Festival Mo’Fo aux Mains d’Oeuvre – vendredi 19 janvier 2018

Évacuons les regrets d’entrée de jeu, tout à l’honneur du MO’FO : la première soirée de la veille était presque tout entière consacrée à l’ambient, au jazz, aux musiques électroniques d’inspiration mondiale… Et nous, on a mangé deux tunnels de rock et d’électro solide et classe en immense majorité. C’est qui le patron ? Le pingouin du MO’FO – lequel a pris la place du T-Rex de l’année dernière, nouvel avatar dans la série animalière du festival. Succès critique et public, couvert par Les Inrocks ou Telerama, nul doute que malgré les démêlés de Mains d’œuvres avec la mairie de Saint-Ouen pour maintenir leur bail, le MO’FO ne sombrera pas si facilement. Récit de deux soirées de grande qualité.  

La claque d’entrée de jeu – confirmant l’adage qui veut que se rendre tôt en festival est l’assurance de découvertes intimistes : Autisti. Enfin, intimiste. La foule est clairsemée, mais ça, Autisti s’en fout, et déboule à toute berzingue avec une rage immédiate et une générosité rare. Possédés, délirants mais sans la moindre affectation, les Suisses Louis Jucker (guitare et chant), Emilie Zoé (clavier, guitare et chant) et Steven Doutaz (batterie) semblent avoir formé ce projet pour faire du rock ensemble. Et juste pour faire du rock ensemble.

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Autisti
 

Chacun évolue de son côté dans des projets divers, la com’ et le merchandising sont foutraques comme tout (portraits promotionnels par-dessus la jambe, affiches dessinées à la main, cassettes enregistrées live, discours gentiment absurdes – dont justement une sombre et hilarante histoire d’enregistreur qui crame pendant la tournée française et se solde par la possibilité de précommander la cassette du concert pour un envoi postal à domicile…) et leur musique est imparable. La prog’ du MO’FO parle de « DeLorean suisse de l’indie-rock 90’s » ; mais pas de voyage dans le temps classieux, pas de retro chromé ici. Un son dégeu et une foutue énergie, qui effectivement va brasser du côté de Dinosaur Jr, Sebadoh et cie ; mais passe avec une telle fraîcheur des raclements punk speed à de lourds riffs hard (joie naïve de la guitare devenue si rare dans le milieu « indie » !), de mini fiestas hyper saturées à une balade lo-fi aux voix crucifiées, qu’on oublie vite toute référence asphyxiante.

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Alors en terme d’image automobile, on penserait plutôt à la vieille Ford fiesta pourrie récupérée auprès de papa, surtaguée et squattée durant d’interminables voyages autour des cols, les enceintes brinquebalantes couvrant à peine le bruit du moteur, les poumons brûlés par le grand air à force de hurler ensemble refrain sur refrain… Ajoutez à ça les sourires francs, les yeux pétillants et les joues cramoisies des musiciens lors des échanges au « merch’ » après le concert. Autisti. Aussi court, peut-être, que sera le projet, retenez-les. Et gardez l’oreille sur ce fantastique petit milieu rock de Lausanne.

Poison Point, après ça, est pour être honnête un peu difficile à avaler. Aux antipodes : post-punk aux inflexions vocales typiques, soutenu par un puissant synthétiseur basse et musclé à la techno. Avec ce duo parisien, on est là davantage dans un rétro impeccable. Mais la berceuse noire est tout de même pénétrante, somme toute assez psyché. Suffisamment pour se laisser aller à piétiner rêveusement. Comme on dit, « c’est quand même sacrément bien fait », ce qui doit rester un compliment.

Collé à la scène, on n'était pas loin d’avoir le nez dans les tifs des Lyonnais de Noyades. Quand on met du temps à se demander : « qu’est-ce que c’est ? », c’est que c’est déjà gagné.
 

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Alors, franchement, on se sait pas trop ce qu’on a vu ou entendu – sinon deux spectres chevelus ondulants entre les flashs lumineux, un batteur assez incroyable et constamment sur la brèche, et des guitares secouées et noyées, cas de le dire. Du shoegazing, de la noise, du hard rock psychédélique… On s’en fout, finalement. Ce fut un plaisir épileptique dégusté sans vergogne.

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La petite déception aura été Camera. Les titres publiés par cet ensemble allemand fleuraient bon le krautrock de qualité. On retrouve sur scène tous les ingrédients : batterie métronomique, clavier acide et moelleux à la fois, guitare à la compression un peu rétro, et même un sitar. Cependant le set met un temps fou, mais fou, à décoller… Quitte à proposer des plages ambiantes, autant s’en donner vraiment les moyens. Puis quand la cavalcade est lancée, elle cavale, justement, sans grandes variations. Et le sitar, on ne l’entend pas beaucoup. Bref, de deux choses l’une : soit l’on s’est calé la tête entre les enceintes, et on largue les amarres, pourquoi pas. Mais si l’on attendait qu’il se passe vraiment quelque chose sur scène, c’est un peu raté.

Alors on est allé se réveiller dans de la techno, de la vraie, de la bonne. Giant Swan vient de Bristol, et il y a bien quelque chose de très anglais dans cet accent punk, dans la maigreur poisseuse et tendue du chanteur tatoué et rasé. Pédales, machines à bidouilles sont étalées sur la table au centre, canettes de bières en-dessous, et le duo nous fait ça à l’ancienne. Musique indus’, drone, et techno puissante, rien à dire, ce qu’il faut pour méchamment danser. De quoi remplacer avantageusement plus de la moitié des DJ’s des clubs de Paris, sans exagération aucune.

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