côté passe-partout lasse terriblement vite, et fait qu'aucun morceau ne marque également. On est content de retrouver la voix de Bono, puissante à souhait, les guitares de The Edge et leur son particulier, mais au-delà de ça, que retient-on vraiment ? Les titres sont noyés dans une production bourrée d'effets en tous genres, que ce soit sur les échos que certains passages vocodés, qui ne seront pas toujours du meilleur goût tant l'artifice est utilisé pour correspondre à la mode, et pas de manière intelligente. On ressentira quelques profondeurs par-ci par-là, mais parsemées tellement timidement qu'il faudra pousser la recherche pour les retrouver lors de la seconde écoute.

Du coup, on en revient à l'image, celle de ce groupe qui, que ça plaise ou pas, tente des choses. On ne peut pas leur retirer leur côté "poppy", qui avait donné la bourde All That You Can't Leave Behind mais aussi l'excellent How To Dismantle An Atomic Bomb, chose qu'on leur reprochait moins tant tout était fait sous le joug d'une sincérité indéniable. Ici, et le titre en était un indice, on est face à un "Song Of Innocence 2.0", plus aseptisé, plus lisse, bien moins branlé et, de fait, bien moins intéressant. On se souvient d'un Bono déclarant qu'au stade atteint, ils ne sortiraient un album que s'ils y croyaient réellement, que rien ne sert d'écrire quelque chose qu'ils ne défendraient pas corps et âme. On attend la ligne de défense, qui n'aura pour la sauver que l'écriture, mais on ne nous enlèvera pas l'idée qu'on se tape des face B mal réarrangées.

Et la question reste entière : que retiendra-t-on de cet album ? Une fois la tournée passée, où tout ne sera peut-être finalement resté en tête, les radios ne martèleront plus que "Where The Streets Have No Name" et ses consœurs, et le groupe lui-même ne jouera plus de ces nouveaux titres. Quand on se rend compte qu'on préfère une tournée putassière sur The Joshua Tree, qui démontre du manque d'inspiration et le repos sur les classiques en offrant une prestation lisse ne jouant que sur notre propre nostalgie, à un recueil de nouveaux titres qui à part faire la musique d'ambiance de nos toilettes un jour de pluie va bien prendre la poussière et nous faire regretter l'achat, c'est qu'il y a un truc dans la soupe, et visiblement pas de l'inspiration. Quand le seul constat positif que l'on fait reste en comparaison de Coldplay, à savoir "Au moins ça s'écoute, c'est pas Viva La Vida", ça en dit long sur l'intérêt du sujet. 

Sorti le 1er décembre chez Island

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NOTE DE L'AUTEUR : 4 / 10



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