Les Documentaires et la Musique

Pas évident de signer un bon documentaire sur la musique. Entre servir un peu trop la soupe aux fans d'un artiste et à sa légende (genre "This is it" sur Michael Jackson) ou bien simplement tomber dans la platitude qui ne touchera que les fans ("Twenty" sur Pearl Jam), rares sont les documentaires qui valent vraiment le détour. Je vous propose donc une petite sélection de mon cru, n'hésitez pas à proposer les titres de ceux qui vous ont botté, ce pourrait être l'occasion d'un volume 2 :

Dig! est un morceau de choix qui narre les frasques ubuesques de deux groupes qui montent (les Dandy Wharols et les Brian Jonestown Massacre). Plus qu'une fresque au vitriol sur l'industrie musicale, le film est davantage le portrait d'un artiste fou et hors du commun, à savoir Anton Newcombe. Lunatique, autodestructeur, musicien génial mais aussi cinglé, cette forte personnalité bouffe littéralement la pellicule et efface complètement le sujet du film. Vous pouvez oublier les calculs froids et prétentieux de Marilyn Manson, les pseudo-rebelles de tout poil, ce mec est un véritable taré rock'n roll, pour le meilleur et pour le pire. De tournées foireuses en rendez-vous catastrophiques avec les maisons de disques (il trouve même moyen de se foutre sur la gueule avec son guitariste lors d'un concert tout en sachant pertinemment que des exécutifs d'une major sont venus le voir), Newcombe traîne sa folie contagieuse et fout tout en l'air autour de lui, de manière gratuite, stupide et viscéralement sincère. La comparaison entre Newcombe et les Wharols, qui suivent un parcours plus conventionnel, est dès lors très simple. Alors, que les ces derniers se rendent compte qu'ils vendent de plus en plus leurs culs, et que le confort est en train de les empâtir petit à petit, Newcombe finit menotté dans une voiture de police, prenant conscience qu'il risque de ne plus jamais revoir son fils. Une pure représentation du rock' n roll, de sa décadence et de son désespoir.
 



Anvil (le nom d'un groupe de métal canadien) retrace la tentative désespéré des vieux de la vieille de percer (enfin) dans le milieu. Ayant eu un certain succès au début des années 80, le groupe tombe peu à peu dans l'oubli, ne réussissant jamais à concrétiser ce qui semblait leur revenir de droit : la réussite. Bien qu'ils aient tout sacrifié à leur passion sans jamais réussir à concrétiser leur rêve et continuent envers et contre tout à tourner devant des audiences faméliques, les deux potes de toujours Steve Kudlow et Robb Reiner, fondateurs du groupe, tentent le tout pour le tout en enregistrant un nouvel album qui ressemble fort à une carte de la dernière chance. Petit problème, les deux confrères n'ont pas un rond et enchaînent les petits boulots entre deux tournées lilliputiennes. De quoi laisser rêveur quand l'intro du film nous montre un parterre de stars (Slash, Lemmy, Lars Ulrich) chanter les louanges de ce groupe déchu. Touchant à l'extrême, cette ode à la galère est une vraie claque sentimentale, passant du rire aux larmes avant de finir sur une lueur d'espoir. Le temps d'un film, et sans s'en rendre compte, on a partagé avec ces hurluberlus ce rêve fou et insensé, cette vision, cette envie sans faille qui fait pitié tout autant qu'elle force l'admiration. Un film que tout musicien amateur devrait visionner pour bien se rendre compte des risques insensés que l'entêtement de ces deux gugusses leur fait prendre et qui mériterait une suite, tant le petit succès du groupe en festival de ces dernières années est paradoxal, puisque de nombreux spectateurs ne viennent les voir que pour admirer les personnages qu'ils ont découvert sur leur écran et se contrefichent de leur musique. Qu'en sera-t il dans 5 ans ? Anvil va-t il réussir à concrétiser ce regain d'intérêt ? Si le réalisateur et les musiciens sont d'accord, on retrouvera avec plaisir nos vieux briscards pour une nouvelle rasade.
 



Some Kind of Monster, consacré à Metallica porte décidemment bien son titre. Les four Horsemen ont tout vu, tout fait, tout vécu, tout surmonté, sauf... une dépression? Véritable thérapie de groupe (au propre comme au figuré), le film nous montre ces monstres sacrés sous un angle inédit et paradoxal. Inédit, car les membres sont mis à nus les uns après les autres (dont un coming out hilarant de Kirk Hammett), revenant sur leur parcours, leurs vieilles querelles, leurs peines, leurs regrets. Ces figures mythiques, que l'on ne connaît qu'au travers de leur musique, des images de concerts dantesques et des clips passés en heavy rotation sur MTV nous sont ici montrés comme des êtres humais comme les autres, dans une période de tensions extrêmes. Et Paradoxal, puisqu'il est plus question pour tout le monde (hormis les musiciens qui cherchent à sauver leur groupe) de remettre en route la machine à fric énorme qu'est Metallica plutôt que de donner une  aide réelle aux personnes qui se cachent derrières ce statut de vaches sacrées du métal. Un grand cirque médiatique cruel, qui finira sur la reprise du groupe via un nouvel arrivant, preuve que Metallica is back, et qu'il faudra bien évidemment se jeter sur leurs nouveaux albums et places de concert. Au-delà de cet aspect qui fait tout le sel de ce documentaire, on retiendra également de très beaux moments d'humanité, notamment les échanges (malheureusement pas assez longs dans le montage final) entre un Ulrich ému aux larmes et Dave Mustaine qui reconnaît presque 20 ans après face à son ancien compère qu'il aurait tout donné pour réintégrer son groupe de coeur. Et puis voir Ulrich (encore lui) mettre sa tête à 3 centimètres de celle d'Hetfield (qui alors a particulièrement mal à la gueule) pour lui balancer ses 4 vérités, ça n'a pas de prix.
 


Dans le style média putassier, Kurt and Courtney est un véritable fleuron du genre. Reprenant une pseudo enquête (à savoir l'éventuel meurtre de Cobain), le réalisateur Nick Broomfield s'intéresse de très près à la veuve opportuniste de Cobain, Courtney Love, et s'acharne à trouver des indices qui tendraient à montrer qu'elle a pu jouer un rôle dans ce qui serait non pas un suicide mais un assassinat. Que dire de l'acharnement de la blonde, soi disant favorable à la liberté des médias, de mettre sans cesse des bâtons dans les roues du réalisateur ? Ou bien de l'acharnement de ce même réalisateur, Nick Broomfield, de fouiller dans les poubelles de madame Love et de faire équipe avec des paparazzis peu reluisants ? Quid encore de cette fantastique galerie de paumés parlant de tout et de rien, prétendant avoir connu Kurt Cobain, ou bien son assassin ? Reste les quelques fragments du leader de Nirvana, parsemées ici et là, offrant au métrage ses seuls instants de sincérité dans tout un brouhaha d'artifices, car on parle ici de tout sauf de musique. *il n'est pas question ici d'adopter le point de vue extrêmement discutable du narrateur/réalisateur, mais bien d'observer comment tout un chacun se tire dans les pattes et ne cherche que son propre intérêt en faisant parler de lui. Mais le film a cette qualité, et non des moindres, d'être à l'image de l'icone Cobain et du groupe Nirvana : sale, déchiré, déprimant. Il nous offre par là même un fascinant panel de héros Bukowskiens.

J'ai évidemment gardé le meilleur pour la fin, et il n'y sera pas question de rock ou de métal. Tout au contraire, Let's get Lost est un magnifique portrait d'un grand nom du jazz : Chet Baker. Tourné dans un noir et blanc sublime, le film transcende littéralement son sujet et nous offre la personnification du grand Chet en film. Bruce Weber, photographe de profession et ami du jazzman, ne se contente pas de retracer le parcours émérite de Baker. Il incarne une vision du jazz, en l'occurrence le cool jazz aux moyens d'une esthétique sans failles et d'une narration éclatée et mélancolique. On ne peut même pas taxer le film de nostalgique, le cool jazz étant nostalgique par essence. Ainsi déambule-t-on sur les plages californiennes aux éternels couchés de soleils, en compagnie d'un grand héraut, qui sans le savoir peut-être, nous faisait ses adieux. Un grand film donc, que l'on soit fan de jazz ou pas.

Voilà, j'espère que ce petit tour d'horizon vous a plu et donné envie de voir les films ! En attendant une suite éventuelle, on attendra de nos amis du reggae (ou des autres) d'éventuels retours sur le documentaire Marley, qui parle évidemment du plus célèbre des Bob, sorti en salles mercredi. Alors, nouvelle galerie d'images vide de sens à la gloire du musicien, documentaire banal et chiant, ou va-t on en apprendre plus sur l'homme derrière la légende ? Et vous, quels sont vos documentaires de référence ?

McFly

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